Trois petits O’Hara et puis s’en vont
Hugo Dumas
Le « March Madness » des finales de séries québécoises se poursuit avec la tombée de rideau sur le téléroman O’, dont le départ a été éclipsé par celui, pas mal plus médiatisé, d’Unité 9 à Radio-Canada.
Pourtant, les fans de la famille O’Hara à TVA ont eu droit à des adieux très bien ficelés, qui ont racheté la décevante dernière année et mis un point final à cette saga de sept saisons et demie.
La dernière photo de famille des O’Hara, jumelée à la première prise en janvier 2012, a montré toute la progression de ce clan dysfonctionnel, mais aimant, qui a traversé plusieurs morts (Kathleen, Mina, Laurent, Déborah et David), grossesses à risque, accidents d’auto, cancers fulgurants et fraudes sur des brevets de bioplastique.
Blague à part, la scène finale d’O’ avait un goût doux-amer. On a vu au fil des ans que le patriarche bourru Samuel O’Hara (excellent Guy Nadon) a énormément évolué. Il a accepté l’homosexualité de son petit-fils Éric (Guillaume Gauthier), il a accompagné son meilleur ami Théo (Paul Savoie) dans son suicide assisté et a amorcé une transition vers la pleine retraite. Le Samuel de 2012, intransigeant, et celui de 2019, plus conciliant, n’auraient pas été copains-copains.
Par contre, le Samuel 2.0 savait que le cancer le tuerait rapidement. Voici un grand-papa qui croyait profiter des triplés de sa fille Gloria (Geneviève Boivin-Roussy) et de sa petite-fille Samuelle, mais qui mourra dans quelques années. C’est cruel comme fin de vie. Et c’était crève-cœur de voir Samuel pleurer autant et vaciller, prisonnier de son secret que seul Charles (Stéphane Demers) connaissait.
La grande scène du banquet au chalet – pardon, au château des O’Hara – a permis de clore le destin de tous les membres de cette famille bourgeoise.
Cette séquence représentait le meilleur du téléroman O’ : des repas animés où le méchant sortait souvent, entre deux services de vin cher. Il ne manquait que les pyjamas de soie de Jacqueline (Marie Tifo) et les robes de chambre de luxe de Samuel.
Malgré des creux de vague (dernier jeu de mots aquatique, ici), je n’ai pas raté un seul des 174 épisodes d’O’ à TVA. J’ai beaucoup aimé les O’Hara, tous impliqués, de près ou de loin, dans la gestion de l’entreprise Agua. O’ a été une rare émission qui valorisait la réussite en affaires et où personne ne se sentait coupable d’être riche, sans toutefois se vautrer dans une opulence indécente.
Mes préférés ont été le survivant Charles et la douce Louisa (Marilyse Bourke). À l’image de Jeanne dans Unité 9, Gloria O’Hara a subi une super métamorphose en presque sept ans. D’enfant gâtée, démotivée et droguée, nous l’avons quittée en artiste accomplie et mère de quatre enfants, dont une, la petite Abby, qu’elle a adoptée de son propre père. Vous l’aviez oublié ? Abby est le fruit de l’adultère entre Samuel et sa maîtresse Déborah Mills (Fanny Mallette).
Les adeptes de la série O’ ont été fidèles jusqu’à la dernière seconde. Mardi soir, alors que 1 215 000 personnes visionnaient la fermeture des portes de Lietteville, 903 000 autres ont assisté à l’ultime réunion des O’Hara, qui ont embouteillé leurs derniers souvenirs. Excusez-la !
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