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Re: Nathalie Elgrably (page 7, RRQ RPC une chaine de ponzy???? )
Publié : ven. févr. 20, 2009 6:30 am
par .anthurium.
Sortir des sentiers battus
Par Nathalie Elgrably-Lévy
Économiste sénior, Institut Économique de Montréal
La Presse Canadienne nous apprenait récemment que le taux de décrochage scolaire chez les jeunes du secteur public est passé de 26% en 2000, à 29% en 2007. Puis, la semaine dernière, la Commission scolaire de Montréal révélait qu’à peine 40,7% des élèves entrés au secondaire en 2002 avaient obtenu leur diplôme cinq ans plus tard. Les statistiques sont éloquentes: le décrochage est un fléau!
Comme chaque fois que le décrochage défraye les manchettes, des voix s’élèvent pour réclamer des solutions au problème. Évidemment, vu la fascination des élus pour les bavardages stériles et les rapports aussi inutiles qu’onéreux, il faut s’attendre à ce qu’on nous annonce la tenue de tables de concertation, de forums, de commissions d’enquête, de consultations publiques, de groupes de travail, etc.
Déjà, la Centrale des Syndicats du Québec demande au gouvernement Charest de tenir un sommet sur le décrochage, et de concevoir une politique interministérielle. Après plusieurs mois d’intense réflexion aux frais des contribuables, on nous dévoilera en grandes pompes une série de recommandations savantes comme l’élaboration d’un plan de réussite, la réduction de la taille des classes, l’embauche de professionnels, l’intégration d’enfants en difficultés, l’établissement de règles et de politiques et, bien entendu, l’absolue nécessité de débloquer des fonds. On peut également parier l’école privée sera écorchée au passage et qu’on la rendra responsable de biens des difficultés que rencontre l’école publique.
Le hic, c’est que plusieurs de ces mesures ont déjà été adoptées sans succès. Il est donc temps de sortir des sentiers battus, d’autant plus que si les jeunes décrochent, ce n’est certainement pas parce qu’ils sont insatisfaits du ratio professeur-élèves. En revanche, ne se pourrait-il pas qu’ils abandonnent l’école parce qu’ils sont attirés par les revenus qu’ils peuvent gagner en travaillant, et qu’ils sont incapables d’évaluer les bénéfices de l’éducation? L’école ne serait-elle pas en concurrence avec le marché du travail? Si c’est le cas, il faudrait faire en sorte que l’école devienne plus «payante» que la jobine au salaire minimum.
Ainsi, pourquoi ne pas imaginer un programme d’«allocations pour études» en vertu duquel un jeune obtiendrait un revenu à condition qu’il fréquente l’école? Certes, payer les jeunes pour qu’ils étudient peut coûter cher au trésor public. Mais un tel programme peut être économique si on tient compte de la facture associée au décrochage. À cet effet, l’économiste Pierre Fortin a récemment évalué qu’un décrocheur impose un fardeau de 500 000$ à la société. Une étude du Conseil canadien sur l’apprentissage a également estimé que le décrochage coûte 37 milliards de dollars par année à Ottawa. Et puis, on pourrait certainement financer cette initiative en abolissant la pléthore de programmes inutiles qui grugent les finances publiques.
L’idée semble farfelue? Le Mexique l’a pourtant exploitée en introduisant en 1997 le programme Oportunidades qui consiste à payer les familles pour qu’elles envoient leurs enfants à l’école. Le principe de l’incitation financière a tellement bien fonctionné que plus de trente pays l’ont adopté depuis. Même la ville de New York et la Grande Bretagne se sont inspirées de ce programme pour lutter contre le décrochage.
Au Québec, la meilleure idée pour lutter contre le décrochage revient certainement à Centraide KRTB-Côte-du-Sud pour son Programme de bourses d’études pour enfants défavorisés en vertu duquel un jeune qui souhaite poursuivre des études postsecondaires pourrait obtenir jusqu’à 16500$. Ce programme n’exploite pas l’incitation financière aussi bien que Oportunidades, mais le principe est là. Pourquoi ne pas l’appliquer maintenant à grande échelle?
Re: Nathalie Elgrably (page 7, Le décrochage scolaire)
Publié : ven. févr. 20, 2009 6:38 am
par .anthurium.
Mme Elgrably avec André Arthur
http://www.tqs.ca/videos/le-midi-avec-a ... -41043.php" onclick="window.open(this.href);return false;
Re: Nathalie Elgrably (page 7, RRQ RPC une chaine de ponzy???? )
Publié : ven. févr. 20, 2009 8:02 am
par lucide
.anthurium. a écrit : Sortir des sentiers battus
Par Nathalie Elgrably-Lévy
Économiste sénior, Institut Économique de Montréal
La Presse Canadienne nous apprenait récemment que le taux de décrochage scolaire chez les jeunes du secteur public est passé de 26% en 2000, à 29% en 2007. Puis, la semaine dernière, la Commission scolaire de Montréal révélait qu’à peine 40,7% des élèves entrés au secondaire en 2002 avaient obtenu leur diplôme cinq ans plus tard. Les statistiques sont éloquentes: le décrochage est un fléau!
Comme chaque fois que le décrochage défraye les manchettes, des voix s’élèvent pour réclamer des solutions au problème. Évidemment, vu la fascination des élus pour les bavardages stériles et les rapports aussi inutiles qu’onéreux, il faut s’attendre à ce qu’on nous annonce la tenue de tables de concertation, de forums, de commissions d’enquête, de consultations publiques, de groupes de travail, etc.
Déjà, la Centrale des Syndicats du Québec demande au gouvernement Charest de tenir un sommet sur le décrochage, et de concevoir une politique interministérielle. Après plusieurs mois d’intense réflexion aux frais des contribuables, on nous dévoilera en grandes pompes une série de recommandations savantes comme l’élaboration d’un plan de réussite, la réduction de la taille des classes, l’embauche de professionnels, l’intégration d’enfants en difficultés, l’établissement de règles et de politiques et, bien entendu, l’absolue nécessité de débloquer des fonds. On peut également parier l’école privée sera écorchée au passage et qu’on la rendra responsable de biens des difficultés que rencontre l’école publique.
Le hic, c’est que plusieurs de ces mesures ont déjà été adoptées sans succès. Il est donc temps de sortir des sentiers battus, d’autant plus que si les jeunes décrochent, ce n’est certainement pas parce qu’ils sont insatisfaits du ratio professeur-élèves. En revanche, ne se pourrait-il pas qu’ils abandonnent l’école parce qu’ils sont attirés par les revenus qu’ils peuvent gagner en travaillant, et qu’ils sont incapables d’évaluer les bénéfices de l’éducation? L’école ne serait-elle pas en concurrence avec le marché du travail? Si c’est le cas, il faudrait faire en sorte que l’école devienne plus «payante» que la jobine au salaire minimum.
Ainsi, pourquoi ne pas imaginer un programme d’«allocations pour études» en vertu duquel un jeune obtiendrait un revenu à condition qu’il fréquente l’école? Certes, payer les jeunes pour qu’ils étudient peut coûter cher au trésor public. Mais un tel programme peut être économique si on tient compte de la facture associée au décrochage. À cet effet, l’économiste Pierre Fortin a récemment évalué qu’un décrocheur impose un fardeau de 500 000$ à la société. Une étude du Conseil canadien sur l’apprentissage a également estimé que le décrochage coûte 37 milliards de dollars par année à Ottawa. Et puis, on pourrait certainement financer cette initiative en abolissant la pléthore de programmes inutiles qui grugent les finances publiques.
L’idée semble farfelue? Le Mexique l’a pourtant exploitée en introduisant en 1997 le programme Oportunidades qui consiste à payer les familles pour qu’elles envoient leurs enfants à l’école. Le principe de l’incitation financière a tellement bien fonctionné que plus de trente pays l’ont adopté depuis. Même la ville de New York et la Grande Bretagne se sont inspirées de ce programme pour lutter contre le décrochage.
Au Québec, la meilleure idée pour lutter contre le décrochage revient certainement à Centraide KRTB-Côte-du-Sud pour son Programme de bourses d’études pour enfants défavorisés en vertu duquel un jeune qui souhaite poursuivre des études postsecondaires pourrait obtenir jusqu’à 16500$. Ce programme n’exploite pas l’incitation financière aussi bien que Oportunidades, mais le principe est là. Pourquoi ne pas l’appliquer maintenant à grande échelle?
+

Absolument contre cette idée.......
Ils préferent a 16 ans faire des partys, avoir des vetements griffés, une auto, un cellulaire et meme un appart que s'éduquer... c'est peut etre que certains parents font pas leur job...
c'est peut etre que la société investit en propageant pas le culte du travail
quand tu inondes la télévision d'émission de l'image du conte de cendrillon ou au lieu de travailler tu vas choisir des valises ou t'asseoir neuf semaines dans un loft a dire des nullités et obscenités pour receuillir le gros montant cela valorise pas trop l'effort.
Et on les paieraient pour venir se pogner le cul a l'école
Si une allocation devrait etre verser c'est a ceux qui terminent leur secondaire 5 dans les temps prescrits, cela leur permettra un petit fond pour entamer leur cegep.
Les gens recoivent leur payes apres avoir travaillé pas avant.
Cela me mets tellement en ch... de lire de tels propos...
Re: Nathalie Elgrably (page 7, RRQ RPC une chaine de ponzy???? )
Publié : ven. févr. 20, 2009 8:31 am
par .anthurium.
lucide a écrit : [...]
+

Absolument contre cette idée.......
Ils préferent a 16 ans faire des partys, avoir des vetements griffés, une auto, un cellulaire et meme un appart que s'éduquer... c'est peut etre que certains parents font pas leur job...
c'est peut etre que la société investit en propageant pas le culte du travail
quand tu inondes la télévision d'émission de l'image du conte de cendrillon ou au lieu de travailler tu vas choisir des valises ou t'asseoir neuf semaines dans un loft a dire des nullités et obscenités pour receuillir le gros montant cela valorise pas trop l'effort.
Et on les paieraient pour venir se pogner le cul a l'école
Si une allocation devrait etre verser c'est a ceux qui terminent leur secondaire 5 dans les temps prescrits, cela leur permettra un petit fond pour entamer leur cegep.
Les gens recoivent leur payes apres avoir travaillé pas avant.
Cela me mets tellement en ch... de lire de tels propos...
Tu amène une très bonne idée.

Re: Nathalie Elgrably (page 8, Le décrochage scolaire)
Publié : sam. févr. 28, 2009 6:16 am
par .anthurium.
Le début de la fin
Le Journal de Montréal, p. 21 / Nathalie Elgrably-Lévy, 26 février 2009
Malgré quelques soubresauts, les marchés boursiers sont en chute libre. Et même si la débandade occupe les médias depuis les deux dernières semaines, elle a réellement débuté en septembre dernier quand Obama a devancé McCain lors de la campagne présidentielle. Depuis, l'indice S&P 500 a dégringolé de 35,4%. Le Dow Jones a perdu presque 20% depuis l'élection du 4 novembre. Durant la seule journée du 21 novembre, il a perdu 6,5% après que le nouveau président eut nommé Thimothy Geithner comme Secrétaire au Trésor.
Ce n'est pas tout. La performance du Dow Jones au cours du mois de janvier a été la pire des 113 dernières années. Quant au plan de 789 milliards qu'Obama a signé il y a une dizaine de jours, il a fait de nouveau plonger le Dow Jones de 6,5%.
Évidemment, comme la quasi-totalité des analystes et des commentateurs sont béats devant le sourire du nouveau président, ils nient qu'un lien puisse exister entre la débâcle boursière et la nouvelle administration. Ils préfèrent proposer des explications aussi décousues que futiles, comme le manque de précision du plan de relance.
La réalité est pourtant simple. Si les marchés n'en finissent plus de s'écrouler, et si les plans de relance sont mal accueillis, c'est que les millions d'investisseurs n'apprécient ni la nouvelle administration ni ses initiatives pour stimuler l'économie.
Peut-on les blâmer? Obama, le Lucky Luke de la Maison-blanche, dépense plus vite que son ombre. Si on additionne tous les plans de relance, on atteint un total mirobolant d'environ 8000 milliards. Il faudrait dépenser dix millions par jour pendant presque 2 000 ans pour atteindre ce chiffre! Et comme ils seront en partie financés par l'impression de monnaie, il faut s'attendre à une inflation importante d'ici 12 à 18 mois. Et qui dit inflation, dit dévaluation de la monnaie. N'est-il donc pas logique que les investisseurs boudent la bourse et se tournent vers les valeurs sûres, comme l'or?
Si l'on tient compte de toutes les obligations, actuelles et futures, du gouvernement américain, y compris la sécurité sociale et les régimes publics de soins de santé, on arrive à 65 000 milliards. C'est plus que le PIB mondial! Concrètement, cela signifie que l'Oncle Sam est en faillite.
Les marchés boursiers en sont conscients et ils lancent un message clair. Ils ne veulent pas d'un gouvernement qui s'endette sans réfléchir. Ils n'apprécient pas que la Réserve fédérale poursuive une politique inflationniste. Ils n'approuvent pas que les contribuables soient forcés de secourir des constructeurs automobiles inefficaces ou des banquiers irresponsables. Ils se méfient d'un Sénat qui autorise un plan de relance de plus de 1000 pages sans même l'avoir lu. Ils n'admettent pas qu'au nom de la crise économique, on envisage de nationaliser des banques. Ils ne comprennent pas que leurs dirigeants, plutôt que de tirer des leçons de l'échec des efforts de relance du Japon dans les années 1990, s'apprêtent à reproduire les mêmes erreurs.
Des millions d'investisseurs constatent que l'Amérique renie tous les principes qui lui ont permis de devenir une puissance économique, et ils ont peur. Ils voient l'Oncle Sam prendre le virage socialiste, et ils préfèrent prendre la fuite. Ils constatent que leurs dirigeants prennent des décisions politiquement rentables, mais économiquement désastreuses, et ils sont écoeurés. Les bourses ne s'effondrent pas parce que les investisseurs saisissent mal les plans de relance. Elles s'écroulent parce qu'ils ont trop bien compris dans quel bourbier l'Amérique s'enfonce!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée
Re: Nathalie Elgrably (page 8, Obama et la chute de la bourse)
Publié : ven. mars 06, 2009 8:29 am
par .anthurium.
La déité
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 05 mars 2009
Dans ma chronique de la semaine dernière, j’ai associé l’effondrement du Dow Jones aux politiques de l’administration Obama. Évidemment, comme chaque fois que j’exprime mon opinion sur les politiques du nouveau président, j’ai droit à une avalanche de courriels haineux dont le ton laisse supposer des expéditeurs ensorcelés par les incantations du leader américain, et programmés pour défendre son message. Manifestement, dans certains cercles, Obama est un dieu, douter de ses initiatives est un sacrilège, et désapprouver ses politiques, un péché capital!
Certes, chacun est libre de déifier la personne de son choix. Mais vouloir bâillonner quiconque n’adore pas le gourou ou ne pratique pas le culte, est une manœuvre inquisitoriale inacceptable dans une démocratie moderne. J’entends donc bien faire respecter mon droit de me dissocier du délire collectif, de refuser d’idolâtrer le nouveau président, et de décliner l’invitation à m’autocensurer. En revanche, je continuerai à apprécier Barack Obama pour ce qu’il est, soit le président des États-Unis, ni plus, ni moins. Et si ses prédécesseurs ont eu droit à la critique et à des propos quelquefois vitriolés, pourquoi Obama devrait-il être épargné?
L’équipe Obama est certainement très bien intentionnée. Mais les mesures adoptées depuis quelques semaines achèveront une Amérique déjà fragilisée. Dans le contexte actuel, il est impératif d’encourager la production. Pour y arriver, il faut stimuler l’investissement et inciter les entrepreneurs à prendre des initiatives. Or, ce n’est pas en augmentant l’impôt sur les gains en capital et sur les dividendes que Washington y parviendra, bien au contraire.
Il faut également augmenter le pouvoir d’achat des travailleurs. Or, abolir les coupures d’impôts votées en 2001 et 2003 est une mesure contre-productive, car elle alourdit le fardeau fiscal des Américains. Globalement, les hausses d’impôts avancées par l’équipe Obama auront pour effet de décourager le travail, l’épargne, l’investissement et l’entrepreneurship, avec pour conséquences d’allonger et d’aggraver la récession, d’imposer une reprise lente et modeste, et de réduire la compétitivité des industries américaines. Obama affirme vouloir combattre la crise économique mais, par ses initiatives, il a déclaré la guerre à la prospérité!
Pis encore, il a endossé un tsunami de dépenses. À titre comparatif, les plans de sauvetage et de relance des dernières semaines ont coûté l’équivalent de 15 guerres en Irak. Certains affirment que les dépenses de l’État sont indispensables pour dynamiser une économie amorphe. C’est faux. George W. Bush a dépensé plus que n’importe lequel des ses prédécesseurs. Il a été incontestablement le président le plus interventionniste des 20 dernières années. On connait le résultat. Pour quelle raison les dépenses de la nouvelle administration seraient-elles donc plus efficaces?
Et puis, n’oublions pas que ces dépenses doivent être financées. Et même si Obama et Ben Bernanke évitent d’en parler, il est clair et inévitable que l’impression de monnaie est l’un des modes de financement retenu. Le processus a d’ailleurs déjà commencé. Il faut donc s’attendre à voir le retour de l’inflation d’ici la fin de 2009. Or, l’inflation est un phénomène sournois, une taxe implicite qui réduit la valeur de nos économies et notre pouvoir d’achat. C’est le cancer de l’économie.
Obama sait pertinemment que ses initiatives entraîneront une douloureuse inflation qui appauvrira rapidement les Américains. Mais, à en juger par les gestes posés, il s’en fiche royalement. Il est déterminé à faire avancer son agenda socialiste, même si ses ambitions occasionnent une destruction de richesses sans précédent.
Les belles paroles d’Obama font rêver beaucoup de gens. Mais le rêve se transformera en affreux cauchemar, ce n’est qu’une question de temps!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8, Obama et son plan)
Publié : jeu. mars 19, 2009 7:02 am
par .anthurium.
La recette du succès
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 12 mars 2009
De plans de relance en plans de sauvetage, les gouvernements proposent des politiques concoctées par une poignée d’individus convaincus d’être capables de tirer les ficelles de l’économie. Ils dépensent des milliers de milliards de dollars dont ils ne disposent pas, ils s’endettent, impriment de l’argent, taxent, subventionnent, réglementent et contrôlent dans l’espoir de stimuler l’économie.
Toutefois, penser qu’il suffit de quelques mesures «anti-crise» pour relancer une économie moribonde revient à croire que l’État est omniscient et omnipotent, et que la planification centrale pave la voie vers la prospérité.
Or, une telle affirmation relève de la pensée magique. Pour le prouver, on pourrait citer la multitude d’études qui démontrent l’inefficacité de l’interventionnisme ou l’échec essuyé par les pays qui ont cru en l’État-providence. Mais dans ce domaine rien ne vaut l’éloquence, la pédagogie et l’humour d’un petit essai publié en 1958 sous la plume de Leonard Read et intitulé «I, Pencil» (Moi, le crayon).
L’auteur parvient à démontrer que personne au monde ne sait comment fabriquer le crayon à mine le plus ordinaire, soit le célèbre crayon au plomb enjolivé d’une peinture jaune et couronné d’une efface rose. Cela semble invraisemblable? C’est pourtant vrai! D’abord, il a fallu couper du bois. Or, pour cela il faut une scie. Pour fabriquer une scie, il faut du métal, qui nécessite à son tour l’extraction de minerai. Une fois le bois coupé, il faut l’acheminer vers une usine, d’où la nécessité de disposer de camions, de trains, etc. Ensuite, pour produire la mine, il faut extraire du graphite et le mélanger à de l’argile. L’efface, elle, est produite en faisant réagir de l’huile de colza avec du chlorure de souffre, en y ajoutant du caoutchouc et du sulfure de cadmium pour la couleur. Quant à la peinture jaune, au bout de métal, ou à l’inscription de la marque, leur production exige également les savoir-faire de plus de personnes que l’on n’en pourrait énumérer.
Pour produire un crayon, il faut colliger les connaissances et les habiletés de milliers de personnes disséminés à travers le monde. Ce qui est extraordinaire, c’est que cette symbiose apparait de manière naturelle et spontanée en réponse aux besoins humains. Surtout, ceci est possible en l’absence de planificateur central.
Si nos fonctionnaires sont incapables, par eux-mêmes, de fabriquer un simple crayon, pourquoi seraient-ils en mesure de gérer toute une économie? Comment peuvent-ils prétendre posséder suffisamment d’informations pour manipuler les millions de marchés alors qu’ils ignorent tout de la fabrication du plus banal des crayons? L’État se prend souvent un dieu, mais il n’est ni omniscient ni omnipotent. D’ailleurs, si l’être humain est passé de l’âge de pierre à civilisation moderne, c’est uniquement grâce à ses efforts, et non grâce à un planificateur central.
Cela signifie que pour sortir de la crise, nous ne devons compter que sur nous-mêmes. En chinois, le terme «crise» se dit weiji. «Wei» signifie danger, et «ji» indique une opportunité. Ainsi, une crise est une opportunité. Or, pour saisir les occasions qui se présentent, il ne faut ni être accroché aux mamelles de l’État ni s’en remettre à lui pour nous sauver d’une conjoncture difficile, ni se victimiser. Notre savoir-faire, notre ingénuité, notre talent, notre créativité et notre énergie contribuent davantage à la prospérité économique que le plus ambitieux des plans de relance. Si le Québec veut rapidement sortir de la crise, il doit cesser d’attendre que l’argent tombe du ciel. Il doit faire preuve d’imagination et d’esprit d’entreprise et, surtout, travailler fort!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La recette du succès)
Publié : ven. mars 27, 2009 9:41 am
par .anthurium.
Roi ou pantin?
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 19 mars 2009
C’est aujourd’hui que la ministre des Finances, madame Monique Jérome-Forget, dépose son budget, et on peut raisonnablement s’attendre à ce qu’elle propose des mesures pour encourager la consommation. Le Mouvement Desjardins a d’ailleurs récemment publié une étude fortement médiatisée dans laquelle les auteurs insistent pour qu’elle emprunte cette voie. Et puis, comment pourrait-elle faire autrement alors qu’on nous martèle que la frugalité des consommateurs fait régresser l’économie? Pourquoi n’incriminerait-elle pas les acheteurs puisque les économistes de nos institutions financières les accusent avec véhémence?
Le discours actuellement véhiculé est sans équivoque: dépenser prudemment est un geste antipatriotique; épargner nous rend coupables de terrorisme économique. Si seulement nous, consommateurs individualistes et narcissiques, pouvions délier les cordons de notre bourse, tout irait mieux. C’est du moins ce qu’on tente de nous faire croire. Et, si on suit cette logique, les acheteurs compulsifs et les accros du shopping seraient des mécènes, de grandes âmes dont le comportement permet aux entreprises d’être rentables et aux travailleurs, de conserver leurs emplois.
Dans l’ordre du monde qu’on nous présente, les consommateurs sont au service des entreprises. Ils n’existent que pour permettre aux vendeurs d’écouler leurs marchandises. Et quand ils ne se conforment pas aux attentes, quand leurs goûts, leurs habitudes ou leurs priorités changent, on les blâme de saboter le système. Quand ils épargnent, on leur reproche de provoquer une crise économique.
Cette interprétation du système économique est tordue. On achète des biens pour combler nos besoins, non pour satisfaire les entreprises. Ce sont elles qui doivent répondre aux attentes des acheteurs, et non l’inverse. Si elles produisent des biens qui ne trouvent pas preneurs, c’est leur problème, non celui des consommateurs. Il n’y a pas si longtemps, une entreprise qui rencontrait des difficultés devait revoir son modèle d’affaire. Aujourd’hui, l’État imagine des moyens pour nous forcer à acheter ses produits. Jadis, le consommateur était roi. À présent, c’est un pantin à la disposition des producteurs. Nous étions libres de consommer ou d’économiser, mais cette époque est révolue. Après la société de consommation, voici maintenant l’ère de la consommation par coercition!
Certes, cette coercition est bien intentionnée, mais elle reste irrationnelle. On le sait, l’État doit financer ses programmes destinés à stimuler la consommation. Il doit donc taxer. Ainsi, il commence par réduire le pouvoir d’achat des individus pour ensuite l’augmenter. Il déprime la consommation pour après la stimuler. Or, si nos bons gouvernements étaient moins gourmands, s’ils résistaient à l’envie de vider nos poches, ils n’auraient pas besoin de nous «gratifier» de plans de relance.
Ce n’est pas tout. Tout le monde s’entend sur le fait que l’État réduit la rentabilité des entreprises et les décourage d’investir ou de prendre de l’expansion en raison d’une fiscalité étouffante et d’une bureaucratie débilitante. Or, quand les entreprises rencontrent des difficultés, quand elles sont incapables de compétitionner sur les marchés, on accuse les consommateurs de dépenser trop peu. N’est-il jamais venu à l’idée de nos élus que le secteur de la production se porterait mieux si on le laissait respirer un peu? N’ont-ils pas compris que le plus efficace des plans de sauvetage est celui qui délivre l’entrepreneurship de l’étau qui l’étrangle?
Malgré tout, on peut s’attendre à ce que le budget d’aujourd’hui présente des mesures de relance aussi illogiques qu’inutiles. Du bling-bling économiquement stérile, mais électoralement rentable. Pourtant, ce dont l’économie a besoin, ce n’est pas que l’État lui administre un antidote, c’est qu’il cesse de l’empoisonner!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
© 2009 IEDM |
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La recette du succès)
Publié : ven. mars 27, 2009 9:42 am
par .anthurium.
De la bouche du gourou
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 26 mars 2009
Cela fait déjà quelques semaines que j’ai envie de vous parler de l’Australie, mais ce n’est ni pour ses marsupiaux ni pour son célèbre Opéra. C’est plutôt parce que nous aurions intérêt à tirer quelques enseignements économiques de son histoire.
À l’instar de nombreux pays, l’Australie n’a pas échappé à la Grande Dépression. Mais le défi que cette île du bout du monde devait relever était d’autant plus considérable qu’elle était relativement désavantagée: elle était peu peuplée; son économie, relativement petite, reposait sur l’agriculture et les exportations minières; sa base industrielle était limitée; les investissements manquaient et, pour couronner le tout, les grèves étaient très fréquentes.
Mais, contre vents et marées, l’Australie réussit à se sortir de la Dépression plus rapidement que les États-Unis. Ainsi, en 1932, les taux de chômage aux États-unis et en Australie étaient respectivement de 23,6% et de 23%. En 1938, il atteignait encore 19% chez l’Oncle Sam, mais avait diminué à 8,9% au pays des kangourous.
L’Australie avait-elle accompli cet exploit grâce à un plan de relance encore plus ambitieux que le New Deal? Avait-elle généreusement aidé les entreprises en difficulté? Sa Banque Centrale avait-elle injecté d’importantes quantités de monnaie? Non! Rien de tout cela. Exception faite de dépenses minimes en infrastructures, l’Australie n’avait aucun plan de relance d’inspiration keynésienne, aucun plan de sauvetage, aucun budget de crise.
En revanche, le gouvernement de Canberra adopta le «Premiers’ Plan» dès 1931, par lequel il s’engageait à réduire les dépenses gouvernementales de 20%, y compris les dépenses militaires, à maintenir l’équilibre budgétaire, et à réduire aussi bien les salaires des travailleurs du secteur public que ceux du secteur privé.
Ces mesures, aux antipodes de l’interventionnisme que J. M. Keynes prônait alors, n’étaient pas le produit des délirantes élucubrations du premier ministre australien, James Scullin. Elles n’étaient que la concrétisation des bonnes vieilles théories économiques classiques selon lesquelles, comme l’exige le gros bon sens, un pays doit réduire sa consommation, épargner, investir et être plus productif s’il veut prospérer.
Presque huit décennies plus tard, l’héritage de Keynes domine encore l’économie politique. Faisant fi des enseignements de l’histoire, politiciens et commentateurs restent convaincus de la nécessité de dépenser massivement et de générer un déficit pour stimuler l’économie.
Exception faite du Nouveau-Brunswick qui a récemment annoncé d’importantes compressions de la fonction publique et un allégement du fardeau fiscal des contribuables et des entreprises, le reste du monde semble vouloir imiter, à divers degrés, les initiatives keynésiennes de Washington.
Au Québec, la ministre des Finances, madame Monique Jérôme-Forget, a fait également référence à J.M. Keynes pour justifier son dernier budget. Manifestement, le célèbre économiste britannique est devenu le gourou de la plupart des décideurs publics dont le comportement moutonnier n’a d’égal que leur manque de culture économique.
Pourtant, s’ils se donnaient la peine de se renseigner convenablement, ils apprendraient que les déficits, même s’ils sont suivis d’un retour à l’équilibre budgétaire, ne sont pas une panacée. Bien au contraire! Ils réaliseraient également que la pensée keynésienne qu’ils vénèrent tant a été totalement discréditée entre autres par Friedrich Hayek, récipiendaire du prix Nobel d’économie de 1974.
Mais surtout, ils découvriraient que, dans un article posthume, publié en 1946 dans le Economic Journal, Keynes lui-même admet avoir eu tort de dédaigner la pensée de l’école classique qu’il juge finalement empreinte d’une grande vérité. Ces politiciens qui veulent paraitre instruits en invoquant la pensée de Keynes auraient vraiment intérêt à lire ses écrits plutôt qu’à répéter ce que certains leur soufflent!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
© 2009 IEDM |
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La recette du succès)
Publié : ven. avr. 03, 2009 8:31 pm
par .anthurium.
Empire ou république de bananes?
Le Journal de Montréal, p. 23 / Nathalie Elgrably-Lévy, 02 avril 2009
On a vivement dénoncé les primes de 165 millions $US versées par AIG à ses dirigeants, et on a amplement discouru sur la rémunération des chefs d’entreprises.
Certes, employer l’argent des contribuables pour récompenser les cadres d’une entreprise en difficulté est inqualifiable et impardonnable.
Mais pendant que toute notre attention était tournée vers le mélodrame politique dont Washington était le théâtre, une décision infiniment plus grave et plus lourde de conséquences a été prise.
Depuis dix jours, on se laisse distraire par un scandale alimenté et amplifié par le Congrès, alors que nos yeux devraient être rivés sur la Fed.
On consacre les manchettes au manque d’éthique d’AIG, mais ce sont les actions des autorités monétaires américaines qu’on devrait violemment dénoncer.
En effet, personne n’a sourcillé quand, le 19 mars dernier, la Fed a annoncé qu’elle injectera 1200 milliards supplémentaires.
Pourtant, en dépensant 1$ à la seconde, il faudrait 5,2 années pour atteindre 165 millions, mais 37 800 ans pour arriver à 1200 milliards. Mis en perspective, les bonis d’AIG, c’est un grain de sable dans le désert!
En pratique, la Fed va tout simplement imprimer le montant annoncé.
En novembre dernier, j’avais déjà exprimé ma crainte de voire la Réserve fédérale recourir à la planche à billets comme mode de financement, car cette méthode génère invariablement de l’inflation.
Aujourd’hui, quand on ajoute à la récente annonce tous les plans de relance et de sauvetage adoptés au cours des derniers mois, l’inflation n’est plus une inquiétude, c’est une certitude absolue.
Et devant l’ampleur de la monétisation, la dévaluation de la monnaie sera énorme, et on ne peut exclure la possibilité d’une hyperinflation digne du Zimbabwe d’aujourd’hui ou de l’Allemagne des années 1930.
D’ailleurs, tous les pays qui ont imprimé de l’argent pour honorer leurs engagements ont occasionné une inflation dévastatrice, et ont dû subir les conséquences sociales désastreuses qu’elle implique.
Ils ont appris, de la manière la plus douloureuse possible, qu’on ne règle pas un problème structurel en imprimant de l’argent. Alors, pourquoi Washington et la Fed empruntent-ils cette avenue?
Comme ils n’ignorent certainement pas les conséquences de leur geste, il faut en conclure qu’ils agissent sciemment.
Notons que la dette américaine représente aujourd’hui plus de 360% du PIB, sans compter le régime public de retraite, le Médicaire, et la sécurité sociale.
Techniquement, le gouvernement américain est en faillite. Il lui est impossible de rembourser ses créanciers.
Or, l’inflation avantage toujours les emprunteurs, car elle diminue la valeur réelle des montants remboursés. Ainsi, la dette colossale d’aujourd’hui apparaîtra insignifiante lorsque, «grâce» à la Fed, le billet vert ne vaudra plus que quelques sous.
Mais si l’inflation allège la dette de Washington, elle appauvrit tous ceux qui, à force d’efforts et de sacrifices, ont amassé quelques épargnes.
Elle réduit le niveau de vie de tous les baby boomers qui, à l’aube de la retraite, comptent sur leurs bas de laine. En peu de temps, l’inflation peut dilapider les économies de toute une vie.
L’inflation, c’est un spectaculaire hold-up perpétré par la banque centrale. Et comme le dollar américain est la monnaie de référence, personne ne sera épargné. Voilà qui est bien plus scandaleux qui les bonis d’AIG!
Obama a hérité d’une crise économique, j’en conviens. Mais lui seul est responsable des décisions prises depuis janvier, et du vandalisme économique que subit l’Amérique.
On a dit que l’élection d’Obama est historique. C’est vrai! C’est sous sa présidence que l’empire américain deviendra une république de bananes!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
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Re: Nathalie Elgrably (page 8 impression d'argents=inflation)
Publié : dim. avr. 12, 2009 3:36 pm
par .anthurium.
La déflation: une peur injustifiée
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 09 avril 2009
Vous voulez réagir à cet article? Vous voulez poser une question à son auteur?
Depuis quelques mois, les banques centrales de par le monde défendent leurs importantes injections de monnaie en affirmant qu’elles visent à contrer un phénomène redoutable, un monstre terrifiant, un spectre angoissant: la déflation!
Selon plusieurs analystes, il serait catastrophique que les prix baissent de manière soutenue et généralisée, car (1) comme tout coûtera moins cher demain, la déflation encouragerait les individus à réduire aujourd’hui leurs dépenses de consommation dans l’espoir de bénéficier des aubaines futures, ce qui compromettrait la viabilité des entreprises; et (2) la baisse des prix réduirait la profitabilité des entreprises et les acculerait à la faillite.
En apparence acceptables, ces deux arguments sont néanmoins bancals. Tout d’abord, déclarer que la déflation réduit la consommation, c’est affirmer que plus les prix des produits baissent, moins les gens en achètent. Mais est-ce vraiment logique?
Si on exprime le prix d’un bien en fonction du nombre d’heures de travail nécessaires payées au salaire médian pour l’acquérir, on constate que le prix de la plupart des biens ne cesse de diminuer.
Par exemple, en 1950, l’achat d’un réfrigérateur ou d’une télé équivalait à 154 et 162 heures de travail respectivement. Aujourd’hui, on peut se procurer les mêmes biens, mais de qualité largement supérieure, en travaillant 22 et 30 heures. De manière générale, les produits coûtent de 3 à 20 fois moins cher qu’il y a un demi-siècle. C’est la déflation par la productivité.
Or, n’avons-nous jamais reporté un achat sous prétexte de bénéficier des gains de productivité ultérieurs?
Ce n’est pas tout, même exprimés en valeur nominale, les prix de nombreux biens diminuent au fil du temps. C’est notamment le cas des ordinateurs et des produits électroniques que nous achetons toujours, même si nous savons pertinemment qu’ils coûteront moins cher demain.
Ajoutons que des prix moindres permettent aux consommateurs de réaliser des économies qu’ils pourront ensuite consacrer à l’achat de nouveaux produits ou d’autres biens auparavant inaccessibles. Est-ce là le drame déflationniste qu’on nous dépeint?
Quant aux entreprises, prétendre qu’elles seront moins profitables en période de baisse de prix est discutable.
En effet, d’une part, elles vendront davantage. D’autre part, ce n’est pas le prix de vente qui détermine la rentabilité d’une entreprise, mais l’écart entre ce prix et les coûts de production. Or, en période de déflation les prix des facteurs de production diminuent également. Donc, si les coûts diminuent au même rythme que les prix, la marge bénéficiaire est maintenue, et il n’y a aucune raison pour que la déflation nuise aux affaires.
Notons d’ailleurs que les États-Unis avaient enregistré une période de croissance entre 1875 et 1895 malgré une déflation de 1,7% par année. La vision apocalyptique d’un monde où notre pouvoir d’achat augmenterait est donc injustifiée.
Mais alors, à qui le fait que l’argent prenne de la valeur peut-il nuire? Et à qui l’inflation profite-t-elle? À celui qui a des dettes, bien entendu! En période de déflation, la valeur réelle d’une dette augmente, tandis qu’elle diminue dans la situation contraire. Et qui est particulièrement endetté? Les gouvernements en général, Washington en particulier, ainsi que toutes les entreprises qui ne pourraient survivre sans l’argent des plans de sauvetage.
Est-ce donc vraiment parce qu’ils se soucient du bien-être des consommateurs que les États font la guerre à la déflation? Et est-ce réellement pour protéger les entreprises qu’ils nous vantent les mérites d’un faible taux d’inflation? Peut-être. Mais ne serait-il pas également possible que les gouvernements soient plus préoccupés à alléger le fardeau de leur dette qu’à protéger notre pouvoir d’achat?
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La déflation: une peur injustifié)
Publié : jeu. avr. 16, 2009 8:56 pm
par .anthurium.
Et si on laissait mourir GM
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 16 avril 2009
On apprenait lundi que le Trésor américain prépare la faillite de GM. La nouvelle attriste, choque et désole. Or, même si cela peut surprendre, le dépôt du bilan est très certainement la meilleure solution pour GM, pour les investisseurs, et pour les consommateurs, d'autant plus que les déboires de l'entreprise durent depuis plus 20 ans!
Pour plusieurs, une faillite équivaut à une sentence de mort, à une fin ultime. C'est vrai pour GM, mais l'est-ce également pour l'industrie automobile? La disparition de GM implique-elle que les Américains cesseront dorénavant d'acheter des voitures et qu'ils enfourcheront leurs vélos? Si leur amour pour l'automobile ne s'éteint pas avec GM, ne faudra-t-il que d'autres constructeurs prennent la relève pour répondre à la demande?
La faillite, c'est une manière de mettre fin à un modèle d'affaires insoutenable à long terme. Un tribunal reconnaît le fait que l'entreprise est incapable de payer ses dettes, procède à la liquidation de ses actifs, et rembourse ses créanciers dans la mesure du possible. Or, qui achèterait une usine de GM ou ses équipements si ce n'est pour construire des autos? Les emplois perdus chez GM seront donc remplacés par d'autres créés par les nouveaux propriétaires. Certes, les nouveaux emplois n'offriront pas des conditions aussi avantageuses que celles actuellement offertes par le géant américain. C'est normal puisque celles-ci sont en partie responsables du gouffre financier de l'entreprise, et que la faillite permet précisément de se libérer de telles ententes pour offrir des conditions qui assureront la pérennité de l'entreprise.
De plus, tant que GM est sous respirateur artificiel, des ressources précieuses et des capitaux servent à produire de manière inefficace des véhicules que les consommateurs trouvent médiocres. La faillite est avantageuse, car elle libère ces ressources qui peuvent ensuite être redirigées vers des productions plus appréciées et des entreprises plus innovatrices. Continuer à aider GM, c'est donc non seulement récompenser des dirigeants incapables de s'adapter à la demande, mais c'est aussi pénaliser des entrepreneurs brillants en les privant des ressources nécessaires à leur croissance et en leur imposant une concurrence aussi artificielle qu'inutile. Ainsi, la fermeture de GM permettrait, par exemple, aux capitaux et aux ressources de migrer vers Tesla, le constructeur de la Roadster, un véhicule entièrement électrique plus près des préoccupations du 21e siècle que les modèles proposés par GM.
L'Économiste Joseph Schumpeter emploie l'expression «destruction créatrice» pour décrire le procédé par lequel des entreprises innovantes se substituent à celles qui sont moins efficaces, ou dont le produit est simplement dépassé. C'est ainsi que le CD a remplacé le disque de vinyle et que les caméras numériques ont détrôné les légendaires Polaroïd. Aurait-il fallu subventionner les entreprises anachroniques pour les garder en vie?
Dans un monde en perpétuelles mutations, on s'acharne souvent à préserver le statu quo, comme si l'état actuel du monde était le meilleur possible. Mais nos efforts pour figer le passé nous font perdre de vue l'avenir. Dans le dossier de GM, ce n'est pas tant la faillite qui devrait nous choquer le plus, mais bien le fait que le constructeur prolonge son agonie en tardant à déposer son bilan. Le contribuable américain a déjà dépensé 13,4 milliards pour «sauver» le constructeur, et on se retrouve au même point qu'il y a quelques mois. Ce genre d'aide équivaut à de l'acharnement thérapeutique sur un malade cliniquement mort. Les intentions sous-jacentes sont certes louables, mais si le géant américain n'est plus de son temps, ne devrait-il pas laisser la place à d'autres?
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 Et si on laissait mourir GM)
Publié : jeu. avr. 23, 2009 7:14 pm
par .anthurium.
La voix du peuple américain
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 23 avril 2009
Les nouvelles les plus importantes ne font pas toujours les manchettes, et certains moments historiques passent parfois inaperçus. C’est notamment ce qui s’est produit la semaine dernière.
Pendant que les médias s’extasiaient devant Bo, le nouveau chien de la famille Obama, et qu’ils ne tarissaient pas d’éloges pour le potager bio et le style vestimentaire de la première dame des États-Unis, ils ont négligé de rapporter que plus d’un demi-million d’Américains sont descendus dans les rues le 15 avril dernier. Et quand l’événement a été couvert, c’était pour en minimiser l’importance ou pour le ridiculiser.
Pourtant, un soulèvement qui se produit moins de trois mois après l’assermentation d’un nouveau président est un événement exceptionnel qu’on peut difficilement qualifier de futile. Et le comble du ridicule, n’est-ce pas justement de s’émerveiller devant un chien pendant que le peuple grogne?
Dans un mouvement spontané, des Américains de toute allégeance politique et de tout milieu ont organisé dans quelque 400 villes à travers les États-Unis des Tea Parties: des manifestations qui tiennent leur nom du Boston Tea Party de 1773 au cours duquel les colons s’étaient élevés contre les taxes imposées par l’Empire britannique. Mais penser que les événements de la semaine dernière visaient à protester contre les impôts, le parti Démocrate ou contre Barack Obama, c’est bien mal comprendre l’âme de l’Oncle Sam.
L’Amérique n’est pas devenue une grande puissance économique grâce à des politiques interventionnistes et à des dépenses stratosphériques, et ça, le peuple en est conscient. Il croit que l’État doit être au service du peuple, et non l’inverse. Il se révolte donc contre la trajectoire que la nouvelle administration veut imposer.
Il conteste le gaspillage monumental et éhonté de fonds publics. Il se dresse contre les membres du Congrès qui ont accepté de dépenser 787 milliards $ en faveur d’un plan de relance de 1000 pages qu’ils n’ont jamais lu. Il est horrifié face à la dette de 12 800 milliards que l’Amérique a contractée en moins de six mois, et il entrevoit déjà le moment où il faudra alourdir la fiscalité pour répondre aux nouveaux engagements. Il n’apprécie ni le contrôle politique de la société civile ni l’intrusion de l’État dans le milieu corporatif. En somme, il réalise que la tangente franchement socialiste de la nouvelle administration est en train de tuer le rêve américain, et il s’inquiète. C’est compréhensible!
En réponse aux Tea parties, Obama a annoncé lundi qu’il réduirait les dépenses de 100 millions. C’est à peine 0,003% du budget! Certains y voient un pas dans la bonne direction. J’y vois plutôt une marque de mépris envers l’intelligence des contribuables qu’il croit pouvoir endormir avec une mesure insignifiante.
Néanmoins, Obama n’a pas de souci à se faire dans l’immédiat puisqu’il bénéficie encore de la majorité des votes. Mais si son leadership est déjà contesté alors que les effets pervers de ses mesures ne se font pas encore sentir, comment les Américains réagiront-ils lorsque la politique monétaire débridée aura généré une douloureuse inflation qui les appauvrira? Comment Obama contiendra-t-il la colère des contribuables quand il devra augmenter les impôts? Et comment défendra-t-il ses décisions quand les Américains réaliseront que sa révolution socialiste n’a rien donné, si ce n’est une dette colossale?
J’ai récemment écrit que la nouvelle administration fera de l’Amérique une république de bananes. Mais vu les événements de la semaine dernière, j’ai maintenant espoir que la métamorphose rencontrera de la résistance!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La voix du peuple américain)
Publié : sam. avr. 25, 2009 10:18 am
par Mimichouette
Institut économique de Montréal est reconnu pour être un des grands think tanks de droite. Tout ce qui sort de la doit pas être pris comme des vérités c'est la pour conforter les idées de droite.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La voix du peuple américain)
Publié : dim. avr. 26, 2009 7:30 am
par .anthurium.
Mimichouette a écrit : Institut économique de Montréal est reconnu pour être un des grands think tanks de droite. Tout ce qui sort de la doit pas être pris comme des vérités c'est la pour conforter les idées de droite.
La droite est une façon de voir les choses tout comme la gauche et les deux se valent.
Le Québec a fait le tour de la gauche il est maintenant le temps de faire un tour a droite pour corriger les défaut de la gauche dans quelques années nous devrons aussi retourner vers la gauche pour corriger les défauts de la droite c'est ainsi que je le vois.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La voix du peuple américain)
Publié : ven. mai 01, 2009 9:41 pm
par .anthurium.
La politique de l'envie
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 30 avril 2009
La crise économique inquiète. Nous sommes tourmentés face à un avenir des plus incertains, et comme chaque fois que l'être humain est confronté à une situation qu'il ne comprend pas ou qu'il ne maîtrise pas, il cherche des boucs émissaires.
Au Moyen-âge, l'Europe était le théâtre de la «chasse aux sorcières». Aujourd'hui, sur fond d'insécurité économique et de lynchage médiatique, on a ouvert la «chasse aux patrons». Depuis plusieurs semaines, les salaires des hauts dirigeants sont étalés dans les journaux, et font l'objet des pires épithètes.
Personnellement, connaître les salaires des PDG ne m'intéresse pas, car en dépit de l'importance que les médias leur accordent, ils sont étrangers à la crise actuelle, et leur plafonnement ne réglera rien. Même si le PDG de mon supermarché préféré travaillait gratuitement, les prix des produits ne diminueraient pas d'un cent, et les caissières ne gagneraient pas davantage. Si le PDG de la Caisse de dépôt offrait ses services bénévolement, les rendements resteraient inchangés. Et même si tous les grands patrons l'imitaient, rien ne serait différent.
Si le fait que certains patrons sans scrupules emploient l'argent des plans de sauvetage pour verser de généreux bonis est effectivement condamnable, il reste que la rémunération de la quasi-totalité des dirigeants fait l'objet d'ententes privées entre deux parties consentantes. On trouverait inacceptable qu'une infirmière fixe le salaire d'un journaliste, ou qu'un architecte décide de la rémunération d'un animateur de radio. Alors pourquoi devrions-nous nous prononcer sur la paie des patrons, alors que la plupart d'entre nous n'avons pas la moindre idée du travail qu'ils effectuent ou des qualités qu'exige le poste qu'ils occupent? Et si on accepte qu'une tierce partie s'immisce dans une négociation privée à laquelle elle n'est pas conviée, où cela s'arrêtera-t-il?
Il est vrai qu'on peut se demander pourquoi les conseils d'administration acceptent de payer des salaires dans les sept ou huit chiffres. Selon le magazine Forbes, la rémunération moyenne des PDG des 500 plus grandes entreprises s'élève à 12,8 millions $. Pourtant, bien des gens accepteraient de travailler pour n'importe laquelle de ces entreprises moyennant à peine 10% de ce montant. Cela signifie-t-il qu'elles ont tort de ne pas les embaucher? Ou ont-elles simplement compris que la compétence a un prix, et qu'un dirigeant bon marché peut finir par coûter excessivement cher?
Cela dit, il existe certainement des patrons qui ne méritent pas leur paie. Mais cela n'est-il pas vrai pour tous les emplois? Ne rencontre-t-on pas des travailleurs incompétents partout? Alors pourquoi s'arrêter uniquement au cas des hauts dirigeants?
Certains répondront que c'est par souci de justice sociale et d'équité. Dans ce cas, pourquoi rester muet face à la rémunération des vedettes ou des sportifs, alors qu'ils empochent des sommes nettement plus importantes que les PDG? Par exemple, la célèbre Oprah Winfrey, dont la fortune personnelle s'élève à 1,5 milliard, a gagné 275 millions l'an dernier. J.K. Rowling a encaissé 300 millions en 2008 pour Harry Potter. Tiger Woods a touché 115 millions et Steven Spielberg, 130 millions. Or, non seulement personne ne remet en question la rémunération de ces vedettes, mais beaucoup de gens les adulent ouvertement.
On pourrait aussi se demander pourquoi personne ne s'intéresse à la rémunération des présidents des centrales syndicales. Ces chiffres permettraient pourtant de faire des comparaisons intéressantes!
Face à tant de paradoxes, il est logique de conclure que ce n'est pas tant la paie qui dérange, mais bien le statut de celui qui la touche. C'est tout simplement la «chasse aux patrons»!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 La politique de l'envie )
Publié : jeu. mai 07, 2009 9:15 am
par .anthurium.
Comment ne pas être pauvre
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 07 mai 2009
Vous voulez réagir à cet article? Vous voulez poser une question à son auteur?
La guerre à la pauvreté est une lutte perpétuelle. Parmi les armes auxquelles nous avons recours figurent le salaire minimum dont nous applaudissons chaque hausse, et une multitude de projets communautaires visant à faciliter la vie des démunis.
En 2002, Québec a même voté une loi contre la pauvreté et l’exclusion sociale, comme s’il suffisait d’un décret pour régler le problème!
Mais ni le fait d’augmenter la paie des travailleurs du bas de l’échelle ni les bonnes intentions des politiciens n’ont permis de vaincre la pauvreté. On attribue cet échec à un salaire minimum trop faible, à un État qui n’en fait pas suffisamment. On présente souvent la pauvreté comme une fatalité. Or, si le destin est quelquefois en cause, elle est généralement la conséquence de mauvaises décisions.
Personne ne choisit d’être pauvre, certes. Mais quotidiennement, certains prennent des décisions qui compromettent leur avenir et qui réduisent leurs chances de mobilité sociale. Pour réellement lutter contre la pauvreté, ce sont ces gestes qu’il faut dénoncer et condamner.
Décrocher des études est l’une des pires décisions. Sans diplôme d’études secondaires et sans formation professionnelle, c’est la pauvreté quasi assurée. Les statistiques sont éloquentes: moins on est instruit, plus notre salaire est faible, plus notre emploi est précaire, et plus le nombre et la durée des épisodes de chômage augmentent.
Pour ne pas être pauvre, il faut donc rester à l’école le plus longtemps possible ou décrocher un diplôme professionnel dans un domaine en demande.
Évidemment, on déploie énormément de ressources pour contrer le fléau du décrochage, mais rien n‘y fait. On incrimine l’école, les professeurs, la taille des classes, la forme des bulletins, la matière enseignée, l’excès ou le manque de discipline, l’intégration ou la non intégration des élèves en difficultés dans les classes régulières, etc. Mais, malgré le verbiage entourant le décrochage, on oublie que la valorisation de l’éducation est aussi, et surtout, la responsabilité des parents.
Le jeune qui grandit dans une famille dans laquelle l’instruction n’est pas valorisée est un décrocheur potentiel. Les parents qui ne s’intéressent pas aux résultats scolaires de leurs enfants, qui n’encouragent pas l’effort, et qui méprisent les professeurs, viennent annuler tous les efforts déployés pour lutter contre le décrochage.
Que la société encourage les jeunes à rester à l’école, c’est bien. Mais quand allons-nous donc demander aux parents d’assumer leur rôle et d’inculquer à leurs enfants l’importance de l’éducation? Ne sont-ils pas les mieux placés pour leur faire comprendre que le décrochage n’est pas une option?
L’instruction et la formation ne sont pas suffisantes pour assurer notre indépendance financière, il faut aussi travailler! Certains sont tellement sélectifs qu’ils traversent de longues périodes sans emploi. D’autres sont partisans de la loi du moindre effort. C’est une erreur, car (1) l’expérience est toujours monnayable, et (2) les employeurs sont continuellement à la recherche de personnel qualifié et motivé.
On imagine mille et une manières pour lutter contre la pauvreté sans jamais s’attaquer à la racine du problème. La Loi contre la pauvreté fait 20 pages de mots creux et de jargon bureaucratique, mes les termes décrochage et décrocheurs sont absents. Pourtant, le seul moyen de se sortir de la pauvreté est d’aller à l’école, de ne pas décrocher ou de raccrocher rapidement, de trouver un emploi, n’importe quel emploi, et de ne pas compter ses efforts.
C’est un message qu’on entend peu dans une société où le gros bon sens semble obsolète, mais c’est la réalité!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
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Re: Nathalie Elgrably (page 8 Comment ne pas être pauvre )
Publié : sam. mai 16, 2009 5:09 pm
par .anthurium.
Ça ne fait que commencer!
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 14 mai 2009
Depuis quelques semaines, on entend dire que l'économie montre les premiers signes de reprise. Pour preuve, on cite les sondages qui affirment que les consommateurs reprennent confiance, et la remontée des cours boursiers.
Peut-être les économies canadienne, européenne et asiatique résistent-elles mieux à la conjoncture, mais il est illusoire de penser que l'Amérique est tirée d'affaire parce que Wall Street se ressaisit. D'ailleurs, comment les indicateurs ne s'amélioreraient-ils pas au vu de l'injection astronomique de monnaie à laquelle a procédé la Réserve fédérale? Quand un déluge de dollars s'abat sur une économie, les achats augmentent fatalement, mais ce n'est pas parce qu'on dépense l'argent fraîchement imprimé par la Fed que l'économie prospère. Non seulement une partie importante de cet argent permet-elle d'acheter des produits importés, mais une hausse de la quantité d'argent en circulation sans augmentation proportionnelle de la production n'a qu'une seule et unique conséquence: l'inflation! Peut-être n'en ressentons-nous pas encore tous les effets, mais ce n'est qu'une question de temps.
Quant aux indices boursiers, il faut les mettre en perspective. Si l'injection de fonds et les dépenses gouvernementales étaient une panacée, l'économie américaine aurait dû effectuer un bond spectaculaire en regard des sommes stratosphériques dont il est question. Certes, le Dow Jones a augmenté de 30% depuis février, mais cette hausse apparaît modeste à côté de celle de plus de 50% des indices Hang Seng et Dax. Mais surtout, il faut prendre en considération la croissance soutenue du prix de l'or, et la dégringolade du dollar US, deux phénomènes qui reflètent des anticipations inflationnistes et une détérioration de l'économie américaine.
Dans ce contexte, la hausse du Dow Jones indique que les investisseurs prennent conscience que détenir des dollars américains est un bien mauvais placement, et tentent de protéger leurs avoirs en se débarrassant de leurs liquidités pour acheter des titres financiers. Ce qui semble être de la croissance n'est en réalité qu'une réaction des marchés pour se protéger des ravages de l'inflation attendue.
De plus, un événement passé inaperçu la semaine dernière est néanmoins annonciateur de turbulence économique. En effet, le gouvernement américain a procédé à la vente de bons du Trésor afin de financer le gigantesque déficit causé par ses plans de relance et de sauvetage. Or, peu d'acheteurs se sont présentés: en effet, qui voudrait à prêter son argent à un gouvernement techniquement en faillite qui imprime de l'argent de manière compulsive? Même la Chine, qui jusqu'ici a été le principal bailleur de fonds de Washington, a réduit considérablement ses achats de bons du trésor. Elle avait financé 75% du déficit américain au premier trimestre de 2008, mais à peine 2,7% un an plus tard!
Le hic, c'est que la difficulté à emprunter incite le gouvernement américain à augmenter le taux de rendement des bons du trésor, ce qui se traduira quelques mois plus tard par la hausse des taux d'intérêt, y compris des taux hypothécaires, avec les conséquences que cela implique. Ça le pousse également à imprimer de l'argent, ce qui ne fera qu'envenimer la situation.
Et vu les relations économiques que le Canada entretient avec l'Oncle Sam, nous risquons de subir les contrecoups de leurs politiques économiques extravagantes et irresponsables, à moins, évidemment, de consacrer les prochains mois à développer de nouveaux marchés.
Le pire serait dernière nous, nous dit-on. Je crains au contraire que nous n'ayons encore rien vu!
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
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Re: Nathalie Elgrably (page 8 Économie Américaine )
Publié : jeu. mai 28, 2009 8:25 am
par .anthurium.
Le mystère présidentiel
Le Journal de Montréal, p. 29 / Nathalie Elgrably-Lévy, 28 mai 2009
Barack Obama est adulé dans le monde entier. Chaque décision qu'il prend, chaque parole qu'il prononce, chaque geste qu'il pose, aussi anodin soit-il, est glorifié. On le vénère. On le déifie. On lui accorde une approbation inconditionnelle. Il fait preuve de bonne volonté, certes, mais qu'a-t-il donc accompli pour mériter une telle adoration? Et pourquoi les médias sont-ils si complaisants envers lui alors qu'ils étaient intransigeants avec ses prédécesseurs et ses adversaires?
Sur le front de l'économie, Obama a dépensé plus que quiconque dans l'histoire de l'humanité. Ses mesures coûteront trois fois plus que la Deuxième Guerre mondiale, et vingt quatre fois plus que le New Deal. En un an, il fera doubler la dette nationale accumulée au cours des 200 dernières années. Et en raison des engagements financiers qu'il a pris, cette dette doublera encore dans 10 ans. Serait-ce pour cet endettement historique et pour le colossal fardeau qu'il lègue aux générations futures que certains encensent le nouveau président?
Pour financer les dépenses stratosphériques de l'administration Obama, la Réserve fédérale fait fonctionner à plein régime sa planche à billets. En quelques mois, elle a imprimé tellement d'argent pour financer les choix politiques du président qu'elle a ranimé le spectre de l'inflation, voire celui de l'hyperinflation, avec la perspective d'un appauvrissement généralisé que cela entraine. Se pourrait-il que ce soit la politique monétaire ultra inflationniste de la Fed qui emballe les admirateurs de Barack Obama?
Le Président américain envisage également l'abolition des coupures d'impôts votées en 2001 et 2003, ce qui aura pour effet de décourager le travail, l'épargne, l'investissement et l'entrepreneurship. Or, une telle décision nuit à la compétitivité des industries américaines et compromet la relance.
Pour «sauver» l'économie, le Congrès a accepté de dépenser 787 milliards pour un plan de relance de 1000 pages qu'aucun membre n'a lues. Puis, par souci de «contenir» le déficit, Washington annonce une réduction des dépenses de l'ordre de 100 millions, soit l'équivalent de 0,003% du budget! Est-ce donc à ses coupures budgétaires dérisoires et à ses dépenses titanesques que le président doit sa popularité?
À moins que ce ne soit au fait qu'il ait outrepassé son droit constitutionnel en exigeant le renvoi du PDG de GM? Ou encore parce qu'il a choisi de lancer un vaste chantier de nationalisation en remettant au goût du jour de vieilles idées communistes qui ont fait banqueroute?
Sur le plan de la diplomatie et de la géopolitique, les initiatives du jeune président sont singulières. Il décide de restreindre les échanges commerciaux avec la Colombie, mais il souhaite les intensifier avec Cuba. Il revoie un buste de Churchill que Tony Blair avait offert à Bush et qui se trouvait dans le bureau ovale, mais il accepte le cadeau littéraire d'Hugo Chavez. Il se montre conciliant avec l'Iran qui poursuit ses essais nucléaires sans faire cas des demandes de Washington, mais monte le ton avec Israël, la seule démocratie au Moyen Orient et l'allié des États-Unis de longue date. Il ne s'incline pas devant la Reine d'Angleterre, ce que l'on peut concevoir, mais il gratifie le Roi d'Arabie Saoudite d'une génuflexion qui semble cacher un baisemain. Si un autre chef d'état se rendait coupable des mêmes paradoxes, bénéficierait-il de la même indulgence des médias et de la population?
Obama a subjugué la planète. Or, la nomenclature ci-dessus mérite-elle réellement autant d'admiration? Je repose donc la question: qu'a fait Obama de si exceptionnel pour justifier tant de louanges?
Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l'Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.
Re: Nathalie Elgrably (page 8 Le président Obama)
Publié : sam. mai 30, 2009 8:25 pm
par .anthurium.
Je met ce texte qui n'est pas de Mme Elgrably mais il va dans le même sens.
L’effondrement du dollar américain - 2
Le Blogue du QL Aujourd'hui, Le Québécois Libre
par Martin Masse
La monnaie de la république de bananes américaine a connu l'une de ses pires semaines depuis des mois.
Ça fait déjà des années que les économistes autrichiens prédisent son effondrement, compte tenu des politiques inflationnistes de la Fed sous la gouverne d'Alan Greenspan et de Ben Bernanke, et de la précarité de cette monnaie de papier depuis son découplage final avec l'or par le président Nixon en août 1971. J'ai écrit un billet là-dessus il y a un an et demi (L'effondrement du dollar américain).
Alors que la crise économique s'amplifiait l'automne dernier, le dollar a pourtant connu un regain de force, ce qui semblait contredire cette prédiction. Les marchés financiers, qui sont composés d'individus en chair et en os qui lisent les idioties keynésiano-monétaristes de la presse financière et n'ont une compréhension limitée de l'économie, avaient alors décidé de se réfugier dans cette «valeur sûre» que sont les obligations du Trésor américain. C'est leur réflexe de moutons chaque fois qu'on se retrouve en période d'incertitude à l'échelle mondiale depuis des décennies.
Cette fois cependant, le scénario ne se déroule pas de la même façon qu'à l'habitude. Depuis l'automne, le gouvernement américain et la Fed multiplient les plans de sauvetage et de relance en créant des quantités monstrueuses de faux crédit. Washington a à toutes fins pratiques nationalisé les secteurs de la finance et du prêt hypothécaire, et achève de nationaliser le secteur de l'automobile. Son déficit budgétaire atteint des niveaux inimaginables il y a à peine un an, alors qu'on se surprenait déjà des déficits gigantesques du gouvernement Bush.
La reprise par la Fed il y a deux semaines de son programme d'achats massifs (pour 300 milliards $) de bons du Trésor (ce qui signifie que la banque centrale crée de l'argent à partir de rien pour financer directement le déficit du gouvernement) a fait réfléchir les investisseurs, qui craignent de plus en plus que ces mesures ne mènent à une poussée inflationniste et à une dévaluation de la monnaie. Ce programme n'en est qu'un parmi les nombreuses interventions de la Fed, qui a acquis au cours des deux dernières années pour des centaines de milliards de dollars d'obligations hypothécaires et autres titres toxiques.
Les acheteurs traditionnels de la dette américaine, comme les Chinois, commencent donc sérieusement à avoir des sueurs froides et à chercher des portes de sortie, même s'ils poursuivent leurs achats pour éviter un effondrement trop rapide. La semaine dernière, c'est le régime de pension sud-coréen qui a annoncé qu'il prévoyait diminuer son portefeuille d'obligations américaines au cours des prochaines années.
D'autres part, une série de nouvelles laissant croire que des signes de relance se manifestent (il s'agit en fait pour la plupart de nouvelles montrant que la situation empire moins rapidement) a poussé des investisseurs à délaisser les obligations américaines pour acquérir des titres présumés plus risqués à l'étranger. C'est la bonne chose à faire, mais pour la mauvaise raison.
Tout cela fait donc en sorte que le dollar US a atteint son plus bas niveau des cinq derniers mois à l'égard des autres principales devises cette semaine. Le dollar canadien, qui se transigeait dans les 70 cents en mars, atteint maintenant les 90 cents. Malgré son déficit important (le ministre des Finances a annoncé cette semaine qu'il s'élèverait non pas à 34 mais à 50 milliards $), le Canada fait figure de havre de prudence comparé à l'orgie de dépenses et d'interventions qu'on observe au sud de la frontière.
Pourquoi devrait-on se préoccuper du niveau du dollar et de la demande pour des bons du trésor américain? Parce qu'ils sont des indicateurs clé de l'évolution de la crise et que ce qui arrive sur ce plan finira par avoir un impact considérable sur nos propres vies. Pour comprendre ce qui arrive et s'y préparer.
Le prix d'une obligation varie inversement avec l'intérêt qu'il rapporte. Ainsi, quand la demande diminue pour les obligations, leur valeur baisse, et le taux d'intérêt qu'elles portent augmente proportionnellement. Cette semaine, le rendement sur les obligations à échéance de 10 ans a ainsi grimpé jusqu'à 3,74%, ce qui dépasse le 3% qui prévalait en mars lorsque la Fed a annoncé son programme d'achat de bons du trésor et son intention d'acheter encore plus de titres hypothécaires. C'est encore peu, mais tout de même une indication que ce programme, qui a pour but de maintenir les taux d'intérêt très bas, ne semble pas très bien fonctionner. Pour éviter une hausse de taux, la Fed doit donc multiplier ses achats, c'est-à-dire injecter toujours plus de faux argent dans l'économie.
Lorsque les marchés décideront vraiment de laisser tomber les obligations américaines, on assistera à un enchaînement de phénomènes dont les répercussions sont incommensurables. Les grands investisseurs comme la Chine, le Japon et les pétromonarchies ne peuvent se permettre de laisser tomber le dollar, puisque la valeur de leurs avoirs en dollar s'effondrerait. Mais si plusieurs investisseurs plus modestes, mais suffisamment importants collectivement pour avoir un impact, finissent par totalement perdre confiance dans les politiques de la Fed et se mettent à vendre leurs obligations, on pourrait assister à un effet d'entraînement. Les gros seront alors dans une position intenable: vendre tout de suite pour limiter les dégâts, ce qui aura pour effet d'amplifier le mouvement de chute; ou attendre en espérant le contenir et peut-être tout perdre si les autres ne font pas de même.
Un tel mouvement entraînera un effondrement du dollar et une chute du prix des obligations - et conséquemment une hausse des taux d'intérêt de ces obligations. La Fed n'aura alors que deux choix:
1. Poursuivre sa politique inflationniste en achetant massivement des obligations pour soutenir leur valeur et maintenir les taux bas, ce qui entraînerait une hyperinflation et un effondrement encore plus accéléré du dollar, le largage de l'économie américaine par le reste du monde et une chute draconienne du niveau de vie des Américains; ou bien
2. Changer sa politique à 180 degrés en augmentant les taux d'intérêt suffisamment pour ramener les investisseurs, soutenir le dollar et contenir l'inflation, ce qui entraînerait l'échec des plans de relance des derniers mois, une accélération des faillites des propriétaires de maisons incapables de se refinancer à des taux trop élevés, une hausse accélérée du chômage, des coupures budgétaires gigantesques par un gouvernement incapable de financer sa dette, et une contraction subite et massive de l'économie américaine.
D'une côté, l'équivalent d'une fuite en avant et d'une faillite; de l'autre, l'équivalent d'une diminution draconienne de sa consommation pour rembourser ses dettes. Il n'y a pas d'autres façons d'échapper à un endettement massif. Dans le second cas cependant, si on arrêtait d'intervenir et d'empêcher l'économie de se rééquilibrer, on pourrait au moins préparer une reprise sur des bases plus solides après une période difficile.
La baisse des derniers jours annonce-t-elle la phase finale de l'effondrement du dollar? Il est toujours impossible de le dire mais nous en sommes certainement plus près qu'il y a un an et demi. L'analyse autrichienne se fonde sur des tendances inévitables à la lumière de la logique économique mais n'est pas une boule de cristal. Les économistes illettrés économiques conventionnels, qui n'ont rien vu venir et qui prévoit maintenant une reprise au cours des prochains mois parce qu'ils croient en l'efficacité des interventions du gouvernement et de la Fed, ne comprennent cependant rien à la logique économique et se trompent encore une fois. D'une façon ou d'une autre, la semaine prochaine ou dans un an, les Américains devront payer pour avoir prodigieusement vécu au-dessus de leurs moyens depuis des décennies et avoir bousillé les fondements de leur productivité par l'étatisation de leur économie.