Comité parlementaire
Julie Couillard refuse de témoigner
La Presse Canadienne Isabelle Rodrigue
16/06/2008 16h20 - Mise à jour 16/06/2008 18h26
Encore récemment, Julie Couillard recherchait la compagnie des ministres et députés fédéraux, mais ce temps semble bel et bien révolu. Lundi, par la voix de son avocat, celle par qui le scandale est arrivé a décliné l'invitation de témoigner devant le comité des Communes sur la sécurité publique.
Et tout porte à croire que, à cause du manque de temps puisque les Communes doivent ajourner leurs travaux d'ici vendredi pour la pause estivale, elle risque fort d'éviter de devoir se prêter à l'exercice, du moins d'ici l'automne.
Au terme d'une rencontre à huis clos, les députés ne sont pas parvenus à s'entendre sur la marche à suivre pour forcer Mme Couillard à comparaître dès cette semaine. Mardi, le comité entendra donc des fonctionnaires du Conseil privé, et mercredi ce sera le retour des officiers de la Gendarmerie royale du Canada.
«On a l'intention de la (Julie Couillard) faire venir, a soutenu le député du Bloc québécois, Serge Ménard. Comme elle refuse de venir volontairement, nous allons suivre les procédures qu'il faut pour la forcer à venir, de même que les autres témoins aussi, qui actuellement refusent de venir et pensent qu'ils ont des immunités.»
Outre Mme Couillard, l'ex ministre Maxime Bernier, le ministre de la Sécurité publique, Stockwell Day, et le premier ministre Stephen Harper ont refusé l'invitation du comité.
Lundi, l'avocat de Mme Couillard a fait parvenir une lettre au comité parlementaire de la sécurité publique dans laquelle il précise que sa cliente n'a pas l'intention de se présenter devant les députés.
Me Jean-Claude Hébert y fait valoir que non seulement le comité n'offrait pas assez de temps à sa cliente pour s'expliquer, mais qu'il serait injuste, en vertu du principe d'égalité devant la loi, de contraindre Mme Couillard à témoigner sans en faire de même pour M. Bernier, l'autre témoin clé de toute cette affaire.
Comme député, M. Bernier dispose d'une immunité parlementaire qui lui permet de refuser de témoigner devant un comité, ce qui «lui vaut un avantage stratégique important», écrit Me Hébert.
«Un traitement bancal par le comité des deux principaux témoins, M. Bernier et Mme Couillard, créerait une sérieuse entorse à l'exigence d'égalité de tous devant la loi», poursuit l'avocat, qui craint aussi les impacts négatifs que tout cela pourrait avoir sur un éventuel procès ou une enquête policière.
A la fin mai, M. Bernier a perdu son poste de ministre des Affaires étrangères après avoir laissé trainer des documents confidentiels du gouvernement au domicile de Mme Couillard, qui a fréquenté jusqu'à tout récemment des membres des motards criminels. Les députés craignent que Mme Couillard ait tenté d'infiltrer le gouvernement pour le compte du crime organisé.
Devant la réponse négative de Mme Couillard, le comité pourrait décider d'adopter une motion pour la forcer à témoigner en demandant à la Chambre des communes d'émettre une citation à comparaître. Or, les députés des partis d'opposition, qui forment la majorité au comité, ne s'entendent pas sur le contenu de cette motion.
«Pour le moment, on ne s'entend pas sur qui on devrait regrouper dans cette motion, a expliqué M. Ménard. Autrement dit, il n'y a pas que Mme Couillard qui refuse de venir. On s'est quitté en pensant qu'on pourrait peut-être voir si on peut regrouper» tous ceux qui ont refusé l'invitation.
En point de presse, lundi, le député libéral Ujjal Dosanjh a insisté pour dire que les libéraux refuseraient d'appuyer une motion ne visant que Mme Couillard. Les libéraux estiment qu'il faudrait forcer l'ancien ministre Bernier à témoigner, par mesure d'égalité.
«Pourquoi on forcerait un Canadien ordinaire à témoigner alors qu'on ne peut le faire pour les ministres? (...) Je veux lui envoyer une citation à comparaître autant que je souhaite le faire pour M. Bernier», a indiqué M. Dosanjh.
Mais le temps risque de manquer aux députés, qui retournent dans leurs circonscrïptions au plus tard vendredi. Quant à la possibilité que le comité siège pendant la pause estivale, c'est une option mais les députés n'ont pas encore adopté de motion en ce sens.
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