D'ognons et de nénufars
- Thewinneris
- Seigneur de la Causerie
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C'est épais de massacrer le français de cette façon. Le Québec va continué d'être la risée de la francophonie, ça c'est sûr!
Tout ça à cause des coupures dans l'éducation qui fait que les prof n'ont plus le temps d'apprendre correctement et en profondeur le français aux jeunes.
Même si je ne le maîtrise pas tellement le français, j'ai beaucoup d'admiration pour cette langue tel qu'elle est construite et je trouves que c'est innacceptable comme réforme (difforme )! --Message edité par Thewinneris le 2005-10-04 11:23:34--
Tout ça à cause des coupures dans l'éducation qui fait que les prof n'ont plus le temps d'apprendre correctement et en profondeur le français aux jeunes.
Même si je ne le maîtrise pas tellement le français, j'ai beaucoup d'admiration pour cette langue tel qu'elle est construite et je trouves que c'est innacceptable comme réforme (difforme )! --Message edité par Thewinneris le 2005-10-04 11:23:34--
Ché po si j'va m'adapter - tk j'va essayer
J'ai encore de la difficulté avec les pouces, pieds, milles, mètres, milimètres, etc..
j'ai appris avec l'ancien système, et dans ma tête, si quelqu'un me dit: j'ai fait 100 km - plus fort que moi - faut que je convertisse en milles
Je trouve cela tout à fait ridicule - qu'on leur apprenne donc aux jeunes à écrire correctement - ils ne seront pas plus malheureux que nous, qui avons appris à l'écrire.
J'ai encore de la difficulté avec les pouces, pieds, milles, mètres, milimètres, etc..
j'ai appris avec l'ancien système, et dans ma tête, si quelqu'un me dit: j'ai fait 100 km - plus fort que moi - faut que je convertisse en milles
Je trouve cela tout à fait ridicule - qu'on leur apprenne donc aux jeunes à écrire correctement - ils ne seront pas plus malheureux que nous, qui avons appris à l'écrire.
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mousseline
- Intronisé au Panthéon
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ah...c'est déprimant...nivellement par le bas encore! Ça me décourage...le mot réforme est à la veille d'être synonyme de déforme!
P.S. Pour les récréations...c'est par établissement, nous on a dû se battre pour le maintien des récréations au primaire il y a quelques années! ça finit par l'appui de certains professeurs...la hargne de d'autres!
P.S. Pour les récréations...c'est par établissement, nous on a dû se battre pour le maintien des récréations au primaire il y a quelques années! ça finit par l'appui de certains professeurs...la hargne de d'autres!
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- Blanche Neige
- Caïd de la Causette
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Soleil47 a écritChé po si j'va m'adapter - tk j'va essayer
J'ai encore de la difficulté avec les pouces, pieds, milles, mètres, milimètres, etc..
j'ai appris avec l'ancien système, et dans ma tête, si quelqu'un me dit: j'ai fait 100 km - plus fort que moi - faut que je convertisse en milles
Je trouve cela tout à fait ridicule - qu'on leur apprenne donc aux jeunes à écrire correctement - ils ne seront pas plus malheureux que nous, qui avons appris à l'écrire.
T'es pas la seule à convertir, quand je fait des recettes et qu'il faut 50 grammes de çi et 500 ml de ça, ça m'enrage. À la fin de mon primaire, quand le système a été changer, le prof nous disait que 2.5 cm = 1 pouce. Alors, j'chu encore loin du mètre et du kilomètre dans mon évolution métrique.
J'ai encore de la difficulté avec les pouces, pieds, milles, mètres, milimètres, etc..
j'ai appris avec l'ancien système, et dans ma tête, si quelqu'un me dit: j'ai fait 100 km - plus fort que moi - faut que je convertisse en milles
Je trouve cela tout à fait ridicule - qu'on leur apprenne donc aux jeunes à écrire correctement - ils ne seront pas plus malheureux que nous, qui avons appris à l'écrire.
T'es pas la seule à convertir, quand je fait des recettes et qu'il faut 50 grammes de çi et 500 ml de ça, ça m'enrage. À la fin de mon primaire, quand le système a été changer, le prof nous disait que 2.5 cm = 1 pouce. Alors, j'chu encore loin du mètre et du kilomètre dans mon évolution métrique.
Les vertus, la sagesse, le bonheur s'acquièrent par l'éducation. L'art de vivre s'apprend. Aristote.
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mousseline
- Intronisé au Panthéon
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Blanche Neige a écrit
T'es pas la seule à convertir, quand je fait des recettes et qu'il faut 50 grammes de çi et 500 ml de ça, ça m'enrage. À la fin de mon primaire, quand le système a été changer, le prof nous disait que 2.5 cm = 1 pouce. Alors, j'chu encore loin du mètre et du kilomètre dans mon évolution métrique.
Moi les longueurs ça va..mais les poids...poufff..l'enfer...Mais juste pour vous consoler un peu...ma fille étudie en architecture...là elle doit se taper l'exercice en l'envers...à trouve pas ça drôle!
T'es pas la seule à convertir, quand je fait des recettes et qu'il faut 50 grammes de çi et 500 ml de ça, ça m'enrage. À la fin de mon primaire, quand le système a été changer, le prof nous disait que 2.5 cm = 1 pouce. Alors, j'chu encore loin du mètre et du kilomètre dans mon évolution métrique.
Moi les longueurs ça va..mais les poids...poufff..l'enfer...Mais juste pour vous consoler un peu...ma fille étudie en architecture...là elle doit se taper l'exercice en l'envers...à trouve pas ça drôle!
https://pic.aceboard.net/img/5397/19958/1193531103.jpg
"[...] poëte a perdu sa poésie avec son tréma, phthisie son agressivité avec son deuxième h, soupirait-on en 1878."
Ça vient du livre "Connaitre et maitriser la nouvelle orthographe" que je me suis acheté.
Dans ce livre, on apprend que les modifications proposées touchent environ 2000 mots et quatre domaines: L'emploi du trait d'union et la soudure, le singulier et le pluriel, les accents et le tréma, quelques consonnes doubles.
La nouvelle orthographe est suggérée, mais pas obligatoire.
Il y a des changements intéressants, comme la règle des traits d'union lorsqu'on écrit des chiffres en lettres. Là, on ne se complique plus la vie, on met des traits d'union partout. J'aime bien.
Mais les deux mots cités dans l'article . Les modifications qui transforment trop les mots ne m'attirent pas.
Ça vient du livre "Connaitre et maitriser la nouvelle orthographe" que je me suis acheté.
Dans ce livre, on apprend que les modifications proposées touchent environ 2000 mots et quatre domaines: L'emploi du trait d'union et la soudure, le singulier et le pluriel, les accents et le tréma, quelques consonnes doubles.
La nouvelle orthographe est suggérée, mais pas obligatoire.
Il y a des changements intéressants, comme la règle des traits d'union lorsqu'on écrit des chiffres en lettres. Là, on ne se complique plus la vie, on met des traits d'union partout. J'aime bien.
Mais les deux mots cités dans l'article . Les modifications qui transforment trop les mots ne m'attirent pas.
[img]http://www.domainebleu.ca/images/sigdb.gif[/img]
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mousseline
- Intronisé au Panthéon
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jaskab a écrit"[...] poëte a perdu sa poésie avec son tréma, phthisie son agressivité avec son deuxième h, soupirait-on en 1878."
Ça vient du livre "Connaitre et maitriser la nouvelle orthographe" que je me suis acheté.
Dans ce livre, on apprend que les modifications proposées touchent environ 2000 mots et quatre domaines: L'emploi du trait d'union et la soudure, le singulier et le pluriel, les accents et le tréma, quelques consonnes doubles.
La nouvelle orthographe est suggérée, mais pas obligatoire.
Il y a des changements intéressants, comme la règle des traits d'union lorsqu'on écrit des chiffres en lettres. Là, on ne se complique plus la vie, on met des traits d'union partout. J'aime bien.
Mais les deux mots cités dans l'article . Les modifications qui transforment trop les mots ne m'attirent pas.
Le passage surligné me fait "tiquer" ...comment on peut laisser ça libre?? Comment on va faire tantôt pour départager le vrai du faux??
Ça vient du livre "Connaitre et maitriser la nouvelle orthographe" que je me suis acheté.
Dans ce livre, on apprend que les modifications proposées touchent environ 2000 mots et quatre domaines: L'emploi du trait d'union et la soudure, le singulier et le pluriel, les accents et le tréma, quelques consonnes doubles.
La nouvelle orthographe est suggérée, mais pas obligatoire.
Il y a des changements intéressants, comme la règle des traits d'union lorsqu'on écrit des chiffres en lettres. Là, on ne se complique plus la vie, on met des traits d'union partout. J'aime bien.
Mais les deux mots cités dans l'article . Les modifications qui transforment trop les mots ne m'attirent pas.
Le passage surligné me fait "tiquer" ...comment on peut laisser ça libre?? Comment on va faire tantôt pour départager le vrai du faux??
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Je vois ça comme une période transitoire. Par exemple, un enseignant pourrait enseigner la règle de l'écriture des chiffres en lettres tout en introduisant la nouvelle règle suggérée. (Selon le livre) Et si je garde l'exemple des chiffres, tu ne mets pas d'erreurs que l'élève suive l'ancienne ou la nouvelle règle. Là, je prends tout ça dans mon livre. Ce qui y est dit exactement, c'est que la nouvelle orthographe est officiellement recommandée, que l'ancienne est admise pour une période indéterminée.
Ce que je ne comprends pas, c'est que c'est officiellement recommandé, mais que les enseignants n'ont reçu aucune consigne à ce sujet. J'ai acheté ce livre par curiosité et en le lisant, je me disais que ça n'irait pas bien loin si les écoles ne sont pas mises au courant.
Au lieu de déblatérer sur ce que j'ai lu, pour ceux que ça intéresserait le lien vers le site de la nouvelle orthographe recommandée:
http://www.orthographe-recommandee.info/
Ce que je ne comprends pas, c'est que c'est officiellement recommandé, mais que les enseignants n'ont reçu aucune consigne à ce sujet. J'ai acheté ce livre par curiosité et en le lisant, je me disais que ça n'irait pas bien loin si les écoles ne sont pas mises au courant.
Au lieu de déblatérer sur ce que j'ai lu, pour ceux que ça intéresserait le lien vers le site de la nouvelle orthographe recommandée:
http://www.orthographe-recommandee.info/
[img]http://www.domainebleu.ca/images/sigdb.gif[/img]
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mousseline
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À propos de la réforme orthographique - Les doutes d'un éditeur
Giovanni Calabrese
Éditions Liber
Édition du mercredi 5 octobre 2005
Je voudrais rapidement commenter, dans ce qui suit, cette affaire d'orthographe rectifiée. Comme on sait, le Conseil supérieur de la langue française a proposé un ensemble de réformes orthographiques dans le but «d'unifier la graphie de certains mots, de supprimer certaines incohérences, de clarifier des situations confuses, afin de contribuer au renforcement, à l'illustration et au rayonnement de la langue française à travers le monde».
Pour mémoire, rappelons que le Conseil a été créé en 1989, que son rôle est de conseiller les pouvoirs publics en matière de langue et que la réforme actuelle résulte de propositions qu'il a élaborées dès le début des années 1990. Le temps de consulter et d'entériner, et voilà plus d'une dizaine d'années de passées.
L'entreprise a été cautionnée par l'Académie française et par d'autres organes francophones compétents, au Québec, le Conseil de la langue française. Des dictionnaires et des grammaires, des correcteurs informatiques, des publications et l'enseignement ont déjà intégré ces rectifications ou vont le faire progressivement. Dans le site Internet où on explique le projet et ses propositions, on se flatte qu'«un magazine édité par de grandes surfaces belges applique désormais la nouvelle orthographe», et le journal de l'Université de Montréal, Forum, a prévenu ses lecteurs qu'il avait pris, enthousiaste, «le train de l'orthographe "rectifiée"».
Il y aurait ainsi quelque 2000 mots touchés par l'opération. Cela vise, par exemple, les adjectifs numéraux composés, qui prendraient désormais des traits d'union partout (cent-un, trois-millièmes); les mots composés de forme «verbe plus nom» (coupe-gorge) ou «préposition plus nom» (sans-abri), dont la partie nominale s'accorderait toujours en nombre; ou encore l'accent circonflexe qui disparaîtrait sur certains mots (disparaitre, cout).
Mon commentaire sera fait du point de vue de l'éditeur. Ce point de vue en vaut-il un autre ? Peut-être. Dans une civilisation de l'écrit, je crois pourtant que le standard linguistique émerge de l'usage imprimé de la langue et que ce sont les décisions éditoriales qui, en cette matière, font la norme. Norme souple, évidemment, sans sanction et sans unanimité, mais norme quand même avec son noyau dur soutenu par la pratique et sa périphérie un peu plus malléable.
Les vestales
Avec d'autres, les éditeurs sont ceux que Cavanna appelle les vestales (Mignonne, allons voir si la rose, p. 205) : «Les véritables gardiens de la pureté de la langue, les vestales du bien écrire, ce ne sont pas les spécialistes de la décortication pontifiante, linguistes, grammairiens, enseignants, académiciens... Ce ne sont pas davantage les écrivains, à qui l'on ne demande que du talent -- du génie, pourquoi pas ? -- et des idées. Les vestales qui veillent sur la flamme sont les gens de l'imprimé : éditeurs, typographes, correcteurs.»
C'est dans la dialectique qui s'institue, à travers ces «vestales», au fil du temps, entre la tradition et l'innovation, les règles et la transgression des règles (orthographiques, syntaxiques, sémantiques, etc.) que la norme linguistique apparaît et se transforme.
Je ne sais pas si le Conseil supérieur de la langue française a consulté ces gens avant de s'engager dans un processus de rectification orthographique. Peut-être. Mais je n'en sens pas la présence ni la sensibilité, tout ouverte en général à la nuance commandée par les circonstances.
Il ne faut pas, avec la langue, procéder de manière mécanique, comme on a tendance à le faire avec la féminisation, particulièrement au Québec, en ajoutant bêtement un «e» à n'importe quel substantif masculin (professeure, acteure, commise et témoine). Pour dire le fond de ma pensée, je crois que tout ce projet de rectification orthographique est inutile, coûteux et mal mené.
L'effort
Je ne voudrais pas, pour étayer cette opinion, pinailler sur telle et telle nouvelle graphie en particulier. (Mais je n'oublie pas, cela dit, qu'on m'a déjà appris que l'accent circonflexe sur les mots «goût» et «coût» était là pour quelque chose, qu'on perdra de vue en le supprimant.) Je m'en tiendrai plutôt à quelques remarques générales et de principe, tout d'abord que la langue écrite doit s'apprendre -- hélas, avec efforts. La difficulté ne sera pas supprimée d'un coup de rectification, même la plus cartésienne; elle ne sera que déplacée.
Deuxièmement, dans le cas de la langue française, qui est celle qui nous occupe, si l'ambition est, je ne dis pas d'éliminer mais simplement de réduire les exceptions, les anomalies, les incohérences, alors la tâche -- et je ne m'en tiens qu'à l'orthographe -- est titanesque. À ceux qui en doutent, je suggère de consulter n'importe quel guide des difficultés de la langue -- auxquelles je pourrais ajouter mon propre témoignage de néo-francophone.
Les réformes qu'on propose aujourd'hui, nouvelles anomalies dans l'ancien désordre, me semblent donc contribuer à compliquer les choses plus qu'à gommer les aspérités.
Comment la langue évolue
Plus important peut-être est ceci. La langue se transforme, fond et forme, sur le terrain, au fur et à mesure qu'on parle, qu'on écrit et qu'on publie. Et selon que le sas des «vestales» est à petits ou à gros trous. Les instances de légitimation (conseils, offices et autres académies), qui tirent dans divers dictionnaires et grammaires le portrait de la langue de temps en temps et qui, ce faisant, fixent un moment de l'idiome et placent du même coup des bornes très utiles pour son histoire, ne sont pas des instances de législation. Leur rôle est de prendre acte, d'opiner du bonnet, de faire des remontrances, de rappeler à l'ordre, de suggérer des voies. Non de décréter.
C'est -- même si la manière est celle civile et bonhomme, publicitaire, en fait, de ceux qui ne veulent rien imposer -- pourtant vers cela que penchent ces recommandations. Ce qui exacerbe une attitude déjà rétive.
Pour ma part, en tout cas, et voilà quand même quelques années que je fréquente livres et manuscrits, il me semble que ce n'est pas comme ça que la langue évolue. Demandons-nous comment «cunnilinctus» est devenu «cunnilingus», comment «phantasme» est devenu «fantasme», comment «Colombie britannique» est devenue «Colombie-Britannique» (il y a des exemples équivalents sur les autres plans linguistiques).
Eh bien, par erreur, par souci de cohérence éditoriale, mais le plus souvent sans doute par simple insistance de l'usage cautionné par les instances de publication -- et non par les organes de l'État, qui arrivent plus tard dans l'histoire. Or, je n'ai jamais senti la même pression dans le cas de «boîte» ou de «corolle». Il se peut que je sois le seul à n'avoir rien remarqué. J'attends qu'on me renseigne.
Convaincre
Finalement, s'il est vrai que l'ambition est de «contribuer au renforcement, à l'illustration et au rayonnement de la langue française à travers le monde», il me semble que c'est plutôt mal engagé. Le Conseil et les autres instances de défense et de légitimation de la langue française feraient mieux, à cet égard, d'essayer de convaincre les scientifiques d'écrire en français, de renforcer la formation des maîtres et autres pédagogues, et d'intervenir peut-être plus souvent sur la place publique pour dénoncer les fautes, le laxisme ou les dérives de la langue. Entre-temps, l'opération aura coûté cher, en argent bien sûr, mais surtout en énergie.
En ce qui me concerne, je préférerais qu'on laisse vivre la langue de sa vie propre, avec ses lenteurs et ses ajustements progressifs, mais aussi avec ce que notre esprit autoritaire appelle, dans ses moments chagrins, ses incohérences.
Giovanni Calabrese
Éditions Liber
Édition du mercredi 5 octobre 2005
Je voudrais rapidement commenter, dans ce qui suit, cette affaire d'orthographe rectifiée. Comme on sait, le Conseil supérieur de la langue française a proposé un ensemble de réformes orthographiques dans le but «d'unifier la graphie de certains mots, de supprimer certaines incohérences, de clarifier des situations confuses, afin de contribuer au renforcement, à l'illustration et au rayonnement de la langue française à travers le monde».
Pour mémoire, rappelons que le Conseil a été créé en 1989, que son rôle est de conseiller les pouvoirs publics en matière de langue et que la réforme actuelle résulte de propositions qu'il a élaborées dès le début des années 1990. Le temps de consulter et d'entériner, et voilà plus d'une dizaine d'années de passées.
L'entreprise a été cautionnée par l'Académie française et par d'autres organes francophones compétents, au Québec, le Conseil de la langue française. Des dictionnaires et des grammaires, des correcteurs informatiques, des publications et l'enseignement ont déjà intégré ces rectifications ou vont le faire progressivement. Dans le site Internet où on explique le projet et ses propositions, on se flatte qu'«un magazine édité par de grandes surfaces belges applique désormais la nouvelle orthographe», et le journal de l'Université de Montréal, Forum, a prévenu ses lecteurs qu'il avait pris, enthousiaste, «le train de l'orthographe "rectifiée"».
Il y aurait ainsi quelque 2000 mots touchés par l'opération. Cela vise, par exemple, les adjectifs numéraux composés, qui prendraient désormais des traits d'union partout (cent-un, trois-millièmes); les mots composés de forme «verbe plus nom» (coupe-gorge) ou «préposition plus nom» (sans-abri), dont la partie nominale s'accorderait toujours en nombre; ou encore l'accent circonflexe qui disparaîtrait sur certains mots (disparaitre, cout).
Mon commentaire sera fait du point de vue de l'éditeur. Ce point de vue en vaut-il un autre ? Peut-être. Dans une civilisation de l'écrit, je crois pourtant que le standard linguistique émerge de l'usage imprimé de la langue et que ce sont les décisions éditoriales qui, en cette matière, font la norme. Norme souple, évidemment, sans sanction et sans unanimité, mais norme quand même avec son noyau dur soutenu par la pratique et sa périphérie un peu plus malléable.
Les vestales
Avec d'autres, les éditeurs sont ceux que Cavanna appelle les vestales (Mignonne, allons voir si la rose, p. 205) : «Les véritables gardiens de la pureté de la langue, les vestales du bien écrire, ce ne sont pas les spécialistes de la décortication pontifiante, linguistes, grammairiens, enseignants, académiciens... Ce ne sont pas davantage les écrivains, à qui l'on ne demande que du talent -- du génie, pourquoi pas ? -- et des idées. Les vestales qui veillent sur la flamme sont les gens de l'imprimé : éditeurs, typographes, correcteurs.»
C'est dans la dialectique qui s'institue, à travers ces «vestales», au fil du temps, entre la tradition et l'innovation, les règles et la transgression des règles (orthographiques, syntaxiques, sémantiques, etc.) que la norme linguistique apparaît et se transforme.
Je ne sais pas si le Conseil supérieur de la langue française a consulté ces gens avant de s'engager dans un processus de rectification orthographique. Peut-être. Mais je n'en sens pas la présence ni la sensibilité, tout ouverte en général à la nuance commandée par les circonstances.
Il ne faut pas, avec la langue, procéder de manière mécanique, comme on a tendance à le faire avec la féminisation, particulièrement au Québec, en ajoutant bêtement un «e» à n'importe quel substantif masculin (professeure, acteure, commise et témoine). Pour dire le fond de ma pensée, je crois que tout ce projet de rectification orthographique est inutile, coûteux et mal mené.
L'effort
Je ne voudrais pas, pour étayer cette opinion, pinailler sur telle et telle nouvelle graphie en particulier. (Mais je n'oublie pas, cela dit, qu'on m'a déjà appris que l'accent circonflexe sur les mots «goût» et «coût» était là pour quelque chose, qu'on perdra de vue en le supprimant.) Je m'en tiendrai plutôt à quelques remarques générales et de principe, tout d'abord que la langue écrite doit s'apprendre -- hélas, avec efforts. La difficulté ne sera pas supprimée d'un coup de rectification, même la plus cartésienne; elle ne sera que déplacée.
Deuxièmement, dans le cas de la langue française, qui est celle qui nous occupe, si l'ambition est, je ne dis pas d'éliminer mais simplement de réduire les exceptions, les anomalies, les incohérences, alors la tâche -- et je ne m'en tiens qu'à l'orthographe -- est titanesque. À ceux qui en doutent, je suggère de consulter n'importe quel guide des difficultés de la langue -- auxquelles je pourrais ajouter mon propre témoignage de néo-francophone.
Les réformes qu'on propose aujourd'hui, nouvelles anomalies dans l'ancien désordre, me semblent donc contribuer à compliquer les choses plus qu'à gommer les aspérités.
Comment la langue évolue
Plus important peut-être est ceci. La langue se transforme, fond et forme, sur le terrain, au fur et à mesure qu'on parle, qu'on écrit et qu'on publie. Et selon que le sas des «vestales» est à petits ou à gros trous. Les instances de légitimation (conseils, offices et autres académies), qui tirent dans divers dictionnaires et grammaires le portrait de la langue de temps en temps et qui, ce faisant, fixent un moment de l'idiome et placent du même coup des bornes très utiles pour son histoire, ne sont pas des instances de législation. Leur rôle est de prendre acte, d'opiner du bonnet, de faire des remontrances, de rappeler à l'ordre, de suggérer des voies. Non de décréter.
C'est -- même si la manière est celle civile et bonhomme, publicitaire, en fait, de ceux qui ne veulent rien imposer -- pourtant vers cela que penchent ces recommandations. Ce qui exacerbe une attitude déjà rétive.
Pour ma part, en tout cas, et voilà quand même quelques années que je fréquente livres et manuscrits, il me semble que ce n'est pas comme ça que la langue évolue. Demandons-nous comment «cunnilinctus» est devenu «cunnilingus», comment «phantasme» est devenu «fantasme», comment «Colombie britannique» est devenue «Colombie-Britannique» (il y a des exemples équivalents sur les autres plans linguistiques).
Eh bien, par erreur, par souci de cohérence éditoriale, mais le plus souvent sans doute par simple insistance de l'usage cautionné par les instances de publication -- et non par les organes de l'État, qui arrivent plus tard dans l'histoire. Or, je n'ai jamais senti la même pression dans le cas de «boîte» ou de «corolle». Il se peut que je sois le seul à n'avoir rien remarqué. J'attends qu'on me renseigne.
Convaincre
Finalement, s'il est vrai que l'ambition est de «contribuer au renforcement, à l'illustration et au rayonnement de la langue française à travers le monde», il me semble que c'est plutôt mal engagé. Le Conseil et les autres instances de défense et de légitimation de la langue française feraient mieux, à cet égard, d'essayer de convaincre les scientifiques d'écrire en français, de renforcer la formation des maîtres et autres pédagogues, et d'intervenir peut-être plus souvent sur la place publique pour dénoncer les fautes, le laxisme ou les dérives de la langue. Entre-temps, l'opération aura coûté cher, en argent bien sûr, mais surtout en énergie.
En ce qui me concerne, je préférerais qu'on laisse vivre la langue de sa vie propre, avec ses lenteurs et ses ajustements progressifs, mais aussi avec ce que notre esprit autoritaire appelle, dans ses moments chagrins, ses incohérences.