Publié : sam. mars 31, 2007 3:25 am
L'alliance «libéradéquiste»
Michel Hébert
Journal de Québec
31/03/2007 08h03
Il faudra attendre à la fin de mai pour savoir ce que Mario Dumont et ses adéquistes ont dans le ventre. Jean Charest se sera alors donné un nouveau gouvernement et aura déposé un budget révisé incluant, cette fois, des baisses d'impôt pour ceux qui en paient... Dans les officines libérales, on sourit déjà à l'idée de forcer le jeu si rapidement avec une minorité de députés à l'Assemblée nationale.
Mais personne ne semble avoir vraiment peur de l'ADQ, Jean Charest le premier. Non seulement le premier ministre n'a-t-il rien à craindre de ses troupes ou de Philippe Couillard, il se réjouit d'avance de la partie qu'il aura à jouer avec Mario Dumont. Il sait fort bien que le chef de l'ADQ doit montrer aux Québécois qu'il a de l'étoffe avant de prétendre au trône, et cela prendra un certain temps. Le temps d'une belle alliance «libéradéquiste»...
D'une certaine façon, Jean Charest a une occasion inattendue de donner suite à son programme électoral. Pas celui de 2007, mais celui de 2003... Le programme libéral qui prévoyait des baisses d'impôt et une réduction de la taille de l'État. M. Charest a d'autant plus de chances de tenir promesse que Mario Dumont est fondamentalement d'accord avec lui. Ils comprennent évidemment qu'il y a un lien direct entre le poids du fardeau fiscal et la taille «TTG» de la bureaucratie québécoise.
Il sera d'autant plus difficile pour M. Dumont de s'opposer à un allégement fiscal puisqu'il est destiné aux contribuables de la classe moyenne, ceux qui constituent la base électorale de l'ADQ. M. Charest leur a promis une réduction de 950 millions, soit 700 millions provenant du dernier budget fédéral et 250 millions prévus au budget québécois du 21 février dernier. Dire non à cela serait risqué pour l'avenir de l'ADQ dans les banlieues de Québec et dans le «450» autour de Montréal.
Le budget révisé devrait être déposé peu après la rentrée parlementaire du 8 mai, soit trois semaines après l'assermentation du nouveau cabinet prévue après Pâques. M. Charest voulait aller plus vite, mais autour de lui, on réclamait une pause; même les candidats vainqueurs voulaient quelques jours de repos. De toute façon, le Directeur général des élections ne fera connaître les résultats officiels de l'élection que mercredi prochain, tout juste avant le congé pascal. Le prochain gouvernement sera assermenté ensuite, soit autour du 17 avril. Les nouveaux ministres s'enfermeront avec leurs fonctionnaires durant deux semaines pour être fin prêts pour la rentrée. Après le budget, suivra l'incontournable étude des crédits budgétaires, un strip-tease toujours un peu gênant pour les gestionnaires du modèle québécois.
Cela devrait donner le temps aux libéraux et aux péquistes de comprendre les résultats de lundi. Les deux vieux partis soutiennent que les adéquistes ont eu la partie facile, une free ride des médias durant la campagne électorale. L'ADQ a pourtant été durement critiquée et, chose rare, Mario Dumont a destitué deux candidats à deux semaines du scrutin. L'ADQ a tout de même raflé 41 circonscrïptions, dont celles où les candidats avaient été remplacés. Comme celui de Stephen Harper, le message adéquiste a plu parce qu'il était simple: plus de privé en santé puisque plus de milliards, ça ne marche pas; des bulletins scolaires uniformément compréhensibles puisque les parents en réclament; des allocations aux familles puisque les garderies de l'État ne sont pas accessibles à tous... La vraie vie, quoi!
En somme, Mario Dumont a judicieusement recentré son programme pendant que Jean Charest se tassait à gauche vers le PQ et qu'André Boisclair tombait dans les bras d'Henri Massé et de Claudette Carbonneau. Résultat: les libéraux sont restés au pouvoir grâce aux anglos du West-Island et aux fédéralistes de l'Outaouais. Ça ne sème évidemment pas la bonne humeur. Mardi, Monique Jérôme-Forget a résumé l'état d'esprit de ses collègues en lançant aux journalistes: «Arrêtez de m'achaler!» Vivement Pâques et la résurrection...
Michel Hébert
Journal de Québec
31/03/2007 08h03
Il faudra attendre à la fin de mai pour savoir ce que Mario Dumont et ses adéquistes ont dans le ventre. Jean Charest se sera alors donné un nouveau gouvernement et aura déposé un budget révisé incluant, cette fois, des baisses d'impôt pour ceux qui en paient... Dans les officines libérales, on sourit déjà à l'idée de forcer le jeu si rapidement avec une minorité de députés à l'Assemblée nationale.
Mais personne ne semble avoir vraiment peur de l'ADQ, Jean Charest le premier. Non seulement le premier ministre n'a-t-il rien à craindre de ses troupes ou de Philippe Couillard, il se réjouit d'avance de la partie qu'il aura à jouer avec Mario Dumont. Il sait fort bien que le chef de l'ADQ doit montrer aux Québécois qu'il a de l'étoffe avant de prétendre au trône, et cela prendra un certain temps. Le temps d'une belle alliance «libéradéquiste»...
D'une certaine façon, Jean Charest a une occasion inattendue de donner suite à son programme électoral. Pas celui de 2007, mais celui de 2003... Le programme libéral qui prévoyait des baisses d'impôt et une réduction de la taille de l'État. M. Charest a d'autant plus de chances de tenir promesse que Mario Dumont est fondamentalement d'accord avec lui. Ils comprennent évidemment qu'il y a un lien direct entre le poids du fardeau fiscal et la taille «TTG» de la bureaucratie québécoise.
Il sera d'autant plus difficile pour M. Dumont de s'opposer à un allégement fiscal puisqu'il est destiné aux contribuables de la classe moyenne, ceux qui constituent la base électorale de l'ADQ. M. Charest leur a promis une réduction de 950 millions, soit 700 millions provenant du dernier budget fédéral et 250 millions prévus au budget québécois du 21 février dernier. Dire non à cela serait risqué pour l'avenir de l'ADQ dans les banlieues de Québec et dans le «450» autour de Montréal.
Le budget révisé devrait être déposé peu après la rentrée parlementaire du 8 mai, soit trois semaines après l'assermentation du nouveau cabinet prévue après Pâques. M. Charest voulait aller plus vite, mais autour de lui, on réclamait une pause; même les candidats vainqueurs voulaient quelques jours de repos. De toute façon, le Directeur général des élections ne fera connaître les résultats officiels de l'élection que mercredi prochain, tout juste avant le congé pascal. Le prochain gouvernement sera assermenté ensuite, soit autour du 17 avril. Les nouveaux ministres s'enfermeront avec leurs fonctionnaires durant deux semaines pour être fin prêts pour la rentrée. Après le budget, suivra l'incontournable étude des crédits budgétaires, un strip-tease toujours un peu gênant pour les gestionnaires du modèle québécois.
Cela devrait donner le temps aux libéraux et aux péquistes de comprendre les résultats de lundi. Les deux vieux partis soutiennent que les adéquistes ont eu la partie facile, une free ride des médias durant la campagne électorale. L'ADQ a pourtant été durement critiquée et, chose rare, Mario Dumont a destitué deux candidats à deux semaines du scrutin. L'ADQ a tout de même raflé 41 circonscrïptions, dont celles où les candidats avaient été remplacés. Comme celui de Stephen Harper, le message adéquiste a plu parce qu'il était simple: plus de privé en santé puisque plus de milliards, ça ne marche pas; des bulletins scolaires uniformément compréhensibles puisque les parents en réclament; des allocations aux familles puisque les garderies de l'État ne sont pas accessibles à tous... La vraie vie, quoi!
En somme, Mario Dumont a judicieusement recentré son programme pendant que Jean Charest se tassait à gauche vers le PQ et qu'André Boisclair tombait dans les bras d'Henri Massé et de Claudette Carbonneau. Résultat: les libéraux sont restés au pouvoir grâce aux anglos du West-Island et aux fédéralistes de l'Outaouais. Ça ne sème évidemment pas la bonne humeur. Mardi, Monique Jérôme-Forget a résumé l'état d'esprit de ses collègues en lançant aux journalistes: «Arrêtez de m'achaler!» Vivement Pâques et la résurrection...