Publié : mar. févr. 27, 2007 2:59 pm
Richard Martineau
Le mystère Québec
26/02/2007
Pour les 33 prochains jours, le chroniqueur du Journal de Montréal Richard Martineau parcourra les quatre coins du Québec à bord de l'autobus de campagne Québec 2007. Le commentateur politique Jean Lapierre et des journalistes de TVA, Canoë et du 98,5 FM accompagneront notre chroniqueur dans l'autobus.
La scène politique regorge de mystères.
Le mystère Boisclair - pourquoi autant de péquistes critiquent leur chef alors qu'ils l'ont élu? Le mystère Dion - pourquoi autant de libéraux fédéraux critiquent leur chef alors qu'ils l'ont élu?
Et le mystère Québec -- pourquoi Mario Dumont et son discours néo-conservateur sont si populaires à Québec, alors qu'ils se cassent les dents à Montréal?
Afin de résoudre cette énigme, qui laisse les résidants du Plateau pantois, je suis monté dans l'autobus du Journal en direction de la Vieille Capitale.
Le fossé
Joanne Marcotte et Denis Julien ont écrit, produit et réalisé le documentaire L'Illusion tranquille, qui est à la pensée néo-conservatrice québécoise ce que Fahrenheit 9/11 de Michael Moore est au mouvement anti-Bush.
Selon eux, c'est simple: si les résidants de Québec se montrent si sensibles au discours de Mario Dumont, c'est que l'État, pour eux, n'est pas une présence abstraite et théorique, mais une réalité qu'ils côtoient quotidiennement.
«Nous, le gaspillage, on l'a dans la face à longueur de jour, de dire Joanne Marcotte. Beaucoup de résidants de Québec travaillent dans la fonction publique. Les dépenses inutiles, le temps perdu, le manque de productivité, la gestion irresponsable des fonds publics, le copinage, les renvois d'ascenseurs, tout ça fait partie de leur paysage quotidien. Ils ne font pas seulement qu'en entendre vaguement parler: ils le voient! Veux, veux pas, vient un moment où ça te tombe sur le coeur...»
«Et à Québec, il existe une grande dichotomie entre les travailleurs du privé et ceux du secteur public, renchérit Denis Julien. Nous avons tous un beau-frère qui travaille pour l'État et qui a un fonds de pension confortable et d'excellentes conditions de travail, alors que dans le privé, tu rames comme un fou. Tu as de la misère à mettre de l'argent de côté pour tes REER alors que les privilégiés du système profitent de leur retraite dorée (qu'ils se sont payée à même tes taxes et tes impôts) pour faire de la marche rapide sur les Plaines et aller au cinéma l'après-midi. Tout ça finit par créer un sentiment de frustration et d'injustice...»
Une ville à deux têtes
David Desjardins, rédacteur en chef de l'hebdomadaire Voir Québec, abonde. «Québec est une ville schizophrène, explique-t-il. D'un côté, tu as les fonctionnaires qui se la coulent douce et qui nagent le vent dans le dos, et de l'autre, les travailleurs du privé qui tirent le diable par la queue. Ce fossé est inscrit dans la géographie même de la ville: il y a la Haute-Ville, pour les notables, et la Basse-Ville, pour le peuple...»
Pourtant, n'était-ce pas l'une des promesses de Charest, éliminer le gaspillage et gérer les fonds publics de façon responsable?
«Oui, mais il ne l'a pas fait, répond Denis Julien. Monsieur Charest aurait pu repenser le système au grand complet, mais il s'est contenté de le gérer. Beaucoup d'électeurs trouvent qu'il manque de courage et qu'il a dilapidé sa crédibilité en menant des combats inutiles, comme ceux du Suroît et du mont Orford...»
Bref, si les gens de Québec flirtent avec Mario, c'est qu'ils sont déçus de Jean Charest et qu'ils associent le PQ à un État obèse, lourd et coûteux.
Demain: le mystère Montréal.
» Toutes les chroniques de Richard Martineau
Le mystère Québec
26/02/2007
Pour les 33 prochains jours, le chroniqueur du Journal de Montréal Richard Martineau parcourra les quatre coins du Québec à bord de l'autobus de campagne Québec 2007. Le commentateur politique Jean Lapierre et des journalistes de TVA, Canoë et du 98,5 FM accompagneront notre chroniqueur dans l'autobus.
La scène politique regorge de mystères.
Le mystère Boisclair - pourquoi autant de péquistes critiquent leur chef alors qu'ils l'ont élu? Le mystère Dion - pourquoi autant de libéraux fédéraux critiquent leur chef alors qu'ils l'ont élu?
Et le mystère Québec -- pourquoi Mario Dumont et son discours néo-conservateur sont si populaires à Québec, alors qu'ils se cassent les dents à Montréal?
Afin de résoudre cette énigme, qui laisse les résidants du Plateau pantois, je suis monté dans l'autobus du Journal en direction de la Vieille Capitale.
Le fossé
Joanne Marcotte et Denis Julien ont écrit, produit et réalisé le documentaire L'Illusion tranquille, qui est à la pensée néo-conservatrice québécoise ce que Fahrenheit 9/11 de Michael Moore est au mouvement anti-Bush.
Selon eux, c'est simple: si les résidants de Québec se montrent si sensibles au discours de Mario Dumont, c'est que l'État, pour eux, n'est pas une présence abstraite et théorique, mais une réalité qu'ils côtoient quotidiennement.
«Nous, le gaspillage, on l'a dans la face à longueur de jour, de dire Joanne Marcotte. Beaucoup de résidants de Québec travaillent dans la fonction publique. Les dépenses inutiles, le temps perdu, le manque de productivité, la gestion irresponsable des fonds publics, le copinage, les renvois d'ascenseurs, tout ça fait partie de leur paysage quotidien. Ils ne font pas seulement qu'en entendre vaguement parler: ils le voient! Veux, veux pas, vient un moment où ça te tombe sur le coeur...»
«Et à Québec, il existe une grande dichotomie entre les travailleurs du privé et ceux du secteur public, renchérit Denis Julien. Nous avons tous un beau-frère qui travaille pour l'État et qui a un fonds de pension confortable et d'excellentes conditions de travail, alors que dans le privé, tu rames comme un fou. Tu as de la misère à mettre de l'argent de côté pour tes REER alors que les privilégiés du système profitent de leur retraite dorée (qu'ils se sont payée à même tes taxes et tes impôts) pour faire de la marche rapide sur les Plaines et aller au cinéma l'après-midi. Tout ça finit par créer un sentiment de frustration et d'injustice...»
Une ville à deux têtes
David Desjardins, rédacteur en chef de l'hebdomadaire Voir Québec, abonde. «Québec est une ville schizophrène, explique-t-il. D'un côté, tu as les fonctionnaires qui se la coulent douce et qui nagent le vent dans le dos, et de l'autre, les travailleurs du privé qui tirent le diable par la queue. Ce fossé est inscrit dans la géographie même de la ville: il y a la Haute-Ville, pour les notables, et la Basse-Ville, pour le peuple...»
Pourtant, n'était-ce pas l'une des promesses de Charest, éliminer le gaspillage et gérer les fonds publics de façon responsable?
«Oui, mais il ne l'a pas fait, répond Denis Julien. Monsieur Charest aurait pu repenser le système au grand complet, mais il s'est contenté de le gérer. Beaucoup d'électeurs trouvent qu'il manque de courage et qu'il a dilapidé sa crédibilité en menant des combats inutiles, comme ceux du Suroît et du mont Orford...»
Bref, si les gens de Québec flirtent avec Mario, c'est qu'ils sont déçus de Jean Charest et qu'ils associent le PQ à un État obèse, lourd et coûteux.
Demain: le mystère Montréal.
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