Publié : mar. févr. 13, 2007 6:13 am
Une éco-fiducie de 1,5 milliard
Hugo de Grandpré et Tristan Péloquin
La Presse
Sherbrooke
Un milliard et demi. Voilà la somme proposée par le gouvernement Harper pour aider les provinces à respecter les objectifs de Kyoto. C'est bien, reconnaissent les écolos, mais paradoxal. Québec, toutefois, se réjouit. La province recevra 350 millions, 22 millions de plus que ce que demandait le gouvernement Charest! Mais avant d'en voir la couleur, le prochain budget fédéral devra être adopté.
Nouvelle volte-face du gouvernement Harper dans le dossier de l'environnement. Après avoir refusé pendant un an de verser les 328 millions de dollars que demandait le Québec pour l'aider à atteindre les objectifs du protocole de Kyoto, le premier ministre canadien a annoncé lui-même, hier, qu'il dépasserait les attentes de la province en lui remettant 349,9 millions sur six ans.
Cette somme, qui fera partie d'une enveloppe nationale d'un milliard et demi de dollars baptisée Éco-Fiducie Canada, sera tirée du prochain budget fédéral. C'est donc dire que les partis de l'opposition devront appuyer l'exercice financier prévu pour mars prochain afin que Québec en voie la couleur.
Stephen Harper a de plus précisé que ces 349,9 millions représentent une portion de la somme promise pour régler le déséquilibre fiscal.
Québec s'est rallié à ces conditions. Il compte utiliser l'argent pour mener à bien son plan de lutte contre les changements climatiques. Adopté en juin dernier, ce plan prévoit la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 14 mégatonnes d'ici 2012, pour espérer atteindre les objectifs de Kyoto. Québec a déjà promis de verser 1,2 milliard sur six ans. Il demandait à Ottawa de fournir la somme manquante, soit 328 millions.
«La contribution fédérale d'aujourd'hui nous permet d'atteindre l'objectif, s'est réjoui le premier ministre Charest, hier. L'entente est souple et s'inscrit dans l'esprit d'un fédéralisme d'ouverture, que pratique M. Harper.»
L'argent sera remis au Québec sur la simple présentation de projets liés à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, a précisé pour sa part le ministre de l'Environnement, Claude Béchard. La formule diffère de la précédente, négociée avec Stéphane Dion et les libéraux de Paul Martin avant les dernières élections. M. Dion cherchait alors à réserver à Ottawa un droit de veto sur les projets financés, ce qui a déplu à la province.
«Il y avait une plus grande volonté de contrôle sur les projets à approuver et à signer par le gouvernement fédéral, a résumé M. Béchard. Aujourd'hui, nous avons de la flexibilité dans l'entente.»
Parmi les exemples cités lors de la conférence de presse, on retrouve une usine pilote de fabrication d'éthanol à partir de matières cellulosiques, la promotion de pompes géothermiques dans le secteur résidentiel et des programmes de développement de sources d'énergie renouvelable en région.
«Nous pourrons utiliser l'argent dans les deux ou trois prochaines années, il n'y aura pas nécessairement d'étalement sur les six prochaines années», a ajouté le ministre.
Longue lutte
Le transfert de ces millions de dollars a fait l'objet d'âpres négociations entre Québec et Ottawa depuis plusieurs années, et les relations ont parfois été tendues entre les deux ordres de gouvernement. En octobre, l'ancienne ministre de l'Environnement, Rona Ambrose, était allée jusqu'à qualifier le plan québécois d'«inquiétant».
Hier, le premier ministre Harper a expliqué ainsi ce changement de cap : «Notre position est que nous avons déjà donné des fonds avec des fiducies pour les transports en commun. Évidemment, c'est une différence d'avis entre le premier ministre Charest et moi, mais je pense que nous sommes unis aujourd'hui avec cette annonce et nous avons donné ce que le gouvernement du Québec cherche, et plus.» M. Harper faisait allusion aux montants réservés dans le dernier budget pour les remettre aux provinces dans le domaine des transports.
L'annonce, faite dans la circonscrïption même du premier ministre Jean Charest et en compagnie de plusieurs gros canons des deux formations politiques, tombe à point pour son gouvernement, à quelques jours du déclenchement d'élections. Le leader du Parti québécois, André Boisclair, en a d'ailleurs dénoncé le caractère improvisé et électoraliste.
«MM. Charest et Harper sont incapables de nous présenter quelque entente concrète signée entre les deux gouvernements et adoptée par les deux Conseils des ministres, comme cela se fait normalement en pareilles circonstances. Je mets au défi le premier ministre (Charest) de rendre publics les documents qui expliqueraient quelles sont les conditions qu'il a dû accepter pour faire l'annonce», a-t-il affirmé en conférence de presse.
«Je suis d'autant plus inquiet qu'aucun critère d'admissibilité des projets n'a été rendu public, a poursuivi M. Boisclair. On ne sait même pas si les efforts visant à réduire les émissions de GES dans le secteur des transports, qui représentent 37 % des émissions totales au Québec, seront admissibles.»
Par ailleurs, le ministre Béchard a indiqué qu'il ne comptait pas pour autant relâcher la pression sur Ottawa, maintenant qu'il a obtenu les sommes demandées. Des dossiers comme la mise en place d'une Bourse du carbone ou la question des cibles fixées par le fédéral, a-t-il précisé, feront l'objet de pourparlers avec le ministre fédéral de l'Environnement, John B
Hugo de Grandpré et Tristan Péloquin
La Presse
Sherbrooke
Un milliard et demi. Voilà la somme proposée par le gouvernement Harper pour aider les provinces à respecter les objectifs de Kyoto. C'est bien, reconnaissent les écolos, mais paradoxal. Québec, toutefois, se réjouit. La province recevra 350 millions, 22 millions de plus que ce que demandait le gouvernement Charest! Mais avant d'en voir la couleur, le prochain budget fédéral devra être adopté.
Nouvelle volte-face du gouvernement Harper dans le dossier de l'environnement. Après avoir refusé pendant un an de verser les 328 millions de dollars que demandait le Québec pour l'aider à atteindre les objectifs du protocole de Kyoto, le premier ministre canadien a annoncé lui-même, hier, qu'il dépasserait les attentes de la province en lui remettant 349,9 millions sur six ans.
Cette somme, qui fera partie d'une enveloppe nationale d'un milliard et demi de dollars baptisée Éco-Fiducie Canada, sera tirée du prochain budget fédéral. C'est donc dire que les partis de l'opposition devront appuyer l'exercice financier prévu pour mars prochain afin que Québec en voie la couleur.
Stephen Harper a de plus précisé que ces 349,9 millions représentent une portion de la somme promise pour régler le déséquilibre fiscal.
Québec s'est rallié à ces conditions. Il compte utiliser l'argent pour mener à bien son plan de lutte contre les changements climatiques. Adopté en juin dernier, ce plan prévoit la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) de 14 mégatonnes d'ici 2012, pour espérer atteindre les objectifs de Kyoto. Québec a déjà promis de verser 1,2 milliard sur six ans. Il demandait à Ottawa de fournir la somme manquante, soit 328 millions.
«La contribution fédérale d'aujourd'hui nous permet d'atteindre l'objectif, s'est réjoui le premier ministre Charest, hier. L'entente est souple et s'inscrit dans l'esprit d'un fédéralisme d'ouverture, que pratique M. Harper.»
L'argent sera remis au Québec sur la simple présentation de projets liés à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, a précisé pour sa part le ministre de l'Environnement, Claude Béchard. La formule diffère de la précédente, négociée avec Stéphane Dion et les libéraux de Paul Martin avant les dernières élections. M. Dion cherchait alors à réserver à Ottawa un droit de veto sur les projets financés, ce qui a déplu à la province.
«Il y avait une plus grande volonté de contrôle sur les projets à approuver et à signer par le gouvernement fédéral, a résumé M. Béchard. Aujourd'hui, nous avons de la flexibilité dans l'entente.»
Parmi les exemples cités lors de la conférence de presse, on retrouve une usine pilote de fabrication d'éthanol à partir de matières cellulosiques, la promotion de pompes géothermiques dans le secteur résidentiel et des programmes de développement de sources d'énergie renouvelable en région.
«Nous pourrons utiliser l'argent dans les deux ou trois prochaines années, il n'y aura pas nécessairement d'étalement sur les six prochaines années», a ajouté le ministre.
Longue lutte
Le transfert de ces millions de dollars a fait l'objet d'âpres négociations entre Québec et Ottawa depuis plusieurs années, et les relations ont parfois été tendues entre les deux ordres de gouvernement. En octobre, l'ancienne ministre de l'Environnement, Rona Ambrose, était allée jusqu'à qualifier le plan québécois d'«inquiétant».
Hier, le premier ministre Harper a expliqué ainsi ce changement de cap : «Notre position est que nous avons déjà donné des fonds avec des fiducies pour les transports en commun. Évidemment, c'est une différence d'avis entre le premier ministre Charest et moi, mais je pense que nous sommes unis aujourd'hui avec cette annonce et nous avons donné ce que le gouvernement du Québec cherche, et plus.» M. Harper faisait allusion aux montants réservés dans le dernier budget pour les remettre aux provinces dans le domaine des transports.
L'annonce, faite dans la circonscrïption même du premier ministre Jean Charest et en compagnie de plusieurs gros canons des deux formations politiques, tombe à point pour son gouvernement, à quelques jours du déclenchement d'élections. Le leader du Parti québécois, André Boisclair, en a d'ailleurs dénoncé le caractère improvisé et électoraliste.
«MM. Charest et Harper sont incapables de nous présenter quelque entente concrète signée entre les deux gouvernements et adoptée par les deux Conseils des ministres, comme cela se fait normalement en pareilles circonstances. Je mets au défi le premier ministre (Charest) de rendre publics les documents qui expliqueraient quelles sont les conditions qu'il a dû accepter pour faire l'annonce», a-t-il affirmé en conférence de presse.
«Je suis d'autant plus inquiet qu'aucun critère d'admissibilité des projets n'a été rendu public, a poursuivi M. Boisclair. On ne sait même pas si les efforts visant à réduire les émissions de GES dans le secteur des transports, qui représentent 37 % des émissions totales au Québec, seront admissibles.»
Par ailleurs, le ministre Béchard a indiqué qu'il ne comptait pas pour autant relâcher la pression sur Ottawa, maintenant qu'il a obtenu les sommes demandées. Des dossiers comme la mise en place d'une Bourse du carbone ou la question des cibles fixées par le fédéral, a-t-il précisé, feront l'objet de pourparlers avec le ministre fédéral de l'Environnement, John B