Publié : jeu. mai 18, 2006 3:44 am
Le Canada sait-il dans quoi il s'est embarqué ?
Gilles Toupin
La Presse
Ottawa
Halte-là! ont lancé au gouvernement Harper tous les partis de l'opposition hier soir aux Communes. On ne se s'agrippe pas à la galère afghane sans en connaître les tenants et les aboutissants.
Pour les libéraux, les néo-démocrates et les bloquistes, il n'y a pas le feu, et le premier ministre Harper se devait d'abord de donner le temps au comité permanent de la défense de la Chambre des communes d'étudier les conséquences d'une prolongation de deux ans de la mission canadienne en Afghanistan, dans un théâtre d'opération aussi dangereux que celui de Kandahar.
D'ailleurs, lors de sa réunion mardi dernier, le comité en question a reçu une motion du Bloc québécois destinée à étudier les divers aspects de la mission des troupes canadiennes en Afghanistan et d'en faire rapport rapidement à la Chambre. Le rapport, une fois entre les mains de tous les élus, aurait permis un vote éclairé et non précipité comme celui d'hier soir, a estimé le chef du Bloc, Gilles Duceppe.
Il s'agissait d'en savoir davantage sur «la durée de la mission, l'état des troupes et des équipements, le rapport entre le volet de la mission directement lié aux opérations de combat et celui qui vise à contribuer à la reconstruction du pays, ainsi que les critères d'évaluation qui permettront d'évaluer le succès de cette mission, le tout afin de déterminer s'il est possible de la mener à bien tout en assurant les autres obligations du Canada sur la scène internationale».
Ces questions, a fait remarquer Gilles Duceppe, sont justement les questions que posait l'actuel ministre de la Défense, Gordon O'Connor, alors qu'il siégeait en novembre dernier sur les banquettes de l'opposition officielle. «Pourquoi refuse-t-il d'y répondre aujourd'hui?» a demandé à maintes reprises hier le chef bloquiste.
En refusant d'accorder au comité le temps de faire cet examen en profondeur de la mission, le gouvernement demande «un chèque en blanc» à l'opposition, a affirmé Gilles Duceppe. Le débat d'hier soir n'était ni plus ni moins qu'«une manoeuvre électoraliste inacceptable afin de précipiter cette décision», a ajouté M. Duceppe.
Le chef de l'opposition officielle, Bill Graham, a rappelé justement au gouvernement hier que son parti «a appuyé fortement la mission canadienne en Afghanistan» et que c'était du devoir des parlementaires aujourd'hui de tenter «de comprendre la nature de la mission en Afghanistan», de tenter de savoir comment le Canada pourra remplir ses autres obligations internationales s'il met tous ses oeufs dans le panier afghan, de connaître enfin le coût financier d'une prolongation de la mission.
Or, a affirmé à La Presse hier la députée néo-démocrate Dawn Black, qui siège au comité de la Défense, «six heures de débat pour discuter de questions aussi importantes que la vie d'hommes et de femmes, aussi bien canadiens qu'afghans, c'est complètement inapproprié».
Du côté du Sénat, le doyen du Parlement, le sénateur Marcel Prud'homme, a insisté hier sur l'importance de prendre un certain recul sur une question comme celle-là.
«Je me souviens très bien, a-t-il dit à La Presse, comment nous avons commencé à aller à Chypre. J'étais président du comité des affaires étrangères et de la défense. Nous avons fini par rester là-bas des dizaines d'années. Je m'inquiète aujourd'hui du rôle que l'on veut nous faire jouer en Afghanistan. Je ne voudrais pas que se reproduise ce qui s'est produit aux Nations unies lorsque le Canada est devenu responsable de la question des réfugiés palestiniens. Personne ne voulait de cette responsabilité ; tout le monde a dit qu'il fallait que ce soit le Canada. Il n'y a peut-être pas grand-monde qui veut prendre la direction des troupes de l'OTAN en Afghanistan. Ce qui m'inquiète, c'est comment nous en sommes venus à cette solution-là. Est-ce que les autres refusent cette responsabilité ?»
Dawn Black rappelle de son côté que «les Américains, qui ont la force militaire la plus puissante au monde, sont dans le sud de l'Afghanistan depuis quatre ans à combattre l'insurrection et la situation n'a fait que s'aggraver sur le terrain».
«Alors pourquoi les Canadiens iraient s'enliser là ? demande-t-elle. Est-ce que c'est parce que personne d'autre ne veut y aller ? Il y a un débat en ce moment là-dessus. Les Anglais devaient être là avec nous. Les Néerlandais devaient être là avec nous. Ils n'y sont toujours pas.»
Le NPD estime ainsi que le Canada a un rôle à jouer en Afghanistan, mais qu'il devrait se limiter à la reconstruction. «Cette mission est mauvaise, insiste Mme Black à propos de la présence canadienne à Kandahar, et ne donne pas de résultats. Pourquoi faisons-nous cela ?»
Que pensez-vs de ça? Que fait le Canada en Afghanistan?
Gilles Toupin
La Presse
Ottawa
Halte-là! ont lancé au gouvernement Harper tous les partis de l'opposition hier soir aux Communes. On ne se s'agrippe pas à la galère afghane sans en connaître les tenants et les aboutissants.
Pour les libéraux, les néo-démocrates et les bloquistes, il n'y a pas le feu, et le premier ministre Harper se devait d'abord de donner le temps au comité permanent de la défense de la Chambre des communes d'étudier les conséquences d'une prolongation de deux ans de la mission canadienne en Afghanistan, dans un théâtre d'opération aussi dangereux que celui de Kandahar.
D'ailleurs, lors de sa réunion mardi dernier, le comité en question a reçu une motion du Bloc québécois destinée à étudier les divers aspects de la mission des troupes canadiennes en Afghanistan et d'en faire rapport rapidement à la Chambre. Le rapport, une fois entre les mains de tous les élus, aurait permis un vote éclairé et non précipité comme celui d'hier soir, a estimé le chef du Bloc, Gilles Duceppe.
Il s'agissait d'en savoir davantage sur «la durée de la mission, l'état des troupes et des équipements, le rapport entre le volet de la mission directement lié aux opérations de combat et celui qui vise à contribuer à la reconstruction du pays, ainsi que les critères d'évaluation qui permettront d'évaluer le succès de cette mission, le tout afin de déterminer s'il est possible de la mener à bien tout en assurant les autres obligations du Canada sur la scène internationale».
Ces questions, a fait remarquer Gilles Duceppe, sont justement les questions que posait l'actuel ministre de la Défense, Gordon O'Connor, alors qu'il siégeait en novembre dernier sur les banquettes de l'opposition officielle. «Pourquoi refuse-t-il d'y répondre aujourd'hui?» a demandé à maintes reprises hier le chef bloquiste.
En refusant d'accorder au comité le temps de faire cet examen en profondeur de la mission, le gouvernement demande «un chèque en blanc» à l'opposition, a affirmé Gilles Duceppe. Le débat d'hier soir n'était ni plus ni moins qu'«une manoeuvre électoraliste inacceptable afin de précipiter cette décision», a ajouté M. Duceppe.
Le chef de l'opposition officielle, Bill Graham, a rappelé justement au gouvernement hier que son parti «a appuyé fortement la mission canadienne en Afghanistan» et que c'était du devoir des parlementaires aujourd'hui de tenter «de comprendre la nature de la mission en Afghanistan», de tenter de savoir comment le Canada pourra remplir ses autres obligations internationales s'il met tous ses oeufs dans le panier afghan, de connaître enfin le coût financier d'une prolongation de la mission.
Or, a affirmé à La Presse hier la députée néo-démocrate Dawn Black, qui siège au comité de la Défense, «six heures de débat pour discuter de questions aussi importantes que la vie d'hommes et de femmes, aussi bien canadiens qu'afghans, c'est complètement inapproprié».
Du côté du Sénat, le doyen du Parlement, le sénateur Marcel Prud'homme, a insisté hier sur l'importance de prendre un certain recul sur une question comme celle-là.
«Je me souviens très bien, a-t-il dit à La Presse, comment nous avons commencé à aller à Chypre. J'étais président du comité des affaires étrangères et de la défense. Nous avons fini par rester là-bas des dizaines d'années. Je m'inquiète aujourd'hui du rôle que l'on veut nous faire jouer en Afghanistan. Je ne voudrais pas que se reproduise ce qui s'est produit aux Nations unies lorsque le Canada est devenu responsable de la question des réfugiés palestiniens. Personne ne voulait de cette responsabilité ; tout le monde a dit qu'il fallait que ce soit le Canada. Il n'y a peut-être pas grand-monde qui veut prendre la direction des troupes de l'OTAN en Afghanistan. Ce qui m'inquiète, c'est comment nous en sommes venus à cette solution-là. Est-ce que les autres refusent cette responsabilité ?»
Dawn Black rappelle de son côté que «les Américains, qui ont la force militaire la plus puissante au monde, sont dans le sud de l'Afghanistan depuis quatre ans à combattre l'insurrection et la situation n'a fait que s'aggraver sur le terrain».
«Alors pourquoi les Canadiens iraient s'enliser là ? demande-t-elle. Est-ce que c'est parce que personne d'autre ne veut y aller ? Il y a un débat en ce moment là-dessus. Les Anglais devaient être là avec nous. Les Néerlandais devaient être là avec nous. Ils n'y sont toujours pas.»
Le NPD estime ainsi que le Canada a un rôle à jouer en Afghanistan, mais qu'il devrait se limiter à la reconstruction. «Cette mission est mauvaise, insiste Mme Black à propos de la présence canadienne à Kandahar, et ne donne pas de résultats. Pourquoi faisons-nous cela ?»
Que pensez-vs de ça? Que fait le Canada en Afghanistan?