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Publié : sam. oct. 01, 2005 1:46 am
par Oliver
Dossier Cité des prairies
La cité des enfants perdus
Katia Gagnon
La Presse
Pendant cinq semaines, Katia Gagnon a partagé le quotidien des jeunes et des éducateurs de Cité des prairies, un centre d'hébergement réservé aux ados les plus amochés de notre société.
C'était le printemps. Il faisait beau, il faisait chaud et j'étais en voyage sur une autre planète. Une planète où de jeunes anges aux grands yeux bleus fantasment sur les corps d'autres enfants. Une planète où des garçons dévissent patiemment les pentures de leurs portes, récupérant les vis pour se taillader les veines.
Une planète où des agents baraqués doivent parfois se mettre à deux pour attacher sur un lit un enfant aux bras gros comme des allumettes. Sur cette planète, il arrive que les bébés hurlent seuls pendant des heures aux côtés d'une mère morte d'une overdose. Il arrive que les pères tentent de noyer leurs enfants, les grands-mères, de prostituer leur petit-fils.
J'ai vécu à Cité des prairies pendant cinq semaines. Cité, comme on l'appelle familièrement, c'est le bout de la ligne de la protection de l'enfance, le terminus. Là où se retrouvent les enfants dont plus personne ne veut. Horriblement battus, abusés par leurs parents, ils ont été retirés de leur foyer. Familles d'accueil, foyers de groupe, ils ont épuisé toute les ressources plus «légères» de la Direction de la protection de la jeunesse. Et se sont retrouvés à Cité, en «encadrement intensif». Une façon polie de décrire la vie derrière des portes verrouillées et de grandes clôtures, qui se déroule à une cadence quasi-militaire.
Cité, c'est une autre planète dont vous ne soupçonnez pas l'existence. Une planète de détresse, mais aussi de dévouement. De don de soi. D'éducateurs qui se défoncent pour transcender le cadre carcéral dans lequel ils doivent travailler. Un soir de canicule, ils improvisent un ciné-parc dans la cour, à grands renforts de rallonges pour la télé. Le vendredi, ils font des brownies avec leurs «ti-loups». Ils préparent pendant des mois un voyage de pêche, pour amener ces enfants du bitume, qui n'ont jamais vu une épinette de leur vie, taquiner la truite dans les brumes de l'aube. Ils passent des heures à peindre des feuilles au pochoir dans le local des «garçons» pour que ça ressemble, un tout petit peu, à une maison. Ils parlent avec eux, ils jouent avec eux, essayant patiemment de combler des précipices de douleur.
Car prendre soin de ces enfants qui n'ont jamais été aimés n'est pas chose facile. Si vous vous approchez trop de leur coeur, ils vous mordent parfois comme des chiens sauvages. Craignant d'être à nouveau trahis par l'adulte, ils préfèrent, de leur propre initiative, trancher ce nouveau lien. Il faut être un orfèvre délicat, un sculpteur minutieux, pour les faire cheminer vers un certain équilibre. Pour quelques moments de grâce, les déboires sont innombrables. La plupart de ces enfants tournent depuis des années dans les ressources de la DPJ : plus de la moitié ont été placés avant l'âge de cinq ans. Lorsque vous leur demandez d'où ils viennent, ils ne disent pas Montréal, ou Laval, mais récitent une liste interminable «d'unités» des centres jeunesse. Et aussi tordu que cela puisse paraître, certains finissent par prendre racine dans ce bunker rébarbatif qu'est Cité des prairies.
Allez, venez, c'est ici. Empruntez cette entrée discrète, au beau milieu d'un quartier résidentiel. C'est là, au cœur de ce bâtiment sévère serti dans un écrin de verdure, soigneusement limité par des clôtures de quatre mètres. Voici vos clés. Ici, toutes les portes sont verrouillées. Accrochez à votre chandail le bouton panique. Faites-y attention: si vous appuyez sur ce petit bouton rouge, trois agents débouleront à un train d'enfer dans les quinze prochaines secondes. Ici, on ne sait jamais ce qui peut arriver. Maintenant, vous êtes prêts. Saluons Colette, la réceptionniste. Déverrouillez la porte. Voilà, vous avez quitté la Terre.
Suivez-moi. Je vous emmène.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:48 am
par Oliver
Dossier Cité des Prairies
Bonjour l'horreur
Katia Gagnon
La Presse
Ma rencontre avec Julien a été l'un des plus grands chocs de mon passage à Cité des prairies. Assise sur un banc, je regardais les jeunes de toutes les unités participer aux Olympiades. Un jeune ange blond s'assoit à mes côtés. Boucles dorées, yeux de lacs des Rocheuses. Il fait beaucoup moins que ses quinze ans. Sourire irrésistible. Enthousiasme juvénile. Un charmeur.
Pourquoi diable était-il à Cité?
La réponse, que je suis allée chercher, m'a sonnée pendant quelques jours. Julien, le jeune garçon que toute maman voudrait ramener chez elle, est un prédateur sexuel. Qui aime les garçons. Très jeunes. À Cité, sous aucun prétexte, on ne doit le laisser être en contact avec de plus jeunes que lui. Il prend sa douche seul : c'est écrit en grosses lettres capitales dans le bureau des éducateurs. Je l'ai aperçu, quelques fois, qui lançait des regards d'invite explicite aux petits de Cité, ceux qui ont l'air de n'avoir que dix ou onze ans.
Tout petit, Julien a lui aussi rencontré un monsieur qui aimait les enfants. Second d'une famille de trois garçons, tous de pères différents, le dernier ami de maman a mis, tour à tour, les trois enfants dans son lit. Il a encouragé les relations sexuelles entre eux. Alors vous comprenez, dans la tête de Julien, c'est normal d'aimer les enfants. Il les aime, lui aussi. Il ne veut pas leur faire de mal : il les désire, c'est tout.
Julien vit, et vivra probablement toute sa vie, avec cette pulsion qui est aussi forte que celle d'un alcoolique pour un verre de gin. Il est l'exemple parfait de «l'agresseur séducteur», un gentil jeune homme qui deviendra probablement un charmant monsieur. Dont personne ne se méfiera. Croyez-moi sur parole.
Patrick, lui, est un artiste. Il peint, il compose des chansons. S'il avait eu une enfance normale, son talent l'aurait probablement mené loin. Mais voilà, Patrick n'est pas né dans une famille normale. Son père criminel a passé le plus clair de sa vie en prison. Pour sa mère, il était un animal en peluche, une poupée, dont il n'était pas vraiment nécessaire de s'occuper. Une chose qu'on pouvait utiliser à sa guise, comme, par exemple, lorsque les fins de mois devenaient dures. Alors, maman vendait les «services» de son petit garçon à des messieurs qui entraient, puis sortaient de son appartement. En laissant de l'argent sur la table.
Des années de ce régime ont creusé chez Patrick un puits sans fonds, un vide intérieur dont on peut se demander s'il se remplira jamais. Patrick est vivant, dans toute la sève de ses seize ans, mais dans ses yeux noirs, il n'y a plus rien. En fait, il n'y a plus rien depuis presque onze ans. Depuis que sa maman lui a joyeusement annoncé qu'elle avait acheté une nouvelle maison et qu'on allait, de ce pas, la visiter. La nouvelle maison était en réalité un foyer de groupe de la DPJ et maman, sa maman bien imparfaite, mais la seule qu'il avait, est partie pour toujours. Patrick s'est retrouvé, à cinq ans, tout seul dans une maison pleine d'éducateurs et d'autres enfants aussi poqués que lui.
«J'ai pleuré», raconte-t-il sobrement. Ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il pleure encore. Il ne verse plus de larmes, mais il se sabote lui-même. Arrivé à douze ans et demi à Cité des prairies, Patrick devrait en être parti depuis longtemps. Mais à chaque fois qu'un transfert était négocié vers un centre moins fermé, prélude à une vie plus normale, Patrick se sabordait immédiatement. Tentatives de suicide, fugues, vols. Il a avalé des piles, s'est tailladé les veines avec des vis. Tout ce que vous pouvez imaginer.
Car Patrick ne peut pas supporter de réussir, ni d'ailleurs de s'attacher à qui que ce soit. Trop dangereux : et si cette personne finissait, elle aussi, par l'abandonner? Patrick cherche donc, par tous les moyens, à éviter d'aimer. Et c'est probablement ce qu'il cherchera toute sa vie.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:49 am
par Oliver
Dossier Cité des prairies
La vie sur le plancher
Katia Gagnon
La Presse
Lorsque je l'ai rencontré pour la première fois, Jean-Simon m'a semblé être l'exemple du jeune réhabilité par son passage dans le réseau de la DPJ. Dans quelques mois, il prévoyait quitter Cité pour un appartement supervisé. Il m'a montré son trousseau, amoureusement acquis morceau par morceau au Dollarama. Dans sa petite chambre, c'était Noël en juin. J'ai été très émue. Deux semaines plus tard, Jean-Simon-le-bon-garçon a voulu défoncer le crâne d'un éducateur à coups de poings.
L'exemple de Jean-Simon est typique de la clientèle de Cité: en apparence les «garçons» sont généralement bien gentils. Mais en réalité, ces enfants sont l'équivalent, dans les services sociaux, des «grands brûlés» qu'on garde dans des chambres aseptisées des hôpitaux. Certains peuvent déraper en un clin d'oeil. C'est pour cela qu'ils se retrouvent sous le coup d'une mesure d'exception, «l'encadrement intensif».
Cité des prairies est une ancienne prison et ça paraît, le long de ses interminables couloirs verdâtres. Ils débouchent cependant sur des «unités», plus sympathiques, où vivent douze garçons. Car il n'y a que des garçons dans ce centre. D'autres, ailleurs à Montréal, sont exclusivement réservés aux filles.
Cent cinquante-quatre garçons, donc, tous mineurs. Un tiers d'entre eux sont de vrais délinquants, qu'on appelle les jeunes contrevenants. Meurtriers, violeurs, voleurs. Ils ont leurs quartiers bien à eux, même à la cafétéria. Ces jeunes criminels sont totalement isolés de la centaine de garçons en «protection», qui sont ici sous la tutelle de la DPJ. Ce sont d'eux dont nous parlerons maintenant.
Les unités, milieux de vie de ces jeunes de 12 à 17 ans, c'est «le plancher» dans le langage des éducateurs. Un salon équipé d'une télé, une cuisine, une grande table où les jeunes prennent leur petit déjeuner en bougonnant. Un poste, au milieu, est le refuge des éducateurs. Tout au long d'un petit corridor, ou en haut d'une mezzanine, les chambres des jeunes. Minuscules. Étouffantes dans la moiteur de l'été. Un lit, une chaise, parfois une étagère. Évidemment, les chambres sont verrouillées. Comme absolument tout à Cité des prairies.
Dans chaque unité, une porte s'ouvre sur l'extérieur. En apparence, on peut évoluer assez librement dans ces grandes cours où on retrouve des terrains de basket, une patinoire. Certains cultivent un potager, d'autres des rosiers. Mais le regard est rapidement limité, au loin, par ces hautes clôtures de quatre mètres. Ne sort pas qui veut d'ici.
Et on ne fait pas non plus ce qu'on veut ici. La vie sur le plancher est un ballet complexe et subtil, où chaque regard, chaque geste est scruté par les éducateurs. La salle de bains est le lieu le plus délicat : c'est l'unique endroit où les jeunes sont seuls. «C'est la place des règlements de compte», lance Patrice Fombelle, éducateur. Passages de drogue. Avances sexuelles. C'est pourquoi les jeunes y sont tenus au silence.
À mon arrivée, Jean-Simon m'avait avertie : «on n'est pas à La Ronde ici». C'est le moins qu'on puisse dire. L'horaire est strict, la discipline, militaire. Même les pauses-cigarettes sont établies et minutées. Lever : 7h30. Dix minutes pour s'habiller et se donner un coup de peigne. Tout le monde se retrouve pour le déjeuner. Qu'est-ce qu'on mange? C'est écrit sur le frigo. «Un verre de lait ou de jus. Quatre rôties ou deux bols de céréales». Après, c'est l'heure des pilules de toutes les couleurs, bien rangées dans des dosettes au nom des jeunes. La majorité d'entre eux sont médicamentés, et certains pas qu'un peu : hyperactivité, dépression, psychoses, schizophrénie.
Ensuite, certains jeunes vont à l'école, d'autres sont en formation dans divers ateliers. Le soir venu, pas question de s'écraser devant la télé : chaque soirée a son programme.
Depuis quelques années, cependant, ce cadre de vie rigide s'est assoupli sous l'impulsion d'éducateurs dynamiques. À force d'entêtement, ils ont permis aux jeunes de faire des activités autrefois inimaginables. Lors de mon séjour, l'éducateur Michel Brière avait passé plusieurs semaines à organiser une grande olympiade. Un événement inédit. Pendant un avant-midi, les jeunes se sont défoncés. Le soleil était radieux, les sourires, éclatants. Aucun incident malheureux n'est survenu : on se serait cru dans la cour de n'importe quelle polyvalente de Montréal.
Quelques jours plus tard, une sortie à Arbraska, un parcours d'hébertisme suspendu à des arbres, avait été organisée par le même éducateur. Jordi Dufour, intervenant à Cité depuis douze ans, n'avait jamais vu ça. «Avant, ce type de sorties ne se faisait pas», raconte-t-il. «Les gars ne sont plus les mêmes dans un contexte comme celui-ci». Et comment. Je me souviendrai toujours de William, 14 ans, «placé» depuis l'âge de neuf mois, qui traînait son mal de vivre sous de grands pantalons et d'immenses chemises. À Cité des prairies, rien ne semblait l'intéresser, hormis la prochaine pause-cigarette. Le même garçon, suspendu avec un harnais dans les arbres, s'est métamorphosé. «Eh, la journaliste! Regarde-moi!». Vêtu de son improbable accoutrement, il bondissait de branche en branche. Juché dans un arbre à cinq mètres du sol, ce fugueur invétéré avait enfin retrouvé un semblant de liberté.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:50 am
par Oliver
Dossier Cité des prairies
Âge : 18 ans. Autonomie : 0
Katia Gagnon
La Presse
C'est une version tragique de la dernière image de tous les albums de Lucky Luke. I'm a poor lonesome cowboy, mais sans cheval, sans soleil couchant. L'enfant pousse son chariot chargé de boîtes de carton et de sacs-poubelles le long d'un interminable couloir vert pâle. Dans son téléroman personnel, c'est un départ. Un autre. Il part de Cité des prairies pour vivre dans un autre centre de la DPJ. Mais c'est souvent pour mieux revenir à Cité, six mois ou un an plus tard.
À l'image de ce garçon, dont l'image a été saisie sur vidéo, plusieurs jeunes de Cité des prairies sont des enfants-témoin, que se passent et se repassent les services sociaux dans une interminable course à relais. Vincent se souvient de ce petit garçon qui vivait avec lui dans un foyer de groupe, il y a maintenant près d'une décennie. L'enfant le faisait rire en lançant ses smarties en l'air pour mieux les manger. «Dix ans plus tard, je l'ai revu à Cité. Je l'ai reconnu tout de suite : il lançait encore ses smarties en l'air», raconte-t-il.
Le résultat de cette triste course, c'est que certains d'entre eux atteindront leurs 18 ans avec une autonomie degré zéro. Ils n'auront jamais commandé leur repas au restaurant, n'auront jamais pris de rendez-vous chez le médecin. Leurs cas soulèvent une question centrale : la réhabilitation, est-ce que ça marche? Et l'encadrement intensif donne-t-il des résultats?
Impossible de dire combien de jeunes réussissent, après un séjour à Cité, à passer à des ressources plus «légères», empruntant ainsi le chemin d'une vie plus normale. Ce qui est certain, c'est que plusieurs échouent. «En protection sociale, c'est quoi, une réussite?», rétorque le psychologue Gilles Richelieu. «Pour certains jeunes, le seul objectif qu'on a, c'est de les garder en vie jusqu'à 18 ans».
Pour lui, l'encadrement intensif est le seul environnement qu'on peut offrir à ces enfants. «Envoyer des enfants comme ceux qu'on a ici en famille d'accueil, c'est comme envoyer un cas de crise cardiaque en gynécologie», dit-il. «Leurs parents n'ont donné aucun cadre à ces enfants. Ils sont totalement déstructurés. Il faut leur enseigner les rudiments de base de la vie. Mange sainement. Va te laver. Ils n'ont aucun contrôle interne. Les murs contribuent à leur en donner un».
Mais souvent, ça ne fonctionne pas. «Le risque, c'est de produire des enfants tenus exclusivement par le contenant. On les change de contenant et c'est comme du jello. Ils s'effondrent», souligne un éducateur. D'autant plus que les intervenants n'ont pas toujours les moyens de leurs ambitions. «Depuis le déficit zéro, la descente a été constante : on commence tout juste à remonter la pente. On s'est longtemps contenté d'éteindre des feux», dit le psycho-éducateur Pierre Perreault.
Il faut dire que la réhabilitation est parfois compliquée par la présence des proches. C'est probablement l'élément le plus surprenant du système de protection sociale : ces enfants battus, agressés, entretiennent encore souvent des relations avec leurs familles. Ils vont parfois chez eux le week-end, pendant les vacances. Le résultat, c'est que lorsque certains atteignent 18 ans ils retournent souvent… chez leurs parents. Qui, eux-mêmes, ont parfois été «placés» toute leur enfance par la DPJ.
Et la triste boucle de la protection sociale est bouclée.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:51 am
par Oliver
Dossier Cité des prairies
Des enfants-rois sous haute surveillance
Katia Gagnon
La Presse
En arrivant à Cité des prairies, ils ont le choc de leur vie. Contrairement à la majorité de la clientèle du centre, ils ne proviennent pas de familles dysfonctionnelles. Ils sont juste au beau milieu d'une grosse, d'une très grosse crise d'adolescence.
«En arrivant ici, j'ai été traumatisé», raconte Jean-Carl, un grand gaillard de 16 ans. Jean-Carl vient d'une famille tout à fait ordinaire, mais depuis deux ans, il avait de gros problèmes de drogues. Dopé, il lui arrivait d'être violent. Ses parents l'ont signalé eux-mêmes à la DPJ. Et Jean-Carl, parce qu'il était considéré dangereux, a été placé pour quelques mois à Cité des prairies.
Plusieurs garçons de Cité sont dans la même situation. Certains d'entre eux sont des enfants-rois, à qui papa et maman n'ont jamais rien refusé. Les parents se réveillent, quinze ans plus tard, et ont devant eux un grand gars qui porte des running shoes énormes. Qui prend de la drogue, commet de petits délits. Et se moque de leurs directives et de leurs conséquences. Papa et maman se sentent complètement dépassés. Et appellent la DPJ.
En se retrouvant dans un cadre aussi strict que celui de Cité, deux réactions possibles : le choc, réel, que décrit Jean-Carl, et qui amène souvent au changement. «Je ne veux plus jamais revenir ici», dit-il. D'autres sont plus calculateurs : sous la contrainte de Cité, leur comportement est exemplaire, mais une fois de retour chez eux, le cercle infernal des problèmes de comportement recommence. Le jeune vient alors d'embarquer dans le grand train de la protection sociale, à bord duquel certains cheminent pendant de longues années.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:52 am
par Oliver
Dossier Cité des prairies
Des missionnaires qui retroussent leurs manches
Katia Gagnon
La Presse
Autour de la table, la tension est palpable. La chef de service de l'unité la Terrasse, Christine Larose, vient d'annoncer à son équipe l'arrivée prochaine d'un cas lourd. Très lourd. Un jeune qui, après un bref passage à Cité, a dû être interné en psychiatrie parce qu'il était incontrôlable. Six pieds, gueule de vedette de cinéma, il est agressif, impulsif, et ingurgite pas moins de 28 pilules par jour. À l'hôpital, il a démoli à lui seul un mur jugé indestructible. «Avez-vous peur?», que je demande. La réponse de Stéphanie, 26 ans, toute menue, vient vite. «Oui. J'ai peur».
Les propos d'Alain, son collègue, qui connaît bien le jeune, n'ont rien pour la rassurer. «Il ne s'en prend pas aux gens, mais aux objets. Laissez-faire le matériel. S'il pogne la télé, ne vous mettez pas entre la télé et le mur», dit-il. Pendant quelques semaines, l'équipe se préparera à l'arrivée de ce nouveau pensionnaire. Méchant défi.
Bien sûr, tous les cas ne sont pas aussi spectaculaires. Mais les éducateurs de Cité des prairies sont confrontés, quotidiennement, à des jeunes qui traînent avec eux de volumineux dossiers qui font mal à lire. Leur travail? Rajuster le tir de ces enfances gâchées.
Sylvain Goulet est l'image même du bon éducateur. En d'autres temps, il serait probablement devenu missionnaire et aurait relevé les manches de sa soutane pour aider les populations locales. Dans notre monde, il travaille d'arrache-pied avec les «petits» de Cité, la seule unité d'encadrement intensif pour les 12-14 ans de tout le grand Montréal. Traduction : Sylvain et ses collègues sont les pères et les mères des douze préados les plus poqués de la ville. «Leur enfance, c'est Beyrouth», résume-t-il.
Ces garçons ont des visages d'enfant. Ce sont des enfants. Ils chassent la couleuvre dans la grande cour. Ils se fabriquent des piscines avec une vieille toile et un invraisemblable bric-à-brac. Et Sylvain, Alain, Serge, Carole et les autres font du vélo avec eux. Cultivent des tomates. Jouent au soccer. Et tentent de leur réapprendre à vivre. «Il faut leur montrer que ce ne sont pas tous les adultes qui sont méchants. Quoi qu'ils fassent, nous, on reste les mêmes», explique Carole Lemay.
Mais l'intérieur de ces jeunes mal aimés est un immense champ en jachère. Arracher les mauvaises herbes pour y replanter des fleurs est un vrai travail de moine. «C'est une sculpture de glaise effacée chaque jour par la pluie. Elle s'efface, mais il en reste tout de même quelque chose. Le jour suivant, on recommence», illustre Jordi Dufour, un éducateur de 38 ans qui a monté de toutes pièces un projet de peinture.
Cette initiative est d'ailleurs un exemple d'intervention auprès de cette clientèle difficile. En donnant le dernier coup de pinceau, certains peintres amateurs ont réussi, pour la première fois, à terminer quelque chose. D'autres se sont découverts une réelle vocation. Une des toiles de Jean-Marc, 17 ans, orne le bureau du directeur des Centres jeunesse de Montréal.
Nicolas Guibord, un autre éducateur, est, en quelque sorte, le Clément Mathieu de Cité des prairies. Mais oui, souvenez-vous, ce super-prof du film Les Choristes. Le son est plus moderne, mais l'intention est semblable : il a formé, avec les jeunes, un groupe de rap-reggae. Après avoir été applaudi à tout rompre au cégep Marie-Victorin, José, 16 ans, a arrêté de s'automutiler.
«Une partie de ce métier-là, c'est l'art de l'instinct. Ça prend une âme d'artiste, une part de fantaisie, de folie», dit Sylvain Goulet. Dans le quotidien, tous les moyens sont bons pour «intervenir» sur les garçons. Une simple partie de Monopoly, un match de hockey, peuvent devenir un exercice pédagogique.
Sylvain Goulet tourne et monte un petit journal télévisé sur les activités de son unité. À l'aide de cette activité en apparence anodine, il a réussi à sortir un jeune d'une dépression chronique. «Il avait une vocation de brocanteur et aimait faire des petits montages», explique Sylvain. Il est devenu Monsieur Bricole et fabriquait à la caméra sa trouvaille de la semaine. Tellement fier de lui qu'il s'est fabriqué une carte d'affaires et, à sa sortie, s'est déniché un boulot dans une imprimerie.
Mais être éducateur, ça prend aussi des nerfs d'acier. Geneviève Payette, 31 ans, appréhende maintenant les dossiers «à point rouge», ceux des jeunes à tendance suicidaire. C'est qu'il y a quelques années, elle s'est occupée de Kevin. «Ce jeune-là, c'était mon petit frère». Un soir d'automne, un hurlement retentit dans sa chambre. «Je savais qu'il était en train de se tuer». Kevin s'était tailladé les veines avec une canette de Coke coupée en deux. Le jeune a survécu. Après quelques jours et plusieurs rencontres avec un psychologue, Geneviève s'est sentie la force de rencontrer Kevin. «Il est venu en t-shirt. Ses bras étaient scratchés, partout. Je lui ai demandé de les mettre sous la table. Je n'étais pas capable de voir ça».
C'est le danger qui guette les bons éducateurs. Trop s'attacher. Car souvent, ces enfants qui ont vécu l'abandon redoutent plus que tout de tisser de nouveaux liens. Prenez Carole Lemay, qui a le parfait physique de la maman. Elle mitonne des gâteaux avec les garçons, leur décore des citrouilles à l'Halloween. «Une fois, avec un jeune, je n'ai pas créé assez de distance. Il a fini par me frapper. J'ai reçu son poing sur le bras mais si je ne m'étais pas tassée, il me décrochait la mâchoire».
Il y a quatre ans, après un grand chambardement dans les services sociaux, le taux de burn-out a frôlé le 30% à Cité des prairies. «On faisait de la prévention au suicide avec les éducateurs plutôt qu'avec les jeunes», raconte Pierre Perreault, psycho-éducateur. «C'est un travail qui a des highs intenses, des downs intenses. Un soir, tu sors de la job, tu as vraiment l'impression d'avoir fait quelque chose. Le lendemain, tu irais vendre des bas chez Zellers», dit Stéphane Trudeau, un grand gaillard de six pieds qui a été éducateur pendant 17 ans.
Stéphane est maintenant chef de la permanence. En clair, c'est lui le patron à Cité, le soir, quand tous les autres cadres ont quitté. Une soirée, je l'ai suivi dans sa tournée du centre, trottinant derrière ses grandes foulées. Dans une des unités, tout le monde était dehors. À disputer une chaude partie de basket. Un éducateur, armé d'un boyau ruisselant, arrosait les joueurs. Les jeunes s'ébrouaient comme des chiens mouillés. Les rires fusaient dans le soleil couchant. Stéphane et moi, nous avons regardé. Longtemps. «Tu vois?», qu'il m'a dit. «Parfois, c'est ça. C'est magique».
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:53 am
par Oliver
Dossier Cité des prairies
Ici Radio-Dodo
Katia Gagnon
La Presse
Steve a des yeux d'eau pâle, dans lesquels flotte une perpétuelle inquiétude. Dos légèrement voûté, il regarde son interlocuteur par dessous. Va-t-il me faire du mal? Ce petit nage dans une anxiété extrême, une peur de vivre qui fait mal à voir. Son passé est lourd, très lourd. Si noir qu'il est incapable de dormir dans une chambre, seul. Il a peur. Peur qu'on vienne.
Tous les soirs depuis son arrivée à Cité des prairies, il demande donc à dormir à La Relance, l'unité de retrait où les chambres à l'image de cellules monacales servent normalement à calmer les jeunes en crise. Sous la garde des grands agents d'intervention, Steve est enfin capable de s'endormir.
Évidemment, tout cela est malsain. Un enfant devrait pouvoir dormir dans sa chambre, dans un centre sécuritaire où les portes sont verrouillées et les veilleurs de nuit font des rondes régulières. Pour casser cette habitude, son éducateur, Sylvain Goulet, a imaginé une sorte de stratégie des ondes. Dans un coin de l'unité, l'équipe d'éducateurs a bricolé un petit studio de radio maison en récupérant de vieux appareils. Les garçons, mis à contribution pour le nom, ont baptisé la station : Radio-Adrénaline.
Mais dans le cas de Steve, c'est plutôt Radio-Dodo.
Le lundi soir, Steve et Sylvain s'installent au micro. C'est l'émission de Steve Tendresse. Les choix musicaux sont de Steve, dans un registre soft. Celui qu'il aime. Sylvain anime, voix de velours dans le micro, et Steve annonce timidement les plages musicales et l'auteur de la chanson. Les autres garçons écoutent l'émission de leur chambre, présentent bruyamment quelques demandes spéciales.
Steve s'anime. Il est content. C'est Belle, de Notre-Dame-de-Paris, qui joue. Il regarde Sylvain, les yeux brillants. «Regarde comme les autres apprécient ton émission», dit l'éducateur.
Ce soir, Steve couchera dans sa chambre.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:54 am
par Oliver
Les mauvais numéros
Katia Gagnon
La Presse
La jeune éducatrice est debout dans le coin de la cuisine, jambes écartées, bras fermement croisés sur sa poitrine. Elle n'a pas 25 ans, elle est petite et plutôt jolie, mais elle adopte inconsciemment la pose classique de la «grosse police». Elle regarde Jean-François, 15 ans, qui donne un coup de chiffon sur les portes d'armoires. Une fois qu'il a fini, elle passe y passe son doigt. «Ouais. Pas fort. Si c'était chez nous, tu recommencerais. Mais ici, ça va faire». Vous venez de voir une photographie des problèmes de personnel à Cité des prairies. Trop de jeunes, trop de femmes, trop d'éducateurs qui confondent leur rôle avec celui d'un policier.
«La job d'éducateur, c'est d'être ferme sans être agressant», résume Patrice Fombelle, éducateur depuis dix ans. Le problème, c'est que plus les intervenants sont jeunes, plus ils ont tendance, face à une clientèle difficile et potentiellement dangereuse, à adopter une attitude de policier plutôt que d'éducateur. Et le cadre très strict de Cité des prairies conforte cette attitude dure. «C'est notre job de leur dire : va travailler ailleurs», lance un éducateur expérimenté.
Pour le chef de l'unité de retrait la Relance, Bertrand Pesant, il ne fait pas de doute que certains jeunes éducateurs commettent de grosses erreurs. «Ils pèsent un peu plus vite sur le bouton rouge», dit-il.
«Compte tenu de la clientèle qu'on a, le milieu ici devrait avoir la plus grande expertise. Or, ceux qui ont l'expertise ne veulent pas venir ici», renchérit Gilles Richelieu, psychologue. Et les intervenants expérimentés sont rapidement sollicités pour devenir cadres. Laissant leur place… à des plus jeunes.
Et le problème est compliqué par un autre, infiniment plus délicat : celui de l'arrivée massive des femmes dans la profession. Quand Christine Larose, 41 ans, a fait ses débuts dans le métier, à Boscoville, elles n'étaient que peu de femmes en poste. Il était alors impensable de laisser deux éducatrices assumer seules la responsabilité du «plancher». Mais leur arrivée a sans conteste eu des effets salutaires. Mme Larose raconte qu'à Boscoville, avant l'arrivée des femmes, il y avait beaucoup d'épisodes de crise à la cafétéria, des «bingos», comme on dit dans le jargon. «À partir du moment où il y a eu une femme, il n'y en a plus jamais eu. Parce que ça ne se fait pas. Point».
Mais aujourd'hui, alors que les nouvelles fournées de recrues ne comptent plus qu'un ou deux gars pour dix éducatrices, on a depuis longtemps dépassé le stade des effets bénéfiques pour entrer dans celui des effets pervers. «On reproduit le modèle dans lequel ces jeunes ont vécu, celui de l'omniprésence de la mère et de l'absence du père», dit Gilles Richelieu. «La haine de la mère est très présente ici», ajoute La Stéphanie Morin, une jeune éducatrice de 26 ans. «Si j'avais été une fille, je ne serais jamais resté ici», renchérit Patrice Fombelle.
En ce petit matin pluvieux, un groupe d'éducateurs fraîchement sortis de l'école visite le centre. Dans la salle de réunion, il n'y a pratiquement que des filles. Elles avouent assez peu leurs craintes de travailler dans un milieu si dur. Mais leur formatrice, elle, est parfaitement franche. «C'est un défi pour les jeunes femmes de venir travailler ici. J'ai vu des intervenantes être tellement contrôlantes qu'elles en étaient castrantes», dit Rosanne Charpentier. «Elles ont peur de l'agression. De la séduction».
Séduction. Le mot est lâché. Comment s'imposer, quand on est une jeune et jolie éducatrice, et qu'un grand gars de 17 ans, en pleine poussée de testostérone, vous regarde comme un morceau de viande? «Il y a quelques années, nous avons eu une très jolie stagiaire qui travaillait les jeudis soirs. Certains gars se retrouvaient systématiquement en chambre de retrait le jeudi soir parce qu'ils étaient incapables d'être en face d'elle. Trop de pression sexuelle», raconte Patrice Fombelle. «Les éducatrices doivent être capables de vivre avec le fait que les gars se masturbent en pensant à elles. Comment pourrait-il en être autrement? Ils ne voient pas d'autres filles», lance crûment Gilles Richelieu.
À ma première visite au centre, le personnel a d'ailleurs rapidement jaugé mon physique. «Ça va bien aller, parce que tu as l'air plus vieille et que tu n'es pas une pitoune», a lancé une éducatrice. Ouf, ai-je lâché mentalement devant ce curieux compliment.
Certains de ces jeunes éducateurs et éducatrices commenceront à la dure, puis s'amélioreront. On leur offrira des formations pour pallier les lacunes du cours technique de niveau cégep que plusieurs détiennent. Mais certains resteront toujours de mauvais intervenants. «Il y en a une criss de gang qui sévissent depuis toujours parce qu'ils sont syndiqués», lance un intervenant. «On gère des jeunes, ici. Pas des cannes de binnes, renchérit un autre. Convention collective oblige, il est parfois extrêmement difficile pour un chef de service de sélectionner le meilleur éducateur. Et ce, au détriment des besoins de ces jeunes, qu'on retire pourtant de leurs familles précisément pour qu'ils puissent nouer des relations plus saines avec d'autres adultes.
À la loterie des éducateurs, certains jeunes tirent malheureusement le mauvais numéro.
source: cyberpresse.ca
Publié : sam. oct. 01, 2005 1:56 am
par tuberale
Merci Oliver, très touchant le reportage
Publié : sam. oct. 01, 2005 2:22 am
par orve
Je suis sans mot C'est triste et choquant surtout la derniere phrase du dernier texte.
« À la loterie des éducateurs, certains jeunes tirent malheureusement le mauvais numéro.»
Publié : sam. oct. 01, 2005 4:11 am
par noiraud
J'ai envie de prendre ces jeunes garçons dans mes bras pour les consoler. Un cauchemard que vivent ces jeunes. Injustice totale. Des fois, il y aurait des parents qui mériteraient la torture et la prison à vie.
Publié : sam. oct. 01, 2005 4:36 am
par pucinette
C'est freackant
Publié : sam. oct. 01, 2005 4:44 am
par linus611
Ouf!......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................... Sont mes mots de douleur.
Publié : sam. oct. 01, 2005 4:46 am
par pucinette
linus611 a écritOuf!......................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................... Sont mes mots de douleur.
Moi qui me pensait rebelle ado
C'est dommage mais je considère que ce sont des cas désespérés ..Imaginez à 18 ans ..
Publié : sam. oct. 01, 2005 4:53 am
par linus611
Je le savais que la société était malade mais je trouve que c'est de pire en pire et des fois j'ai moi-même envie de démissionner, par contre il n'y a que l'amour qui me tient encore debout...
Publié : sam. oct. 01, 2005 4:56 am
par pucinette
linus611 a écritJe le savais que la société était malade mais je trouve que c'est de pire en pire et des fois j'ai moi-même envie de démissionner, par contre il n'y a que l'amour qui me tient encore debout...
Une raison de plus dans mon cas pour pas avoir d'enfants ..La société est mongole
Publié : sam. oct. 01, 2005 5:03 am
par linus611
J'ai en eu plusieurs, en fait j'en ai 2, mais par bout mon corps en aurait pris plus, je ne peux concevoir ce mal ignoble. Il y a quelque chose que je ne comprend plus...
Publié : sam. oct. 01, 2005 5:06 am
par pucinette
linus611 a écritJ'ai en eu plusieurs, en fait j'en ai 2, mais par bout mon corps en aurait pris plus, je ne peux concevoir ce mal ignoble. Il y a quelque chose que je ne comprend plus...
Moi ca me dépasse ..je sais pas comment ils font les éducateurs
C'est très triste!
Publié : sam. oct. 01, 2005 5:11 am
par linus611
pucinette a écrit
Moi ca me dépasse ..je sais pas comment ils font les éducateurs
C'est très triste! Ils sont des sains. Je les admires.
Publié : sam. oct. 01, 2005 5:11 am
par orve
Si on le dénonce c'est un pas vers l'avant, de penser que la société est pire que ce qu'elle a déjà été, je crois que c'est faux, c'est que avant tout le monde se la fermait.
Ça prouve que tout ne tourne pas rond à la DPJ en tk, avec le film de Paul Arcand et ce reportage j'espère que des gens influents vont se pencher sur le problème, peut-être qu'une ouverture sur l'adoption serait une idée.