Publié : sam. sept. 03, 2005 4:13 am
Journée mondiale de l'alphabétisation - Briser la chaîne de la pauvreté
Marilyse Hamelin
Édition du samedi 3 et du dimanche 4 septembre 2005
Les adultes québécois peu scolarisés intéressés à entreprendre un retour aux études en vue de l'obtention d'un diplôme post-secondaire auront accès à un nouveau service de référence et d'orientation: la ligne Info Apprendre, pilotée par la Fondation pour l'alphabétisation.
Au Québec, 21,1 % de la population âgée de 16 à 65 ans a une capacité de lecture très limitée. En fait, il y aurait entre 468 000 et un million de Québécois de 15 à 65 ans faiblement alphabétisés, selon le recensement canadien de 2001. Si les statistiques sont vagues, c'est que l'analphabétisme est difficile à détecter. Mais il est faux de penser qu'il s'agit d'un concept flou. En termes clairs, une personne est considérée analphabète lorsqu'elle a échoué la formation scolaire de base, soit le cheminement scolaire régulier (primaire et secondaire). Ainsi, seule une personne de 16 ans et plus peut être qualifiée d'analphabète. Avant cet âge, elle est plutôt considérée comme étant en situation de difficulté d'apprentissage. «L'analphabétisme est un constat d'échec de la première scolarité. L'alphabétisation des adultes permet de rendre ces personnes en difficulté actives dans la société. Cela constitue une des solutions à la pénurie de main-d'oeuvre. La population ignore à quel point plusieurs personnes ont des besoins importants», explique Sophie Labrecque, présidente-directrice générale de la Fondation pour l'alphabétisation.
Info-Alpha
Fondée en 1989, la Fondation pour l'alphabétisation a pour mission de rendre accessible à tous la formation de base en lecture et en écriture. Depuis 16 ans elle y arrive, entre autres moyens, grâce à la ligne de référence Info-Alpha, un service sans frais et confidentiel à l'échelle provinciale. Le service permet d'orienter les usagers vers les ressources en alphabétisation de leur région. Phénomène unique au Canada, Info-Alpha répond à environ 100 personnes par jour et a procédé à 57 000 interventions depuis son lancement. «Notre organisme est reconnu sur le terrain; nous avons de nombreux partenaires issus des milieux communautaires public et privé. Nous aimerions faire plus d'interventions, mais la clientèle est difficile à rejoindre. C'est rare qu'une personne analphabète se dise : "j'ai un problème, je vais m'inscrire à l'école". Imaginez ce que ça représente de retourner à l'école quand on ne sait ni lire ni écrire !», illustre Mme Labrecque. Chaque appel reçu par Info-Alpha dure en moyenne 20 minutes et est géré selon une approche individuelle, chaque personne ayant sa propre histoire. Les usagers rappellent environ sept fois au cours de leur démarche.
De plus, la ligne offre un service d'accompagnement téléphonique unique au monde, le service «Limousine». «La "Limousine", c'est l'accompagnement de l'usager de A à Z dans sa recherche auprès des organismes en alphabétisation. Lorsque le responsable de l'organisme choisi est joint, l'intervenant d'Info-Alpha demeure en ligne tout au long de l'échange téléphonique afin de s'assurer que l'usager soit satisfait du contact établi et qu'il ait saisi tous les paramètres de sa démarche. Une fois l'échange avec l'organisme complété, l'intervenant de la ligne Info-Alpha demeure en ligne avec l'usager afin de répondre aux questions qui le préoccupent et de le rassurer sur la suite de sa démarche», explique la présidente, pour qui le niveau élevé d'appels reçus s'explique par les changements en matière d'exigences du marché du travail. «Les critères de la société ont augmenté aujourd'hui. Avant, une personne plutôt manuelle pouvait se débrouiller; aujourd'hui, même pour travailler sur un chantier, ça prend des cartes de compétence.»
Info Apprendre
Décrétée par l'UNESCO en 1966, la Journée mondiale de l'alphabétisation aura cette année une résonance toute particulière pour l'organisme québécois car il lancera une deuxième ligne d'aide téléphonique, Info Apprendre. La nouvelle ligne orientera les adultes désireux de retourner aux études en vue d'obtenir un diplôme d'études collégiales ou universitaires. Le projet Info Apprendre remonte à 2002, alors que le gouvernement du Québec, dans le cadre de sa politique d'éducation des adultes et de formation continue, confiait à la Fondation le mandat de créer une ligne de référence s'adressant aux personnes ayant une formation de base et désirant obtenir un diplôme d'études supérieures. «À la Fondation, on reçoit souvent des appels de gens qui ont pour base une 3e secondaire seulement, qui ont arrêté les études, travaillé pendant 10 ans en usine, et qui désirent maintenant retourner aux études. C'est à ces personnes que s'adresse Info Apprendre», illustre la présidente.
Jusqu'ici, la ligne Info Apprendre demeurait un projet-pilote, dans l'ombre d'Info-Alpha. «Nous n'avons pas fait de publicité et déjà nos lignes débordent. L'an dernier, nous avons constaté une augmentation de 170 % de notre volume d'appels. Ce que l'on souhaite en lançant officiellement Info Apprendre à l'occasion du 8 septembre, c'est de faire connaître le service au grand public», expose la présidente. Le service au centre de référence est assuré par cinq intervenants, dont trois sont capables de répondre à tous les types d'appel en français, anglais et espagnol. «On a même un intervenant qui répond en japonais !», lance Mme Labrecque. Advenant une surcharge d'appels, le personnel de la Fondation est aussi habilité à répondre aux appels qui convergent vers leurs deux lignes.
En plus des services de référence venant en aide aux adultes, la Fondation pratique la prévention auprès des jeunes grâce à la campagne «La lecture en cadeau», qui vise les enfants dits «à risque», issus de famille peu fortunées où les parents sont parfois analphabètes. Jusqu'ici, pas moins de 90 000 livres ont été distribués à des enfants âgés de 0 à 12 ans. L'astuce ? À l'automne, le grand public est invité à se rendre au Salon du livre de Montréal ou dans l'une des librairies participantes pour faire l'achat d'un livre jeunesse neuf. Le printemps venu, la Journée de la lecture, le 3 mai, marque le coup d'envoi de la distribution des livres aux enfants.
La Fondation reçoit en moyenne 300 000 demandes de livre par an, mais n'est en mesure de répondre qu'à 20 000. «On a besoin de gens qui se présentent en librairie cet automne. On manque de ressources; cette année, on ajoute même la campagne "tirelire" pour des dons en argent. Les professeurs, les CPE, les groupes communautaire et les comptoirs familiaux qui font la distribution des livres participent de plus en plus au projet; on a besoin de sous pour répondre à la demande», avoue Sophie Labrecque.
Marilyse Hamelin
Édition du samedi 3 et du dimanche 4 septembre 2005
Les adultes québécois peu scolarisés intéressés à entreprendre un retour aux études en vue de l'obtention d'un diplôme post-secondaire auront accès à un nouveau service de référence et d'orientation: la ligne Info Apprendre, pilotée par la Fondation pour l'alphabétisation.
Au Québec, 21,1 % de la population âgée de 16 à 65 ans a une capacité de lecture très limitée. En fait, il y aurait entre 468 000 et un million de Québécois de 15 à 65 ans faiblement alphabétisés, selon le recensement canadien de 2001. Si les statistiques sont vagues, c'est que l'analphabétisme est difficile à détecter. Mais il est faux de penser qu'il s'agit d'un concept flou. En termes clairs, une personne est considérée analphabète lorsqu'elle a échoué la formation scolaire de base, soit le cheminement scolaire régulier (primaire et secondaire). Ainsi, seule une personne de 16 ans et plus peut être qualifiée d'analphabète. Avant cet âge, elle est plutôt considérée comme étant en situation de difficulté d'apprentissage. «L'analphabétisme est un constat d'échec de la première scolarité. L'alphabétisation des adultes permet de rendre ces personnes en difficulté actives dans la société. Cela constitue une des solutions à la pénurie de main-d'oeuvre. La population ignore à quel point plusieurs personnes ont des besoins importants», explique Sophie Labrecque, présidente-directrice générale de la Fondation pour l'alphabétisation.
Info-Alpha
Fondée en 1989, la Fondation pour l'alphabétisation a pour mission de rendre accessible à tous la formation de base en lecture et en écriture. Depuis 16 ans elle y arrive, entre autres moyens, grâce à la ligne de référence Info-Alpha, un service sans frais et confidentiel à l'échelle provinciale. Le service permet d'orienter les usagers vers les ressources en alphabétisation de leur région. Phénomène unique au Canada, Info-Alpha répond à environ 100 personnes par jour et a procédé à 57 000 interventions depuis son lancement. «Notre organisme est reconnu sur le terrain; nous avons de nombreux partenaires issus des milieux communautaires public et privé. Nous aimerions faire plus d'interventions, mais la clientèle est difficile à rejoindre. C'est rare qu'une personne analphabète se dise : "j'ai un problème, je vais m'inscrire à l'école". Imaginez ce que ça représente de retourner à l'école quand on ne sait ni lire ni écrire !», illustre Mme Labrecque. Chaque appel reçu par Info-Alpha dure en moyenne 20 minutes et est géré selon une approche individuelle, chaque personne ayant sa propre histoire. Les usagers rappellent environ sept fois au cours de leur démarche.
De plus, la ligne offre un service d'accompagnement téléphonique unique au monde, le service «Limousine». «La "Limousine", c'est l'accompagnement de l'usager de A à Z dans sa recherche auprès des organismes en alphabétisation. Lorsque le responsable de l'organisme choisi est joint, l'intervenant d'Info-Alpha demeure en ligne tout au long de l'échange téléphonique afin de s'assurer que l'usager soit satisfait du contact établi et qu'il ait saisi tous les paramètres de sa démarche. Une fois l'échange avec l'organisme complété, l'intervenant de la ligne Info-Alpha demeure en ligne avec l'usager afin de répondre aux questions qui le préoccupent et de le rassurer sur la suite de sa démarche», explique la présidente, pour qui le niveau élevé d'appels reçus s'explique par les changements en matière d'exigences du marché du travail. «Les critères de la société ont augmenté aujourd'hui. Avant, une personne plutôt manuelle pouvait se débrouiller; aujourd'hui, même pour travailler sur un chantier, ça prend des cartes de compétence.»
Info Apprendre
Décrétée par l'UNESCO en 1966, la Journée mondiale de l'alphabétisation aura cette année une résonance toute particulière pour l'organisme québécois car il lancera une deuxième ligne d'aide téléphonique, Info Apprendre. La nouvelle ligne orientera les adultes désireux de retourner aux études en vue d'obtenir un diplôme d'études collégiales ou universitaires. Le projet Info Apprendre remonte à 2002, alors que le gouvernement du Québec, dans le cadre de sa politique d'éducation des adultes et de formation continue, confiait à la Fondation le mandat de créer une ligne de référence s'adressant aux personnes ayant une formation de base et désirant obtenir un diplôme d'études supérieures. «À la Fondation, on reçoit souvent des appels de gens qui ont pour base une 3e secondaire seulement, qui ont arrêté les études, travaillé pendant 10 ans en usine, et qui désirent maintenant retourner aux études. C'est à ces personnes que s'adresse Info Apprendre», illustre la présidente.
Jusqu'ici, la ligne Info Apprendre demeurait un projet-pilote, dans l'ombre d'Info-Alpha. «Nous n'avons pas fait de publicité et déjà nos lignes débordent. L'an dernier, nous avons constaté une augmentation de 170 % de notre volume d'appels. Ce que l'on souhaite en lançant officiellement Info Apprendre à l'occasion du 8 septembre, c'est de faire connaître le service au grand public», expose la présidente. Le service au centre de référence est assuré par cinq intervenants, dont trois sont capables de répondre à tous les types d'appel en français, anglais et espagnol. «On a même un intervenant qui répond en japonais !», lance Mme Labrecque. Advenant une surcharge d'appels, le personnel de la Fondation est aussi habilité à répondre aux appels qui convergent vers leurs deux lignes.
En plus des services de référence venant en aide aux adultes, la Fondation pratique la prévention auprès des jeunes grâce à la campagne «La lecture en cadeau», qui vise les enfants dits «à risque», issus de famille peu fortunées où les parents sont parfois analphabètes. Jusqu'ici, pas moins de 90 000 livres ont été distribués à des enfants âgés de 0 à 12 ans. L'astuce ? À l'automne, le grand public est invité à se rendre au Salon du livre de Montréal ou dans l'une des librairies participantes pour faire l'achat d'un livre jeunesse neuf. Le printemps venu, la Journée de la lecture, le 3 mai, marque le coup d'envoi de la distribution des livres aux enfants.
La Fondation reçoit en moyenne 300 000 demandes de livre par an, mais n'est en mesure de répondre qu'à 20 000. «On a besoin de gens qui se présentent en librairie cet automne. On manque de ressources; cette année, on ajoute même la campagne "tirelire" pour des dons en argent. Les professeurs, les CPE, les groupes communautaire et les comptoirs familiaux qui font la distribution des livres participent de plus en plus au projet; on a besoin de sous pour répondre à la demande», avoue Sophie Labrecque.