Publié : mer. juin 22, 2005 3:22 am
Loto-Québec ouvre son jeu
Le Cirque du Soleil s'associe au projet de déménagement du casino; Québec crée un comité interministériel pour encadrer la démarche
Kathleen Lévesque
Édition du mercredi 22 juin 2005
Conscient d'avancer en terrain miné, le gouvernement de Jean Charest encadrera le processus décisionnel à propos du projet de Loto-Québec de déménager le Casino de Montréal près du centre-ville. Du coup, la société d'État est autorisée à faire dès aujourd'hui la présentation publique de sa proposition, à laquelle s'associe le Cirque du Soleil.
Le conseil des ministres a fixé les règles du jeu la semaine dernière. Une certaine résistance au sein de l'équipe Charest ainsi que l'expérience récente du dossier du CHUM, qui a laissé des traces, forcent Loto-Québec à rythmer le dossier selon les attentes du gouvernement. C'est un dossier d'autant plus délicat qu'il soulève un débat moral incontournable et qu'il pourrait nécessiter des investissements publics majeurs.
Sur ce dernier point, le gouvernement Charest a clairement indiqué à Loto-Québec qu'il fallait regarder «les moyens d'augmenter la participation du secteur privé au financement de tout projet». Or il semble que le Cirque du Soleil, qui était pressenti pour devenir partenaire du projet, se lance dans l'aventure. Le fondateur et chef de direction du Cirque du Soleil, Guy Laliberté, sera au côté du président-directeur général de la société d'État, Alain Cousineau, pour la conférence de presse.
Le possible déménagement du casino au bassin Peel s'intégrerait dans un vaste complexe récréo-touristique comprenant un hôtel haut de gamme et une salle de spectacles. L'établissement d'un centre de foires à proximité est également envisagé.
Afin d'encadrer Loto-Québec et son désir d'expansion, un comité interministériel, sous la présidence du ministère des Finances, sera mis en place. Des fonctionnaires, notamment de la Santé, de la Sécurité publique, du Tourisme et de la Culture, examineront les scénarios soumis ainsi que toutes les analyses qui en découleront. Un rapport devra être déposé d'ici la fin de l'année. Québec ne tranchera donc pas cette question avant 2006.
Outre le déménagement envisagé, Loto-Québec devra présenter la possibilité d'agrandir le casino de l'île Notre-Dame, une idée que la société d'État avait pourtant écartée. Et même si Loto-Québec s'appuyait déjà sur des analyses, d'autres études devront être faites. «Il y a des compléments de réponse à trouver, notamment en matière d'impacts financiers et sociaux», a précisé hier au Devoir Michel Rochette, du cabinet du ministre des Finances, Michel Audet.
Déjà, plusieurs critiques ont fusé quant aux conséquences pour la population d'un accès soi-disant plus facile au casino. On craint également une croissance de la criminalité. «Ce n'est pas un hasard si le casino a été installé sur l'île Notre-Dame. C'était une façon d'isoler le jeu et d'empêcher le commerce illicite dans les alentours», a fait valoir Blaise Lefebvre, porte-parole de la Direction de la santé publique de Montréal.
Selon les statistiques pour l'année 2004 compilées par le Service de police de la Ville de Montréal, le secteur où se situe le Casino de Montréal génère un plus grand nombre de crimes que partout ailleurs sur l'île de Montréal. On y compte en 2004, entre autres crimes, quatre tentatives de meurtre, 712 voies de fait, 248 cas de prostitution et 548 vols de véhicules.
La Direction de la santé publique de Montréal est en contact avec Loto-Québec dans le dossier de la relocalisation du casino. L'organisme gouvernemental souhaite que Loto-Québec développe une stratégie pour freiner le risque de dérapages et adopte des mesures concrètes. «Nous n'avons pas de position ferme sur la question. On tente d'obtenir des garanties qu'il n'y aura pas de conséquences non souhaitables pour une population dont on connaît la vulnérabilité. C'est l'objet des discussions. Il n'y a pas de confrontation», a ajouté M. Lefebvre.
Du côté du Regroupement économique et social du Sud-Ouest (RESO), on se montre particulièrement prudent, se bornant à souligner qu'il s'agit d'un «dossier controversé». Loto-Québec doit faire aujourd'hui une présentation formelle au RESO, qui pourrait voir dans ce complexe récréo-touristique un tremplin pour bien des travailleurs du Sud-Ouest.
Chez Loto-Québec, on ne nie pas que ce projet soit «sensible», mais on souligne que l'objectif n'est pas de rendre plus attrayant le casino pour la population locale mais bien pour les touristes et les «gros joueurs étrangers». On assure surtout que la création d'un tel complexe récréo-touristique est une occasion de développement économique majeur. «On veut déposer notre concept et, après ça, le débat public pourra s'enclencher. Pour l'instant, on parle surtout dans l'abstrait. On doit démontrer que le projet est économiquement rentable, qu'il est techniquement réalisable à l'intérieur des budgets et qu'il est socialement acceptable. Et c'est le cas», a expliqué Pierre Bibeau, vice-président corporatif aux communications et aux affaires publiques chez Loto-Québec.
Les plans préliminaires présentés aujourd'hui présentent un complexe dont l'architecture «audacieuse» devrait plaire, croit M. Bibeau. Il s'agit d'une version dont le gouvernement n'a pas pris connaissance.
À la Société du havre de Montréal, on s'enthousiasme pour le projet, qui intègre le déplacement de l'autoroute Bonaventure. Le secteur du bassin Peel est décrépi et sa revitalisation est souhaitée, a rappelé le président-directeur général de la Société du havre, Jacques Côté.
Ce dernier espère également que l'arrivée du casino dans le secteur provoquera un investissement dans les transports en commun. La Société promeut la mise en place d'un tramway liant le Vieux-Montréal au futur casino. À l'heure actuelle, les touristes s'agglutinent autour de la place Jacques-Cartier et ne se déplacent pas vers l'ouest faute de transport adéquat. «On espère que Loto-Québec paiera une partie de la note», a souligné M. Côté.
Dans l'éventualité où le casino quitterait l'île Notre-Dame, les édifices vacants logeraient le siège social de Loto-Québec. La société vendrait alors sa part de l'édifice de la rue Sherbrooke.
Le Cirque du Soleil s'associe au projet de déménagement du casino; Québec crée un comité interministériel pour encadrer la démarche
Kathleen Lévesque
Édition du mercredi 22 juin 2005
Conscient d'avancer en terrain miné, le gouvernement de Jean Charest encadrera le processus décisionnel à propos du projet de Loto-Québec de déménager le Casino de Montréal près du centre-ville. Du coup, la société d'État est autorisée à faire dès aujourd'hui la présentation publique de sa proposition, à laquelle s'associe le Cirque du Soleil.
Le conseil des ministres a fixé les règles du jeu la semaine dernière. Une certaine résistance au sein de l'équipe Charest ainsi que l'expérience récente du dossier du CHUM, qui a laissé des traces, forcent Loto-Québec à rythmer le dossier selon les attentes du gouvernement. C'est un dossier d'autant plus délicat qu'il soulève un débat moral incontournable et qu'il pourrait nécessiter des investissements publics majeurs.
Sur ce dernier point, le gouvernement Charest a clairement indiqué à Loto-Québec qu'il fallait regarder «les moyens d'augmenter la participation du secteur privé au financement de tout projet». Or il semble que le Cirque du Soleil, qui était pressenti pour devenir partenaire du projet, se lance dans l'aventure. Le fondateur et chef de direction du Cirque du Soleil, Guy Laliberté, sera au côté du président-directeur général de la société d'État, Alain Cousineau, pour la conférence de presse.
Le possible déménagement du casino au bassin Peel s'intégrerait dans un vaste complexe récréo-touristique comprenant un hôtel haut de gamme et une salle de spectacles. L'établissement d'un centre de foires à proximité est également envisagé.
Afin d'encadrer Loto-Québec et son désir d'expansion, un comité interministériel, sous la présidence du ministère des Finances, sera mis en place. Des fonctionnaires, notamment de la Santé, de la Sécurité publique, du Tourisme et de la Culture, examineront les scénarios soumis ainsi que toutes les analyses qui en découleront. Un rapport devra être déposé d'ici la fin de l'année. Québec ne tranchera donc pas cette question avant 2006.
Outre le déménagement envisagé, Loto-Québec devra présenter la possibilité d'agrandir le casino de l'île Notre-Dame, une idée que la société d'État avait pourtant écartée. Et même si Loto-Québec s'appuyait déjà sur des analyses, d'autres études devront être faites. «Il y a des compléments de réponse à trouver, notamment en matière d'impacts financiers et sociaux», a précisé hier au Devoir Michel Rochette, du cabinet du ministre des Finances, Michel Audet.
Déjà, plusieurs critiques ont fusé quant aux conséquences pour la population d'un accès soi-disant plus facile au casino. On craint également une croissance de la criminalité. «Ce n'est pas un hasard si le casino a été installé sur l'île Notre-Dame. C'était une façon d'isoler le jeu et d'empêcher le commerce illicite dans les alentours», a fait valoir Blaise Lefebvre, porte-parole de la Direction de la santé publique de Montréal.
Selon les statistiques pour l'année 2004 compilées par le Service de police de la Ville de Montréal, le secteur où se situe le Casino de Montréal génère un plus grand nombre de crimes que partout ailleurs sur l'île de Montréal. On y compte en 2004, entre autres crimes, quatre tentatives de meurtre, 712 voies de fait, 248 cas de prostitution et 548 vols de véhicules.
La Direction de la santé publique de Montréal est en contact avec Loto-Québec dans le dossier de la relocalisation du casino. L'organisme gouvernemental souhaite que Loto-Québec développe une stratégie pour freiner le risque de dérapages et adopte des mesures concrètes. «Nous n'avons pas de position ferme sur la question. On tente d'obtenir des garanties qu'il n'y aura pas de conséquences non souhaitables pour une population dont on connaît la vulnérabilité. C'est l'objet des discussions. Il n'y a pas de confrontation», a ajouté M. Lefebvre.
Du côté du Regroupement économique et social du Sud-Ouest (RESO), on se montre particulièrement prudent, se bornant à souligner qu'il s'agit d'un «dossier controversé». Loto-Québec doit faire aujourd'hui une présentation formelle au RESO, qui pourrait voir dans ce complexe récréo-touristique un tremplin pour bien des travailleurs du Sud-Ouest.
Chez Loto-Québec, on ne nie pas que ce projet soit «sensible», mais on souligne que l'objectif n'est pas de rendre plus attrayant le casino pour la population locale mais bien pour les touristes et les «gros joueurs étrangers». On assure surtout que la création d'un tel complexe récréo-touristique est une occasion de développement économique majeur. «On veut déposer notre concept et, après ça, le débat public pourra s'enclencher. Pour l'instant, on parle surtout dans l'abstrait. On doit démontrer que le projet est économiquement rentable, qu'il est techniquement réalisable à l'intérieur des budgets et qu'il est socialement acceptable. Et c'est le cas», a expliqué Pierre Bibeau, vice-président corporatif aux communications et aux affaires publiques chez Loto-Québec.
Les plans préliminaires présentés aujourd'hui présentent un complexe dont l'architecture «audacieuse» devrait plaire, croit M. Bibeau. Il s'agit d'une version dont le gouvernement n'a pas pris connaissance.
À la Société du havre de Montréal, on s'enthousiasme pour le projet, qui intègre le déplacement de l'autoroute Bonaventure. Le secteur du bassin Peel est décrépi et sa revitalisation est souhaitée, a rappelé le président-directeur général de la Société du havre, Jacques Côté.
Ce dernier espère également que l'arrivée du casino dans le secteur provoquera un investissement dans les transports en commun. La Société promeut la mise en place d'un tramway liant le Vieux-Montréal au futur casino. À l'heure actuelle, les touristes s'agglutinent autour de la place Jacques-Cartier et ne se déplacent pas vers l'ouest faute de transport adéquat. «On espère que Loto-Québec paiera une partie de la note», a souligné M. Côté.
Dans l'éventualité où le casino quitterait l'île Notre-Dame, les édifices vacants logeraient le siège social de Loto-Québec. La société vendrait alors sa part de l'édifice de la rue Sherbrooke.
Je suis assez réticente même.....