Publié : sam. févr. 05, 2005 5:00 am
Les ravages du pot
Pourquoi les jeunes fument-ils ?
Marie-Claude Malboeuf
La Presse
«Fumer un joint, c'est comme prendre sa première brosse. Ça ne veut pas dire que ça va continuer», précise le psychoéducateur Marc Leblanc. Que les parents se rassurent donc: la majorité des jeunes (80 %) fument de la marijuana parce qu'ils ont le goût d'explorer, de se sentir adulte et d'avoir du plaisir. Ils en font alors l'expérience avec leurs amis et cela reste festif.
Lorsque la chose devient habituelle, les choses se compliquent. Car de 30 % à 50 % des adeptes présenteraient un trouble de l'humeur. La marijuana sert alors à soigner leur déprime ou leur anxiété. Et cela peut marcher si bien qu'elle masque pendant un certain temps leur problème de base, constate le Dr Guy Tremblay, pédopsychiatre au CHUQ.
D'autres tentent de «réparer» leur personnalité. Ils veulent se sentir moins timides, plus cool, oser se faire des amis. À moins que la marijuana ne remplisse un vide. «Les jeunes ne sont pas capables de trouver ce qu'ils aiment faire. Alors ça s'immisce dans leur vie. Que fait-on le vendredi soir? On fume un joint! C'est devenu une activité en soi», remarque l'intervenante Nathalie Martel.
Autre utilité: servir d'excuse aux jeunes ayant du mal à accepter que le succès ne leur tombe pas du ciel. «Dans notre société narcissique, ils accrochent et disent que la vie ne marche pas à cause de ça», répète le psychiatre Richard Cloutie
Souvent, les crises intensifient la consommation: peine d'amour, chicanes, turbulences de l'adolescence. Dépassés par leurs émotions, les jeunes cherchent alors à s'évader. Et le cannabis est libérateur.
D'autres veulent tuer une souffrance spécifique pour parvenir à faire face à la vie. «Plusieurs ne se sentent pas aimés. C'est le résultat des 10 ou 12 dernières années, estime Luc Gervais. Le fait que les parents aient moins de temps pour leurs enfants crée ce problème d'estime, ce sentiment de: Je ne vaux pas la peine. Quand vous ajoutez l'école, c'est trop. L'enfant n'est pas capable de vivre deux ou trois sortes de rejets.»
Bref, la drogue n'est qu'une petite pièce du casse-tête. «Pour qu'un jeune accroche, il faut que le terreau soit fertile: ça prend certains traits personnels et un certain contexte», précise Geneviève Lefebvre, du Centre Dollard-Cormier. Pour écraser, dit-elle, les jeunes doivent vite identifier à quoi leur sert la drogue. «On les aide à trouver d'autres moyens de remplir sa fonction.»
Et pourquoi certains abusent ?
«Ce ne sont pas vraiment des rebelles. Le profil délinquant est plus rare que le low profile qui cherche à avoir l'air king quand il consomme, qui en a besoin pour oser», dit Luc Gervais, des Centres Jean-Lapointe pour adolescents.
«J'ai déjà suivi une adolescente qui n'avait que des A+ à l'école. Elle était bonne en sport, bonne en tout. Mais elle avait des parents conservateurs, elle se cachait même de ses amis d'école et vivait beaucoup d'anxiété. Je l'ai retrouvée en larmes», dit Geneviève Lefebvre, de Dollard-Cormier.
Bref, si la quasi-totalité des jeunes contrevenants disent fumer du cannabis, ils sont loin de dominer le tableau.
-------------------------
> 9 % des consommateurs de marijuana deviennent accros.
> 15 % le deviennent chez les 15-24 ans.
Chez les jeunes, le cannabis crée donc autant de dépendants que l'alcool, mais moins que les autres drogues:
> L'alcool 15%
> L'héroïne 23 %
> Le tabac 32 %
Source: Institut de médecine américain, 1999
> Les adolescents canadiens sont les plus grands consommateurs de cannabis au monde. Et aucun pays ne compte autant d'usagers réguliers, soit 19,2%.
> 43 % des garçons
> 38 % des filles de 15 ans disent avoir fumé du cannabis au cours des 12 derniers mois.
> Aux Pays-Bas, où la marijuana est vendue dans des Coffee Shops, deux fois moins de jeunes consomment.
Pourquoi les jeunes fument-ils ?
Marie-Claude Malboeuf
La Presse
«Fumer un joint, c'est comme prendre sa première brosse. Ça ne veut pas dire que ça va continuer», précise le psychoéducateur Marc Leblanc. Que les parents se rassurent donc: la majorité des jeunes (80 %) fument de la marijuana parce qu'ils ont le goût d'explorer, de se sentir adulte et d'avoir du plaisir. Ils en font alors l'expérience avec leurs amis et cela reste festif.
Lorsque la chose devient habituelle, les choses se compliquent. Car de 30 % à 50 % des adeptes présenteraient un trouble de l'humeur. La marijuana sert alors à soigner leur déprime ou leur anxiété. Et cela peut marcher si bien qu'elle masque pendant un certain temps leur problème de base, constate le Dr Guy Tremblay, pédopsychiatre au CHUQ.
D'autres tentent de «réparer» leur personnalité. Ils veulent se sentir moins timides, plus cool, oser se faire des amis. À moins que la marijuana ne remplisse un vide. «Les jeunes ne sont pas capables de trouver ce qu'ils aiment faire. Alors ça s'immisce dans leur vie. Que fait-on le vendredi soir? On fume un joint! C'est devenu une activité en soi», remarque l'intervenante Nathalie Martel.
Autre utilité: servir d'excuse aux jeunes ayant du mal à accepter que le succès ne leur tombe pas du ciel. «Dans notre société narcissique, ils accrochent et disent que la vie ne marche pas à cause de ça», répète le psychiatre Richard Cloutie
Souvent, les crises intensifient la consommation: peine d'amour, chicanes, turbulences de l'adolescence. Dépassés par leurs émotions, les jeunes cherchent alors à s'évader. Et le cannabis est libérateur.
D'autres veulent tuer une souffrance spécifique pour parvenir à faire face à la vie. «Plusieurs ne se sentent pas aimés. C'est le résultat des 10 ou 12 dernières années, estime Luc Gervais. Le fait que les parents aient moins de temps pour leurs enfants crée ce problème d'estime, ce sentiment de: Je ne vaux pas la peine. Quand vous ajoutez l'école, c'est trop. L'enfant n'est pas capable de vivre deux ou trois sortes de rejets.»
Bref, la drogue n'est qu'une petite pièce du casse-tête. «Pour qu'un jeune accroche, il faut que le terreau soit fertile: ça prend certains traits personnels et un certain contexte», précise Geneviève Lefebvre, du Centre Dollard-Cormier. Pour écraser, dit-elle, les jeunes doivent vite identifier à quoi leur sert la drogue. «On les aide à trouver d'autres moyens de remplir sa fonction.»
Et pourquoi certains abusent ?
«Ce ne sont pas vraiment des rebelles. Le profil délinquant est plus rare que le low profile qui cherche à avoir l'air king quand il consomme, qui en a besoin pour oser», dit Luc Gervais, des Centres Jean-Lapointe pour adolescents.
«J'ai déjà suivi une adolescente qui n'avait que des A+ à l'école. Elle était bonne en sport, bonne en tout. Mais elle avait des parents conservateurs, elle se cachait même de ses amis d'école et vivait beaucoup d'anxiété. Je l'ai retrouvée en larmes», dit Geneviève Lefebvre, de Dollard-Cormier.
Bref, si la quasi-totalité des jeunes contrevenants disent fumer du cannabis, ils sont loin de dominer le tableau.
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> 9 % des consommateurs de marijuana deviennent accros.
> 15 % le deviennent chez les 15-24 ans.
Chez les jeunes, le cannabis crée donc autant de dépendants que l'alcool, mais moins que les autres drogues:
> L'alcool 15%
> L'héroïne 23 %
> Le tabac 32 %
Source: Institut de médecine américain, 1999
> Les adolescents canadiens sont les plus grands consommateurs de cannabis au monde. Et aucun pays ne compte autant d'usagers réguliers, soit 19,2%.
> 43 % des garçons
> 38 % des filles de 15 ans disent avoir fumé du cannabis au cours des 12 derniers mois.
> Aux Pays-Bas, où la marijuana est vendue dans des Coffee Shops, deux fois moins de jeunes consomment.