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Publié : lun. janv. 10, 2005 5:08 am
par tuberale
La passion du macabre


Kathy Reichs fait parler les restes humains



Antoine Robitaille
Édition du lundi 10 janvier 2005




«Que faut-il étudier pour devenir ce que vous êtes?», ont demandé en substance au moins deux jeunes auditrices pleines d'admiration, au terme de la conférence de Kathy Reichs, au Centre des sciences de Montréal (CSM), en matinée hier.



   
Cette question à une romancière à succès, rituelle après une rencontre du genre, surprend pourtant. Car n'y a-t-il rien de plus macabre -- bien que nécessaire -- que le premier métier de Mme Reichs, anthropologue judiciaire ? La présentation que celle-ci venait de clore l'avait prouvé une fois de plus, avec son étalage cru de détails ultra-morbides. Eh oui, pour déterminer l'identité d'une victime ou pour identifier la cause du décès, «il faut ce qu'il faut», c'est-à-dire : se pencher sur les méthodes de démembrement de corps humains, par exemple -- «selon l'entaille que l'on voit ici, le meurtrier a utilisé une hache» -- ou alors étudier la putréfaction qui envahit un cadavre grâce à la façon dont les mouches et les asticots s'y vautrent, etc. «Le stade de reproduction des insectes dans le cadavre nous donne une bonne indication de l'heure de la mort.»

Et Kathy Reichs, avec un flegme déconcertant, enchaîne sans broncher avec une histoire de dépouille retrouvée dans une fosse septique.

Kathy Reichs est ce que les anglophones appellent un «role model». Une foule de 345 personnes s'était massée dans le cinéma Imax du CSM et avait payé 25 $ pour venir entendre cette auteure à succès traduite dans plus de 20 langues.

Fascination, d'abord, pour ce métier singulier d'anthropologue judiciaire qui entre en action lorsque les autopsies normales n'ont pas donné les résultats satisfaisants. «Depuis le procès d'O.J. Simpson, a-t-elle déjà expliqué dans plusieurs interviews, les gens sont devenus plus passionnés que jamais par les aspects scientifiques des enquêtes.» Nous sommes à l'ère des émissions du type Crime Scene investigation (Les Experts en français), suivies par des millions de téléspectateurs. L'intrigue policière est toujours là (comme dans Colombo et autres Agatha Christie), mais, en plus, on met un accent particulier sur les techniques d'enquête, les méthodes précises, les détails sordides. Et Kathy Reichs n'est jamais à court de détails, puisque c'est son métier. Elle a d'ailleurs conclu récemment avec le réseau américain Fox une entente pour une série télévisée qui s'inspirera de ses activités.



Fascination ensuite, pour une Américaine de 54 ans qui partage son temps entre Montréal, où elle travaille pour le Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale du Québec comme anthropologue judiciaire, et la Caroline du Nord, où elle enseigne au département de sociologie et d'anthropologie de l'université, sise à Charlotte.




Mme Reichs fait d'ailleurs de Montréal, où elle séjourne mensuellement, la toile de fond de plusieurs de ses sept romans aux titres souvent bilingues : Déjà Dead s'inspirait des meurtres de Serge Archambault, accusé en 1994 d'avoir tué plusieurs femmes. «La méthode, très raffinée, que le meurtrier avait choisie pour démembrer les corps indiquait qu'il avait été soit chirurgien, soit boucher, ou alors les deux», badinait Mme Reichs, hier. «Finalement, on a appris qu'Archambault avait été boucher.» Quant à Death du jour, il s'inspire de son expérience dans les autopsies des victimes des suicides du Temple solaire : «Ces gens-là croyaient s'envoler pour Sirius, ce qui est une étrange destination dans la mesure où c'est une étoile et non une planète», lance-t-elle de son humour noir. Enfin, Deadly décision se déroule en pleine guerre des motards à Montréal.



Dans ses histoires, Mme Reichs met en scène Temperance Brennan, son alter ego, une anthropologue judiciaire anciennement alcoolique et divorcée («ce n'est pas tout à fait moi», tient-elle à dire) qui fait ce qu'elle-même ne se permettrait jamais, c'est-à-dire prolonger les enquêtes, insister pour débusquer un meurtrier, prendre des risques. «Contrairement à elle, je ne me suis jamais fait tirer dessus.»

Hyperactive

Autres occupations de Mme Reichs, décidément hyperactive («quand dormez-vous ?», lui a à juste titre demandé un participant, hier). En effet, elle enseigne au FBI les méthodes de recherche des restes humains. Et travaille en plus pour la DMORT (Disaster Mortuary Operational Recovery Team), une équipe américaine constituée de pathologistes, d'anthropologues judiciaires et de dentistes qui étudient les restes humains dispersés lors de crashs d'avion, de déraillements de train ou encore qui interviennent «lorsqu'un cimetière est inondé pour déterminer quel cadavre va dans quel 'compartiment'. C'est arrivé notamment en Caroline du nord et en Géorgie».

Comme membre de la DMORT, elle a participé à l'identification de restes humains dans les fosses communes du Rwanda : «Voyez ici une trace de machette», dit-elle en désignant la photo d'un os entaillé. Elle a même témoigné devant le Tribunal pénal institué par l'ONU pour enquêter sur le génocide.

Elle a aussi passé deux semaines dans les débris du World Trade Center pour identifier des restes humains. Ce fut une des «plus difficiles expériences de ma vie, on faisait des quarts de travail de 13 heures», a-t-elle raconté hier. «Il a fallu tout passer au crible pour trouver des restes, a-t-elle raconté au Toronto Star récemment. S'est alors déployée devant nous une tranche d'une journée parfaitement normale, cristallisée dans la catastrophe. Des permis de conduire, des faire-part de mariage avec des adresses incomplètes, des bagels à moitié mangés.»

«Quel genre de rapport à la mort développe-t-on dans le double métier d'anthropologue et d'écrivaine ?» À cette question, Kathy Reichs se montre soudainement très réservée, préférant l'esquiver en racontant (dans un français plus qu'acceptable) que «pour faire son travail d'anthropologue, il faut placer un mur entre soi et le cadavre», bref, mettre la mort à distance. Son métier, dit-elle, l'amène à être très consciente des ravages de la violence, non seulement sur la victime, mais sur son entourage. Lui vient alors à l'esprit une grand-mère, au Guatemala : Mme Reichs s'est rendue dans ce pays pour travailler à l'identification de corps lancés dans une fosse commune après un massacre durant la guerre civile. «La grand-mère avait quatre filles et neuf petits-enfants dans cette fosse. Elle venait tous les jours voir si on les avait trouvés.» Mais, selon elle, il faut rester de glace si on veut faire le boulot : «S'il faut pleurer, mieux vaut attendre le soir dans sa chambre.»

***

Le Centre des sciences de Montréal présente jusqu'au 28 mars 2005 Autopsie d'un meurtre, une exposition interactive où le visiteur se fait enquêteur.

Publié : lun. janv. 10, 2005 11:01 am
par Intégrale
Je vous recommande ses livres fortement!  Je l'adore  

Publié : lun. janv. 10, 2005 11:48 am
par tuberale
Moi aussi   .......comme j'aurais aimé assister à cette conférence......

Publié : lun. janv. 10, 2005 2:57 pm
par Rénatane
Oui très interessant.....j'ai lu ses 2 premiers....elle est rendue a quoi ? 4 ?

Publié : mar. janv. 11, 2005 1:18 pm
par tuberale
Elle est rendu à 7 livres je crois  

Publié : mer. janv. 12, 2005 2:32 am
par Savvy
Ça me fascine de savoir et de lire tout se qui entoure le travail d'un anthropologue. Bien particulier comme job et on se demande qu'est-ce qui amène une personne à choisir ce travail. En tout cas j'espère qu'elle ne lâchera pas de sitôt son job d'écrivain.

J'en ai lu 6 à date:
Passage mortel
Voyage fatal
Secrets d'Outre-tombe (Ce titre me fait penser aux livres que je lisait adolescente, genre: Histoires de mort-vivants, Histoires à ne pas lire la nuit)
Déjà dead
Mortelles décisions
Les os troubles

Publié : sam. janv. 15, 2005 6:36 pm
par Tallie
Je suis en train de lire Secrets d'Outre-tombe.  Ce livre est très bon à date.  J'aime beaucoup son style d'écriture.  C'est le premier livre que je lis d'elle.  Je vais aller me procurer les autres, c'est certain.  Merci d'avoir partagé ce texte avec nous Tuberale.

Publié : sam. janv. 15, 2005 7:49 pm
par tuberale
Tallie  a écritJe suis en train de lire Secrets d'Outre-tombe.  Ce livre est très bon à date.  J'aime beaucoup son style d'écriture.  C'est le premier livre que je lis d'elle.  Je vais aller me procurer les autres, c'est certain.  Merci d'avoir partagé ce texte avec nous Tuberale.



Ton nick, est-ce à cause de Sadie Tallie?

Publié : jeu. mai 05, 2005 5:55 am
par Tallie
Désolé de faire remonter le sujet, mais j'aimerais savoir si quelqu'un pourrait me dire l'ordre de ses romans (en français).  J'ai lu Secrets d'Outre-tombe est j'ai beaucoup aimé.  J'aimerais lire les autres, mais en ordre.

Pour Tuberale, mon nick n'est pas très original puisque tous les noms que je voulais étaient déjà pris, j'ai pris le premier nom que j'ai entendu à la télé... Et c'est Tallie.  C'est quoi ou qui Sadie Tallie?

Merci à l'avance  

Publié : jeu. mai 05, 2005 5:34 pm
par tuberale
Tallie  a écritDésolé de faire remonter le sujet, mais j'aimerais savoir si quelqu'un pourrait me dire l'ordre de ses romans (en français).  J'ai lu Secrets d'Outre-tombe est j'ai beaucoup aimé.  J'aimerais lire les autres, mais en ordre.

Pour Tuberale, mon nick n'est pas très original puisque tous les noms que je voulais étaient déjà pris, j'ai pris le premier nom que j'ai entendu à la télé... Et c'est Tallie.  C'est quoi ou qui Sadie Tallie?

Merci à l'avance    


C'est une noire qui dans le temps de la ségrégation dans les années 50 quand elle était petit a bravé les interdits en refusant d,aller s,installer dans le fond d'un bus comme l,exigeait le règlement en vigueur dans les petites villes du Sud des États-Unis,etc.... à la Nouvelle-Orléans, il y a beaucoup de chansons de blues qui en parlent....


Pour les livres, sur le net tu vas trouver plusieurs sites qui ont sa bibliographie, en voici un mais il doit y en avoir d,autres plus complets et récents....

http://www.ratsdebiblio.net/reichskathy.html

Publié : ven. mai 06, 2005 7:44 am
par Tallie
Tuberale, je sais de qui tu parles maintenant  Je ne me rappellais pu son nom.  Cette femme a été tellement brave.

Merci beaucoup pour le lien, j'apprécie grandement

Publié : jeu. mai 12, 2005 4:31 am
par Savvy
Kathy Reichs impliquée dans une enquête pas très limpide...
Y'à quelqu'un parmi vous qui aviez eu connaissance du cas du policier Dupont de Trois-Rivières où on laisse entendre que l'auteure aurait trempé dans une falsification de preuves lors d'une ré-autopsie.
Voir : http://affairedupont.8m.com/
http://cafe.rapidus.net/jemoreau/TxtDebut.html

Publié : jeu. mai 12, 2005 6:44 am
par tuberale
Tallie  a écritTuberale, je sais de qui tu parles maintenant  Je ne me rappellais pu son nom.  Cette femme a été tellement brave.

Merci beaucoup pour le lien, j'apprécie grandement


Oui c,est toute une période riche de l,histoire américaine qui a couvert cette période de l'émanticipation des noirs dans le Sud, Sadie Tallie est loin d,avoir été la seule à affronter ainsi ces interdits grotesques mais je crois que son implication religieuse quand elle a grandit a dû créer plusieurs spaumes ou chansons sur son histoire........et c,est probablement ça qu'on repris  les bluesman...