Elise-Gisèle a écrit : Ce matin en entrevue le Dr Sabbah cardiologue à l'hôpital Pierre-Boucher disait qu'il y avait trop de temps entre les 2 doses, il craint l'efficacité du vaccin. Peut-être faudra-il recommencer de zéro? Le délai entre les 2 doses doit être de 21 jours, 4 mois c'est trop long. Le Québec est parmi les seuls pays au monde à agir de la sorte.
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Quels sont les impacts du report de la seconde dose?
Annie Labrecque
Quelles sont les conséquences à court et long terme d’un long délai entre les deux doses de vaccins? Des chercheurs ont modélisé plusieurs scénarios. Résultat? Tout dépend de la robustesse de l’immunité.
Le Canada a choisi de reporter l’administration de la deuxième dose du vaccin contre la COVID-19 pour pallier les difficultés d’approvisionnement et pour protéger rapidement le plus grand nombre de personnes.
«Nous sommes dans une situation où les vaccins sont disponibles en quantité limitée. Si nous avions dès maintenant accès à des milliards de vaccins, la question ne se poserait même pas, nous donnerions les deux doses nécessaires à tout le monde», souligne Caroline Wagner, professeure en bio-ingénierie à l’Université McGill.
Les études cliniques réalisées sur les vaccins ont cependant été effectuées avec l’administration de deux doses à un intervalle déterminé (21 jours pour le vaccin de Pfizer-BioNTech, 28 jours pour celui de Moderna, 28 jours pour celui d’AstraZeneca).
Voyant venir ce nouveau régime vaccinal, où l’on doit patienter plus longtemps que prévu entre les doses, les équipes multidisciplinaires de l’Université McGill et de l’Université Princeton, dont fait partie Caroline Wagner, ont voulu se projeter dans l’avenir en examinant différents scénarios et en évaluant les conséquences sur le degré d’immunité de la population, sachant que beaucoup d’incertitudes demeurent sur la persistance de la protection. L’étude est parue dans Science en mars dernier. La même équipe avait déjà proposé des modélisations de l’épidémie dans les cinq prochaines années.
«Nous avons modélisé l’administration d’une dose en considérant qu’elle entraîne une immunité moins robuste et durable que deux doses», indique Caroline Wagner, co-auteure de cette étude. Dans leur modèle épidémiologique, les chercheurs considèrent qu’à partir d’un certain temps après la première dose, l’immunité s’estompe et que la personne peut être de nouveau vulnérable, à un certain degré, à une infection.
«Notre modèle démontre qu’une seule dose est une bonne chose à court terme, car cela réduit le nombre de cas», souligne la chercheuse, qui suppose que le vaccin administré est bon et qu’il offre une protection pendant un certain temps en attendant la deuxième dose. Ce scénario semble optimal au point de vue épidémiologique.
Cependant, les chercheurs mentionnent que dans le cas où la réponse immunitaire fournie par la première dose serait faible, ils envisagent alors un plus grand nombre d’infections et une évolution virale à plus long terme. Ils ont mis en ligne leur modèle où l’on peut modifier les différents paramètres pour observer l’évolution de l’immunité.
Chose certaine, la chercheuse mentionne que nous sommes loin du pire scénario possible, dans un monde où il n’y aurait pas de bons vaccins. «Il y a des preuves de réinfection au virus, mais il y a aussi des preuves d’une protection immunitaire pendant une période de temps décente», souligne-t-elle.
Idéalement, il faudrait augmenter le nombre de vaccins et les distribuer de manière équitable à travers le monde. «Ce serait le meilleur scénario. Même si le Canada, les États-Unis et l’Europe vaccinent leur population, mais que les infections continuent à circuler dans d’autres parties du monde, l’évolution des variants deviendra problématique et cela réduira à néant nos efforts. C’est vraiment dans l’intérêt de tous d’agir rapidement», confirme Caroline Wagner.
D’après les nouvelles recommandations émises le 16 mars par le Comité consultatif national de l’immunisation, l’intervalle entre la première et la deuxième dose peut aller jusqu’à 16 semaines. Cependant, dans un éditorial publié dans le BMJ, certains experts britanniques s’inquiètent de ce report qui pourrait rendre les personnes âgées plus vulnérables avec la progression des variants.
Dans une étude en prépublication n’ayant pas encore été révisée par les pairs, on indique que ce retard pourrait également affecter les personnes atteintes de tumeurs, qui seraient moins protégées que le reste de la population. Les auteurs en sont venus à ce constat en comparant deux groupes de patients ayant un cancer (151 patients en tout). Ceux ayant reçu une dose affichaient une efficacité immunitaire faible de 40% – contre 90% chez les personnes en santé. Et c’est encore plus faible chez les patients atteints d’un cancer hématologique, avec 15%. Les chercheurs indiquent qu’en recevant le rappel après 21 jours, ce taux augmente à 95%.
De son côté, dans une déclaration publiée le 23 mars, le fabricant Pfizer rappelle «qu’aucune donnée ne permet de démontrer que la protection après la première dose est maintenue après 21 jours».