Deep Throat se révèle
Mise à jour le mercredi 1 juin 2005 à 8 h 42
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Âgé de 91 ans, W. Mark Felt vivrait en Californie.
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W. Mark Felt, un ancien numéro deux du FBI, était le célèbre « Deep Throat », la source à l'origine du scandale du Watergate qui a mené à la démission du président Richard Nixon, le 9 août 1974.
M. Felt a fait cette confidence au magazine Vanity Fair, levant le voile sur son identité après plus de 30 ans de mystère.
Mardi après-midi, le Washington Post a confirmé la nouvelle.
Les journalistes du Washington Post, Bob Woodward et Carl Bernstein, ont toujours promis de ne jamais révéler l'identité de leur source avant sa mort.
Mais la sortie du placard de M. Felt a changé la donne.
Bref rappel de l'affaire Watergate
17 juin 1972: cinq cambrioleurs sont surpris au quartier-général du parti démocrate dans l'immeuble du Watergate à Washington. Ils venaient en fait arranger une installation de micros posés trois semaines plus tôt.
15 septembre 1972: inculpation des cinq « cambrioleurs » et de deux conseillers de la Maison-Blanche, Gordon Liddy et E. Howard Hunt.
6 novembre 1972: réélection triomphale du président républicain Richard Nixon.
7 février 1973: constitution d'une commission d'enquête du Sénat alors que les révélations de la presse, notamment du Washington Post, sur l'implication de la Maison-Blanche dans les écoutes illégales se font de plus en plus précises.
30 avril 1973: démission du ministre de la Justice, Richard Kleindienst, et de proches conseillers du président, H.R. Haldeman et John Ehrlichman, qui seront tous inculpés. Renvoi du conseiller juridique de la Maison-Blanche, John Dean.
25 juin 1973: déposition de John Dean, qui implique le président Nixon et son entourage dans un programme d'espionnage politique.
16 juillet 1973: déposition d'un collaborateur peu connu, qui révèle que le président enregistrait toutes les conversations tenues dans le bureau ovale de la Maison-Blanche.
Le scandale a entraîné la démission de Richard Nixon.
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23 juillet 1973: la commission d'enquêtes réclame certains enregistrements, mais Richard Nixon refuse de les fournir.
20 octobre 1973: le président renvoie le procureur Cox, chargé de l'affaire. Le ministre de la Justice, Elliot Richardson, démissionne en signe de protestation.
30 octobre 1973: ouverture d'une procédure de destitution contre Nixon.
24 juillet 1974: la Cour suprême ordonne au président de remettre les enregistrements aux enquêteurs.
27 juillet 1974: la commission judiciaire de la Chambre des représentants recommande la destitution du président, puis adopte trois chefs d'inculpation contre lui pour obstruction à la justice, abus de pouvoir et refus de se soumettre aux assignations.
9 août 1974: Richard Nixon démissionne.
http://www.radiocanada.ca/nouvelles/Int ... roat.shtml
«Deep Throat» se révèle
Hier, quand j'avais vu ça aux nouvelles, je me suis demandée sur le coup pourquoi ils parlaient d'un film érotique.
C'est quand j'ai vu le vieux monsieur s'avancer, que j'ai compris qu'on ne parlait pas de la même affaire.
Finalement, j'suis contente qu'il ait fait son coming out. Cela évitera sûrement de mauvaises suppositions de la part des journalistes et des criminalistes. Il aura eu le temps de rectifier certains faits.
C'est quand j'ai vu le vieux monsieur s'avancer, que j'ai compris qu'on ne parlait pas de la même affaire.
Finalement, j'suis contente qu'il ait fait son coming out. Cela évitera sûrement de mauvaises suppositions de la part des journalistes et des criminalistes. Il aura eu le temps de rectifier certains faits.
[color=#4040BF][i]Ça, c'est moi. J'ai prêté mon visage à Kate pour qu'elle puisse faire des films.[/i][/color]
Follow the money
Serge Truffaut
Édition du jeudi 2 juin 2005
Trente ans après la démission du président Nixon, l'identité de Deep Throat a été dévoilée. Celui qui avait aiguillé l'enquête menée par les journalistes du Washington Post Carl Bernstein et Bob Woodward dans la foulée du cambriolage commis au Watergate s'appelait donc Mark Felt, numéro deux du FBI au moment des faits. Son rôle a avant tout consisté à guider les pas du duo «Woodstein» dans la très haute administration. Lui orientait, eux fouinaient. «Follow the money», leur recommandait-il.
Le secret ayant été levé, on en sait davantage sur les motivations qui ont convaincu Felt de prendre un risque énorme. Avant tout, il faut rappeler qu'Edgar J. Hoover, dont Felt était le protégé, est mort un mois seulement avant l'infraction du Watergate. À la tête du FBI pendant près de 50 ans, Hoover disait aux présidents quoi faire et non l'inverse. Après la mort de Hoover, Nixon a pris la décision de nommer un politique à la tête du célèbre bureau afin justement de changer radicalement le rapport de force que le très craint Hoover était parvenu à imposer.
Ce changement de culture a, dit-on, fortement ébranlé les convictions de Felt. Observateur scrupuleux des devoirs qui incombent aux serviteurs de l'État, Felt envisageait avec horreur la reprise en main d'un pan important de l'appareil d'État par des élus. Le cafouillage du Watergate mais surtout l'ingérence des politiques dans l'enquête qui s'ensuivit l'ont convaincu de confier à Woodward ce qu'il savait des agissements décidés à la tête du pouvoir exécutif.
Cela étant, on retiendra un des commentaires formulés avant-hier par Carl Bernstein. Lequel ? Que le principe même de la source dont on protège l'identité est sérieusement remis en question aux États-Unis. Par exemple, deux journalistes du New York Times sont passibles d'emprisonnement si la Cour suprême des États-Unis décrète qu'ils doivent rendre public le nom d'une source. S'ils refusent...
Selon Bernstein, si la protection des informateurs avait été questionnée à l'époque de Nixon, jamais ils n'auraient mis au jour les coups tordus que lui et sa garde rapprochée avaient conçus. En ce sens, le Watergate est un cas d'histoire et donc une leçon. Si la possibilité d'utiliser des sources anonymes était amputée, il est évident que le droit du public à l'information serait réduit à une peau de chagrin.
Serge Truffaut
Édition du jeudi 2 juin 2005
Trente ans après la démission du président Nixon, l'identité de Deep Throat a été dévoilée. Celui qui avait aiguillé l'enquête menée par les journalistes du Washington Post Carl Bernstein et Bob Woodward dans la foulée du cambriolage commis au Watergate s'appelait donc Mark Felt, numéro deux du FBI au moment des faits. Son rôle a avant tout consisté à guider les pas du duo «Woodstein» dans la très haute administration. Lui orientait, eux fouinaient. «Follow the money», leur recommandait-il.
Le secret ayant été levé, on en sait davantage sur les motivations qui ont convaincu Felt de prendre un risque énorme. Avant tout, il faut rappeler qu'Edgar J. Hoover, dont Felt était le protégé, est mort un mois seulement avant l'infraction du Watergate. À la tête du FBI pendant près de 50 ans, Hoover disait aux présidents quoi faire et non l'inverse. Après la mort de Hoover, Nixon a pris la décision de nommer un politique à la tête du célèbre bureau afin justement de changer radicalement le rapport de force que le très craint Hoover était parvenu à imposer.
Ce changement de culture a, dit-on, fortement ébranlé les convictions de Felt. Observateur scrupuleux des devoirs qui incombent aux serviteurs de l'État, Felt envisageait avec horreur la reprise en main d'un pan important de l'appareil d'État par des élus. Le cafouillage du Watergate mais surtout l'ingérence des politiques dans l'enquête qui s'ensuivit l'ont convaincu de confier à Woodward ce qu'il savait des agissements décidés à la tête du pouvoir exécutif.
Cela étant, on retiendra un des commentaires formulés avant-hier par Carl Bernstein. Lequel ? Que le principe même de la source dont on protège l'identité est sérieusement remis en question aux États-Unis. Par exemple, deux journalistes du New York Times sont passibles d'emprisonnement si la Cour suprême des États-Unis décrète qu'ils doivent rendre public le nom d'une source. S'ils refusent...
Selon Bernstein, si la protection des informateurs avait été questionnée à l'époque de Nixon, jamais ils n'auraient mis au jour les coups tordus que lui et sa garde rapprochée avaient conçus. En ce sens, le Watergate est un cas d'histoire et donc une leçon. Si la possibilité d'utiliser des sources anonymes était amputée, il est évident que le droit du public à l'information serait réduit à une peau de chagrin.
Du Watergate à la Crise d'octobre - Les crimes de Nixon et de Trudeau 30 ans après
Normand Lester
Commentateur à CKAC et auteur d'Enquêtes sur les services secrets (Éditions de l'Homme, 1998)
Édition du vendredi 3 juin 2005
Tous les médias canadiens et québécois ont consacré une couverture importante à la décision de Mark Felt, ancien numéro 2 du FBI, de s'identifier comme étant «Deep Throat», la source de Woodward et Bernstein qui a largement contribué à la chute de Nixon, l'homme le plus dangereux à avoir accéder à la présidence américaine après George W. Bush.
Pourtant, à ma connaissance, personne n'a relevé que des crimes politiques semblables ont été commis ici au Québec au cours de cette même période du début des années 70. Mais alors qu'aux États-Unis les malfaiteurs étaient d'ex-barbouzes sans statut officiel, les «plombiers du président», ici, les criminels étaient des membres en règle de la police fédérale en service commandé.
Section spéciale
Le gouvernement Trudeau voulait alors empêcher par tous les moyens la montée en puissance du nationalisme québécois. Une section spéciale du service de sécurité de la Gendarmerie royale du Canada était précisément chargée de surveiller et d'infiltrer le Parti québécois. La raison inventée par Marc Lalonde pour réclamer le ciblage du PQ par la GRC était un prétendu financement secret du parti par la France.
Il était pour le moins cocasse qu'un dirigeant du Parti libéral du Canada, qui tirait alors 75 % de ses revenus de subsides de multinationales américaines, s'inquiète des sources de financement étrangères du PQ. Notons que malgré des investigations approfondies, la GRC n'a jamais trouvé le moindre fondement à ce bobard.
Les sbires de Trudeau ont eu recours aux mêmes coups fourrés, aux mêmes dirty tricks que les plombiers de Nixon. Avec les mêmes objectifs : discréditer l'adversaire politique, semer la zizanie, provoquer des luttes internes, des scissions dans les partis et les groupes jugés hostiles à la Maison-Blanche aux États-Unis ou au fédéralisme au Québec.
Ici, on lésinait encore moins sur les moyens qu'à Washington. Non seulement les flics de Trudeau s'adonnaient à des écoutes illégales et à des cambriolages comme les hommes de Nixon aux États-Unis, ils ont aussi eu recours, au Québec, à l'incendie criminel, au vol de dynamite, aux menaces, à l'intimidation, à l'enlèvement et à la séquestration. Et à d'autres crimes qui n'ont jamais été découverts.
Robert Samson
Ici, ce sont les révélations du caporal Robert Samson, de la GRC, qui ont fait éclater le scandale. Samson a été arrêté après qu'une bombe qu'il allait poser chez le propriétaire d'une chaîne de marchés d'alimentation lui eut sauté au visage. À l'enquête du commissaire aux incendies, il devait déclarer, en parlant de la GRC : «J'ai déjà fait pire pour la force.» L'agent secret arrondissait ses fins de mois en accomplissant la nuit, pour la mafia, les mêmes sales boulots qu'il faisait le jour pour la GRC de Trudeau. Comme aujourd'hui dans le scandale des commandites, les méthodes mafieuses étaient courantes pour défendre le fédéralisme et les «hommes d'honneur» frayaient avec les policiers et les politiciens.
Les révélations de Samson allaient entraîner la création par René Lévesque de la commission Keable pour enquêter sur les crimes de la GRC au Québec. Afin de contrer la commission d'enquête québécoise, Trudeau, de son côté, a mis sur pied la commission Macdonald.
À Washington, la Cour suprême allait contraindre Nixon à remettre aux enquêteurs du Congrès des bandes magnétiques et des documents incriminants. Ici, en bonne chienne de garde du fédéralisme, la Cour suprême a refusé aux deux commissions d'enquête l'accès aux directives du cabinet fédéral à la GRC en ce qui concerne sa lutte contre l'affirmation nationale du Québec. On n'a donc jamais pu remonter la filière hiérarchique jusqu'à l'instigateur des actes criminels de la police fédérale.
Ordres d'en haut
J'ai eu l'occasion de recueillir, aux cours des années, les confidences d'hommes qui ont relayé les ordres de commettre certains de ces crimes. Il ne s'agissait pas d'initiatives d'éléments incontrôlés ou d'agents zélés opérant hors cadre à l'insu de leurs supérieurs. Les ordres venaient des plus hautes autorités politiques et policières. Et les états d'âme des «coeurs saignants», M. Trudeau, on le sait, n'en avait rien à cirer.
Un homme intègre, John Starnes, a été «démissionné» comme patron des services secrets de la GRC parce qu'il ne voulait pas que ses agents deviennent les exécuteurs des basses oeuvres du Parti libéral fédéral. Il avait osé protester contre l'immixtion dans ses services de Marc Lalonde, qui jouait alors auprès de Trudeau le rôle qu'Haldeman et Ehrlichman jouaient auprès de Nixon.
Starnes refusait de collaborer avec l'organe de renseignement et d'action que Lalonde pilotait au sein du Parti libéral du Canada. Lalonde exigeait que la police secrète de l'État travaille directement avec celle du parti. Exit Starnes. À sa place, Trudeau a nommé le général Michael Dare, chef des services secrets militaires, disposé, lui, à accomplir toutes les sales besognes politiques que Trudeau et Lalonde exigeaient de leur police secrète.
C'est sous ses ordres que la GRC réussira son coup le plus fumant et le plus ignoble : mettre sur sa liste de paie Claude Morin, le ministre de René Lévesque chargé de préparer le référendum de 1980. Les hommes de main antiquébécois les plus odieux de la bande à Trudeau, Marc Lalonde, André Ouellet et Jean Chrétien, pouvaient rire dans leur barbe. Ces deux dernières mines rébarbatives se retrouvent aujourd'hui dans le scandale des commandites. De quoi faire une belle photo de famille avec leur garde rapprochée constituée de Gagliano, Morselli, Wajsman, Guité et Pelletier.
Aucune sanction
Combien de membres du gang vont voir leur joli minois immortalisé sur une photo d'identité judiciaire ? Très peu, je le crains. Cependant, toujours aussi naïf, je ne désespère pas encore totalement de la GRC.
Dans le scandale du Watergate, plus de 30 politiciens, conseillers politiques, ex-flics et ex-barbouzes ont été reconnus coupables et condamnés à diverses sanctions pénales. Treize d'entre eux se sont retrouvés derrière les barreaux, dont John Mitchell, l'attorney général (ministre de la Justice) des États-Unis.
Ici, aucun des flics criminels et de leurs capos politiques n'a été puni. L'omerta n'a jamais été rompue par un Deep Throat. Au contraire, ils ont obtenu, jusqu'à leur retraite, promotions et récompenses pour services rendus au fédéralisme canadien et au PLC. Et l'instigateur des crimes de la Police montée, lui, a eu un aéroport nommé en sa mémoire. De quoi en faire des gorges chaudes !
Normand Lester
Commentateur à CKAC et auteur d'Enquêtes sur les services secrets (Éditions de l'Homme, 1998)
Édition du vendredi 3 juin 2005
Tous les médias canadiens et québécois ont consacré une couverture importante à la décision de Mark Felt, ancien numéro 2 du FBI, de s'identifier comme étant «Deep Throat», la source de Woodward et Bernstein qui a largement contribué à la chute de Nixon, l'homme le plus dangereux à avoir accéder à la présidence américaine après George W. Bush.
Pourtant, à ma connaissance, personne n'a relevé que des crimes politiques semblables ont été commis ici au Québec au cours de cette même période du début des années 70. Mais alors qu'aux États-Unis les malfaiteurs étaient d'ex-barbouzes sans statut officiel, les «plombiers du président», ici, les criminels étaient des membres en règle de la police fédérale en service commandé.
Section spéciale
Le gouvernement Trudeau voulait alors empêcher par tous les moyens la montée en puissance du nationalisme québécois. Une section spéciale du service de sécurité de la Gendarmerie royale du Canada était précisément chargée de surveiller et d'infiltrer le Parti québécois. La raison inventée par Marc Lalonde pour réclamer le ciblage du PQ par la GRC était un prétendu financement secret du parti par la France.
Il était pour le moins cocasse qu'un dirigeant du Parti libéral du Canada, qui tirait alors 75 % de ses revenus de subsides de multinationales américaines, s'inquiète des sources de financement étrangères du PQ. Notons que malgré des investigations approfondies, la GRC n'a jamais trouvé le moindre fondement à ce bobard.
Les sbires de Trudeau ont eu recours aux mêmes coups fourrés, aux mêmes dirty tricks que les plombiers de Nixon. Avec les mêmes objectifs : discréditer l'adversaire politique, semer la zizanie, provoquer des luttes internes, des scissions dans les partis et les groupes jugés hostiles à la Maison-Blanche aux États-Unis ou au fédéralisme au Québec.
Ici, on lésinait encore moins sur les moyens qu'à Washington. Non seulement les flics de Trudeau s'adonnaient à des écoutes illégales et à des cambriolages comme les hommes de Nixon aux États-Unis, ils ont aussi eu recours, au Québec, à l'incendie criminel, au vol de dynamite, aux menaces, à l'intimidation, à l'enlèvement et à la séquestration. Et à d'autres crimes qui n'ont jamais été découverts.
Robert Samson
Ici, ce sont les révélations du caporal Robert Samson, de la GRC, qui ont fait éclater le scandale. Samson a été arrêté après qu'une bombe qu'il allait poser chez le propriétaire d'une chaîne de marchés d'alimentation lui eut sauté au visage. À l'enquête du commissaire aux incendies, il devait déclarer, en parlant de la GRC : «J'ai déjà fait pire pour la force.» L'agent secret arrondissait ses fins de mois en accomplissant la nuit, pour la mafia, les mêmes sales boulots qu'il faisait le jour pour la GRC de Trudeau. Comme aujourd'hui dans le scandale des commandites, les méthodes mafieuses étaient courantes pour défendre le fédéralisme et les «hommes d'honneur» frayaient avec les policiers et les politiciens.
Les révélations de Samson allaient entraîner la création par René Lévesque de la commission Keable pour enquêter sur les crimes de la GRC au Québec. Afin de contrer la commission d'enquête québécoise, Trudeau, de son côté, a mis sur pied la commission Macdonald.
À Washington, la Cour suprême allait contraindre Nixon à remettre aux enquêteurs du Congrès des bandes magnétiques et des documents incriminants. Ici, en bonne chienne de garde du fédéralisme, la Cour suprême a refusé aux deux commissions d'enquête l'accès aux directives du cabinet fédéral à la GRC en ce qui concerne sa lutte contre l'affirmation nationale du Québec. On n'a donc jamais pu remonter la filière hiérarchique jusqu'à l'instigateur des actes criminels de la police fédérale.
Ordres d'en haut
J'ai eu l'occasion de recueillir, aux cours des années, les confidences d'hommes qui ont relayé les ordres de commettre certains de ces crimes. Il ne s'agissait pas d'initiatives d'éléments incontrôlés ou d'agents zélés opérant hors cadre à l'insu de leurs supérieurs. Les ordres venaient des plus hautes autorités politiques et policières. Et les états d'âme des «coeurs saignants», M. Trudeau, on le sait, n'en avait rien à cirer.
Un homme intègre, John Starnes, a été «démissionné» comme patron des services secrets de la GRC parce qu'il ne voulait pas que ses agents deviennent les exécuteurs des basses oeuvres du Parti libéral fédéral. Il avait osé protester contre l'immixtion dans ses services de Marc Lalonde, qui jouait alors auprès de Trudeau le rôle qu'Haldeman et Ehrlichman jouaient auprès de Nixon.
Starnes refusait de collaborer avec l'organe de renseignement et d'action que Lalonde pilotait au sein du Parti libéral du Canada. Lalonde exigeait que la police secrète de l'État travaille directement avec celle du parti. Exit Starnes. À sa place, Trudeau a nommé le général Michael Dare, chef des services secrets militaires, disposé, lui, à accomplir toutes les sales besognes politiques que Trudeau et Lalonde exigeaient de leur police secrète.
C'est sous ses ordres que la GRC réussira son coup le plus fumant et le plus ignoble : mettre sur sa liste de paie Claude Morin, le ministre de René Lévesque chargé de préparer le référendum de 1980. Les hommes de main antiquébécois les plus odieux de la bande à Trudeau, Marc Lalonde, André Ouellet et Jean Chrétien, pouvaient rire dans leur barbe. Ces deux dernières mines rébarbatives se retrouvent aujourd'hui dans le scandale des commandites. De quoi faire une belle photo de famille avec leur garde rapprochée constituée de Gagliano, Morselli, Wajsman, Guité et Pelletier.
Aucune sanction
Combien de membres du gang vont voir leur joli minois immortalisé sur une photo d'identité judiciaire ? Très peu, je le crains. Cependant, toujours aussi naïf, je ne désespère pas encore totalement de la GRC.
Dans le scandale du Watergate, plus de 30 politiciens, conseillers politiques, ex-flics et ex-barbouzes ont été reconnus coupables et condamnés à diverses sanctions pénales. Treize d'entre eux se sont retrouvés derrière les barreaux, dont John Mitchell, l'attorney général (ministre de la Justice) des États-Unis.
Ici, aucun des flics criminels et de leurs capos politiques n'a été puni. L'omerta n'a jamais été rompue par un Deep Throat. Au contraire, ils ont obtenu, jusqu'à leur retraite, promotions et récompenses pour services rendus au fédéralisme canadien et au PLC. Et l'instigateur des crimes de la Police montée, lui, a eu un aéroport nommé en sa mémoire. De quoi en faire des gorges chaudes !