Bouchard s'invite à la rentrée parlementaire

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tuberale
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Bouchard s'invite à la rentrée parlementaire



Antoine Robitaille
Édition du mercredi 18 octobre 2006



Québec -- L'ancien premier ministre Lucien Bouchard a beau avoir tiré un trait sur la vie politique, il a bien malgré lui participé à la rentrée parlementaire hier, en raison de propos tenus à TVA lundi. «On ne travaille pas assez. On travaille moins que les Ontariens, infiniment moins que les Américains! Il faut qu'on travaille plus», avait-il déclaré.
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tuberale
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Lucien Bouchard

Des propos qui font des vagues



Les propos de Lucien Bouchard font des vagues. Lundi, dans le cadre d'un entretien accordé au réseau TVA, l'ancien premier ministre a déploré le fait que les Québécois travaillaient moins, statistiquement, que les Ontariens et les Américains. Il voyait là un problème de productivité qui nuit à la prospérité de la province.

Les principales organisations syndicales du Québec n'ont pas tardé à répliquer. Propos alarmistes, réflexion simpliste, clament-ils.

Le président de la FTQ, Henri Massé, admet que le Québec a un problème de productivité, mais selon lui, les solutions sont autres que celles identifiées par M. Bouchard. Il faut plutôt investir en recherche et développement, dans le renouvellement du parc technologique et dans l'innovation, explique-t-il.

La présidente de la CSN, Claudette Carbonneau, déplore quant à elle « l'analyse superficielle » de M. Bouchard. Elle souligne que derrière la réalité statistique de son analyse se cachent le « temps partiel involontaire », les employés à statut précaire, sur appel, ceux qui sont en chômage et qui subissent des mises à pied.

Mario Dumont partage les inquiétudes de Bouchard

Mario Dumont croit quant à lui que Lucien Bouchard touche la cible en s'inquiétant du taux de productivité de la main-d'oeuvre québécoise.

« Oui, il faut un effort collectif plus grand », a dit le chef de l'Action démocratique du Québec en point de presse à l'Assemblée nationale. « Ce sont des données qui sont prouvées et bien documentées, a-t-il mentionné. Il y a 20 ans, l'écart de productivité entre le Québec et les États-Unis était minime. Aujourd'hui, cet égard s'est considérablement agrandi. »

Résultat: le niveau de vie des Québécois régresse « année après année », alors que la classe moyenne se retrouve « égorgée » par les taxes et les impôts, déplore M. Dumont. Selon lui, c'est la société entière qui est à blâmer, en commençant par les gouvernants.

« Ce n'est pas seulement le travail des gens. Il faut développer notre hydroélectricité, il faut que le gouvernement cesse de gaspiller, il faut que l'on pose des gestes plus responsables », a-t-il dit.

Le milieu des affaires derrière l'ex-premier ministre

L'analyse de Lucien Bouchard a été saluée par le milieu des affaires québécois.


« Je le trouve courageux de dire cela. Le gars n'a pas besoin de ça, ça ne lui rapportera rien personnellement », a opiné le président du Conseil du patronat du Québec, Michel Kelly-Gagnon.

« Il pourrait bien se contenter de rester dans son petit coin à facturer des honoraires élevés et à rester calme, sans trouble et sans vagues. Il se donne la peine de parler. Pour moi, ça démontre son amour du Québec. Lucien Bouchard, c'est quelqu'un qui aime profondément le Québec et les Québécois », a-t-il ajouté.

Richard Fahey, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, a également défendu le point de vue que M. Bouchard. « La raison pour laquelle les heures travaillées constituent un problème, c'est parce qu'on est moins riches au Québec. On a une grosse dette, beaucoup de services à assumer et de moins en moins de monde pour les payer », a commenté M. Fahey.



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Malike
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Message par Malike »

À mon avis, si M.Bouchard tient à s'incruster dans la vie politique il devrait se présenter dans un comté. J'ai beaucoup admiré l'homme politique qu'il était, mais je trouve qu'il devrait imiter messieurs Parizeau et Landry et cesser de se faire aussi critique et cynique. Il ne se fait pas porteur d'espoir mais plutôt prophète de malheur. Il a un jour été au pouvoir et en mesure de changer les choses, pourquoi ne l'a-t-il pas fait à ce moment, ca aurait été bien plus constructif à mon avis.
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brunetta
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Message par brunetta »

Malike  a écritÀ mon avis, si M.Bouchard tient à s'incruster dans la vie politique il devrait se présenter dans un comté. J'ai beaucoup admiré l'homme politique qu'il était, mais je trouve qu'il devrait imiter messieurs Parizeau et Landry et cesser de se faire aussi critique et cynique. Il ne se fait pas porteur d'espoir mais plutôt prophète de malheur. Il a un jour été au pouvoir et en mesure de changer les choses, pourquoi ne l'a-t-il pas fait à ce moment, ca aurait été bien plus constructif à mon avis.  
D'autant plus que c'est sous son mandat que la semaine de 44hrs a été ramené à 40hrs.

L'homme politique qu'il a été je n'ai rien à redire mais les affirmations qu'il a faîtes sont déplacées à mon avis. La vie de famille n'a plus de place dans la société actuelle, les parents manquent de temps avec leurs enfants et ensuite on se demande pourquoi le taux de natalité est si bas.

Pourquoi toujours vouloir nous comparer aux autres? C'ESt pas parce qu'un Ontarien va aller se jeter en bas du pont que je suis obligé de faire pareil
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Malike
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Message par Malike »

C'est vrai et peut-être que ca va sembler cynique aussi de ma part mais il me semble que les babyboomers ont assez décidé et qu'il serait grand temps que la parole revienne à notre génération quant à nos choix de vie futures.
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Tibibi
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Message par Tibibi »

Malike  a écritC'est vrai et peut-être que ca va sembler cynique aussi de ma part mais il me semble que les babyboomers ont assez décidé et qu'il serait grand temps que la parole revienne à notre génération quant à nos choix de vie futures.
Wooooooooooo !!!!!!  C'est rendu qu'on crache sur la main de la personne qui nous a nourris ?????

"Que les vieux de 50 ans et plus se ferment la gueule, les jeunes veulent décider.  De toutes façon, ils coûtent cher à la société et ne servent pas à grand chose, si ce n'est de nuire à nos choix de vie."

Faut pas oublier que vous, les jeunes, aurez 50 ans aussi, éventuellement.

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Malike
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Message par Malike »

Tibibi  a écrit
Wooooooooooo !!!!!!  C'est rendu qu'on crache sur la main de la personne qui nous a nourris ?????

"Que les vieux de 50 ans et plus se ferment la gueule, les jeunes veulent décider.  De toutes façon, ils coûtent cher à la société et ne servent pas à grand chose, si ce n'est de nuire à nos choix de vie."

Faut pas oublier que vous, les jeunes, aurez 50 ans aussi, éventuellement.



Je ne crache sur personne et loin de moi de dire qu'ils sont bons à mettre au rancart, je dis simplement que nous ne sommes pas très représentés ni suffisamment entendus, point à la ligne.

Je pense qu'il est tout à fait dans l'ordre des choses que de passer le flambeau à la prochaine génération mais on dira ce qu'on voudra, ce sont encore les boomers qui détiennent les postes de décision. Les boomers ont aussi un jour revendiqué la même chose de leurs aînés, comme le feront aussi nos enfants un jour.

C'est quand même nous et nos enfants qui sommes les futurs payeurs alors pourquoi on aurait pas notre mot à dire sur ce qui nous a été légué et dont nous avons quand même bénéficié même si on peut quasiment dire que c'est terminé les largesses.

Est-ce qu'on peut parler des boomers sans s'attirer des commentaires de ce genre, y a personne qui dit qu'on crache sur l'expérience, mais ca serait l'fun qu'on puisse cohabiter dans les décisions qui nous concernent.
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soline
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Message par soline »

La main qui nous a nourrit, c'est fort en ti pépé comme expression, j'ai plus l'impression qu'une part de l'épicirie en question a été mise sur MA carte de crédit et que c'est moi qui devra rembourser cette part un jour  ;)

Je crois que toute les générations doivent être impliqués et non seulement la plus nombreuse. --Message edité par soline le 2006-10-18 14:44:55--
Red Ketchup
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Message par Red Ketchup »

Au Québec, nous travaillons en moyenne plus d'heures par semaine que la plupart des pays européens, l'Angleterre compris.

Ça ne sert à rien de parler d'augmenter les heures de ceux qui travaillent tant que le taux de chômage n'a pas atteint un taux de 5% ou moins.

En fait, il y a au Québec des gens qui travaillent beaucoup plus que leur 40 heures et d'autres qui sont confinés à des temps partiels.

Peut-être qu'un ajustement entre les deux serait une solution plus plausible?

Et pour moi, Lucien Bouchard est un conservateur dont je n'adhère pas à la philosophie. Le seul temps où j'ai apprécié Bouchard est lors de la campagne référendaire où il avait le don de stimuler les gens.

Mais comme chef du PQ et comme PM....on repassera....c'est pas du tout mon homme.
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lucide
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Message par lucide »

soline  a écritLa main qui nous a nourrit, c'est fort en ti pépé comme expression, j'ai plus l'impression qu'une part de l'épicirie en question a été mise sur MA carte de crédit et que c'est moi qui devra rembourser cette part un jour  ;)

Je crois que toute les générations doivent être impliqués et non seulement la plus nombreuse.  

J'aimerais bien voir quelle part d'épicerie..... il me semble que j'ai payé ma part et que je la paie encore...
Les frais de scolarité sont les mêmes aujourd'hui que lorsque j'y suis allée il y a près de vingt ans, on vivait 4 dans  et demi , on avait pas d'automobiles et on mangait souvent du paté chinois.
Mes enfants avaient pas les garderies à 5 dollars mais plutôt 15 dollards par jour.
J'ai acheté ma première automobile au taux de 22% c'était le taux du temps. On achetait pas aujourd'hui payer demain, personne en avait les moyens même pas les fournisseurs.

J'ai eu le droit à 17 semaines de chomâge lors de mes accouchements et mon chum à 5 jours de congé pour devenir père.

Quand j'ai commencé à travailler la CSST, la SAAQ , l'assurance médicaments n'existaient pas, on s'arrangait avec nos affaires.

Ce n'est pas les baby boomers qui ont voulu une société plus de gauche..... mais la génération suivante à qui ca plait tres bien de dépenser l'argent que j'ai donné depuis tout ce temps au gouvernement.... et qui de surplus voudrait bien dépensé celle que j'ai économisé.
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tuberale
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«La solidarité passe par la lucidité» - Un an après la parution de son manifeste, Lucien Bouchard réédite son appel pour une société responsable

Alexandre Shields
Édition du vendredi 20 octobre 2006




Au nom des générations futures, les Québécois doivent «jeter un regard sans complaisance» sur leur réalité, soutient Lucien Bouchard, sans quoi ils sont condamnés à être à la remorque du monde développé. Un an après la parution du manifeste des lucides, l'ancien premier ministre est toujours aussi convaincu que le Québec se réfugie dans le «déni» et tarde à comprendre que «la solidarité passe par la lucidité».

Un an après la parution du manifeste Pour un Québec lucide, Lucien Bouchard est toujours aussi inquiet pour l'avenir du Québec. Il a donc renouvelé hier son appel pressant à une prise de conscience collective des défis auxquels la province fait face. Selon lui, le choix est clair : soit on continue de «tourner en rond dans une douce pente descendante, soit on prend notre essor vers les sommets vers lesquels nous destinent nos attentes, nos ressources et le long courage de nos ancêtres».

«Le Québec est véritablement confronté à la problématique décrite par le manifeste. L'état de situation est dressé, la photographie est prise», a-t-il soutenu après une année de débats sur la question, et les Québécois ne peuvent plus se permettre de se «réfugier dans le déni et l'immobilisme».

M. Bouchard a d'ailleurs affirmé que la société québécoise a beaucoup trop tendance à «éviter le moindre remous, [à] ne rien entreprendre sans avoir convaincu le dernier opposant [et à] se soumettre inconditionnellement à la dictature du principe de précaution». Selon lui, l'abandon du projet du CHUM à Outremont ou celui du déménagement du casino dans le sud-ouest de Montréal sont autant de «manifestations d'un inquiétant désarroi».

Il a ainsi dit souhaiter que les jeunes de la génération montante «résisteront à un tel désarroi et à une société qui fait du surplace». En l'état actuel des choses, M. Bouchard avertit également que «la génération qui viendra après nous [devra affronter] l'héritage empoisonné d'une dette de 118 milliards de dollars».



Il faut donc rapidement, selon l'ancien premier ministre, amener le Québec à «regarder ce qu'il refuse de voir» sans attendre «l'électrochoc de la crise» qui guette la province en raison du choc démographique à venir et de sa perte de compétitivité dans un contexte de mondialisation économique. Bref, après avoir dressé l'état de la situation, «il faut qu'on se réveille», a-t-il affirmé lors de son allocution, prononcée en clôture du colloque «Notre avenir : un dialogue public», qui se tenait hier à l'université McGill afin de marquer l'anniversaire de la publication du manifeste des «lucides».

Pour parvenir à sortir la province du marasme que perçoivent les lucides, M. Bouchard a fait valoir hier qu'il fallait «rouvrir le chantier du Québec» pour se lancer dans «des projets structurants». Il a notamment cité comme exemples les barrages de la Baie-James, mais aussi l'Expo 67. «Ce que j'ai connu, c'est un Québec qui construisait. À l'époque, on admirait les politiciens qui construisaient le Québec dont on hériterait, a-t-il témoigné. Il faudrait pouvoir faire la même chose» pour la génération à venir. Il a ajouté avoir confiance en la classe politique actuelle pour instaurer des changements salutaires.

Le porte-étendard des lucides a d'ailleurs interpellé hier les intellectuels et le milieu de l'éducation, «qui ont joué un rôle primordial dans la Révolution tranquille». Le bouillonnement culturel et intellectuel qui a marqué cette époque, «on ne le sent pas aujourd'hui», a-t-il déploré en conférence de presse.

Les syndicats doivent également faire partie de «la démarche globale», selon lui, pour autant qu'ils acceptent de s'adapter à la réalité des marchés mondialisés, faisant référence à la compétition féroce des économies asiatiques. Réitérant que les citoyens d'ici travaillaient moins qu'aux États-Unis ou en Ontario, il a estimé que le «régime désincitatif» qui fait que les Québécois travaillent moins devait être revu.

Lucides contre solidaires


L'ancien premier ministre a du coup décoché quelques flèches en direction des solidaires, des gens qui pensent, selon lui, détenir «l'apanage de la compassion». «Aucune vision d'avenir n'est possible si on ne commence pas à regarder en face la réalité d'aujourd'hui, a-t-il lancé d'entrée de jeu. L'optimisme, ce n'est pas de regarder la réalité avec des lunettes roses, pour voir tomber la pluie en couleur. C'est oser faire le point et jeter un regard sans complaisance sur nous-mêmes. En termes crus, c'est se regarder dans le miroir plutôt que de se contempler le nombril.»

M. Bouchard a aussi estimé que le débat qui a cours depuis un an entre lucides et solidaires a été caractérisé par la «rectitude morale où le bon rôle ne [leur] était pas réservé». Il a soutenu que son groupe a été littéralement «cantonné dans l'égoïsme comptable» par ceux qui se réclament de la «générosité compatissante». Il a même repris le terme «solidaire» à son compte, estimant que «la solidarité passe par la lucidité».

Il a refusé en outre l'étiquette de «droite», qui n'aurait semble-t-il servi qu'à «démoniser l'interlocuteur» dans l'actuel débat sur l'avenir de la province. Lucien Bouchard a du même souffle demandé si l'on devait considérer René Lévesque comme à droite parce qu'il a dû prendre des mesures budgétaires difficiles et imposer des conditions de travail aux salariés de l'État, en 1981, suscitant l'opprobre syndical.

Par ailleurs, l'ancien chef péquiste a refusé d'entrer dans le débat constitutionnel, se contentant de dire que les défis auxquels est confrontée la société québécoise demeuraient les mêmes peu importe que le Québec reste à l'intérieur du Canada ou en sorte.



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tuberale
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Le vain duel entre lucides et solidaires
Michel Venne
Édition du lundi 23 octobre 2006



L'opposition entre «lucides» et «solidaires» commence à tourner à vide, ne trouvez-vous pas? Ce duel est né de la publication, il y a un an, du manifeste Pour un Québec lucide et du Manifeste pour un Québec solidaire.

Le débat entre ces deux catégories est devenu vain, parce que la lucidité et la solidarité sont des attitudes, et non des idéologies, et que celles-ci ne sont pas contradictoires en soi. Cela explique d'ailleurs pourquoi les «lucides» se disent aussi solidaires que les «solidaires», lesquels se réclament de la lucidité autant que les autres.

C'est avec lucidité que Richard Desjardins a dénoncé, avec Robert Monderie, dans L'Erreur boréale, l'évolution suicidaire de l'industrie forestière au Québec.

C'est par solidarité avec les générations futures que le président du Mouvement Desjardins, Alban D'Amours, a recommandé, l'an dernier, une hausse des tarifs d'électricité afin de réduire la dette du Québec.

Ni l'un ni l'autre ne sont du groupe original de signataires de l'un ou l'autre des manifestes. Lequel, croyez-vous, auraient-ils choisi ? Cela n'a aucune importance.

Selon mon Petit Robert, lucide veut dire : clair, lumineux, qui perçoit, comprend, exprime les choses avec clarté et perspicacité. Lucide est synonyme de clairvoyant et le contraire d'aveugle, dément ou passionné.

Solidaire se dit de personnes qui se sentent liées par une responsabilité et des intérêts communs. C'est synonyme de se serrer les coudes. La solidarité est une forme de dépendance mutuelle.

On notera au passage que la solidarité n'est pas la compassion, terme employé par Lucien Bouchard, la semaine dernière. Compassion vient du latin compati, qui veut dire «souffrir». La compassion, c'est en quelque sorte, souffrir ensemble. C'est le sentiment qui porte à plaindre et partager les maux d'autrui, un apitoiement, une pitié. André Boisclair dirait sans doute que la compassion fait partie de notre «vieux fond judéo-chrétien».


Les vocables «lucide» et «solidaire» ne suffisent pas à décrire une façon particulière de voir le monde. Leur utilisation a relevé, depuis un an, de l'abus de langage.



***

Les instigateurs du Manifeste pour un Québec solidaire ont formé un parti politique. Cela ne rend pas l'usage du mot solidaire plus spécifique pour autant et d'aucuns peuvent à raison prétendre à une usurpation du concept de solidarité. Québec Solidaire est un parti socialiste, social-démocrate, libéral ou quoi ? Bref, quelle est son idéologie ? Veut-il rompre avec le capitalisme ou le civiliser ? Et comment ?

Les auteurs du manifeste Pour un Québec lucide ne sont pas plus clairs quant à l'idéologie qu'ils soutiennent. Conservatisme ou social-démocratie ? Pour en juger, il faudrait un programme complet qui aborde toutes les facettes de la gouverne. C'est seulement en la situant dans un ensemble de mesures fiscales et budgétaires que l'on peut juger de l'effet d'une hausse de tarifs ou une baisse de taxes.

Sans Lucien Bouchard, jamais ce texte n'aurait tant fait parler de lui. La même remarque vaut pour Françoise David. Il est le seul à pouvoir continuer à le défendre sans que personne ose lui reprocher de s'acharner, comme s'il s'agissait d'un combat personnel. Sauf Jacques Parizeau, bien sûr.

La semaine dernière, quand M. Bouchard a reproché aux Québécois de travailler trop peu, en comparaison des autres Nord-Américains, l'un des signataires de son manifeste, Pierre Fortin, a réagi avec prudence. M. Bouchard avait-il raison ? «Je ne sais pas», a répondu l'économiste, poliment, sans appuyer les affirmations de l'ancien chef du Parti québécois.

En fait, M. Fortin sait très bien que, dans les sociétés occidentales, les populations cherchent à se libérer du travail plutôt que de s'y ruiner la vie. Le jour même, d'ailleurs, Santé Canada dévoilait des chiffres alarmants sur le nombre de Canadiens souffrant de problèmes de dépression liés à leur emploi. Il sait aussi qu'on a plus de chances d'accroître la productivité de nos entreprises par l'investissement dans la machinerie et les nouvelles technologies, par l'éducation et la formation de la main-d'oeuvre, que par une augmentation du nombre d'heures travaillées par semaine.

***

Aucune des solutions prônées par le groupe n'a été reprise par un parti politique apte à prendre le pouvoir : le dégel des droits de scolarité est toujours écarté; Hydro-Québec ne demande qu'une faible augmentation de ses tarifs pour 2007; la question de la dette a été noyée dans le Fonds des générations; personne n'ose proposer un régime de revenu minimum garanti. Le reste à l'avenant.

Les Québécois se voient offrir quatre voies idéologiques dans l'univers partisan, de droite à gauche, entre l'Action démocratique, le Parti libéral, le Parti québécois et Québec Solidaire. C'est entre ces options que les électeurs choisiront.

M. Bouchard aura pu, dès lors, influencer leur choix. Ceux qui lui font confiance pourront donner leur appui à un parti dont le programme se rapproche le plus de ses propositions. Si tel était le cas, l'ADQ battrait des records. Mais l'influence de M. Bouchard ne tiendra-t-elle pas davantage aux sentiments contrastés qu'il suscite dans la population qu'aux idées qu'il avance ? Aussi, à défaut de prendre position lui-même clairement, son influence sera des plus diffuses.

Il y a des personnes lucides et solidaires dans tous les partis, qui donnent chacune leur définition à ces deux expressions. Deux mots qui peuvent devenir des paravents commodes à des idéologies qui refusent de s'afficher, et que nous devrions cesser, au nom de la clarté des débats publics, d'ériger en catégories politiques.

michel.venne@inm.qc.ca




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