UNE ÉPOQUE «DÉBOUSSOLANTE»
Les hommes font face à un choc des valeurs important
Thomas Gervais
La Presse
Comment ça va les hommes? Une batterie de spécialistes d'ici et d'ailleurs se sont mobilisés hier pour débattre de la question à la journée conférences organisée par La Presse et Radio-Canada. Mais c'est la réaction de l'auditoire qui en a dit le plus long sur ce sujet qui soulève de plus en plus les passions.
Le débat s'est ouvert sur un constat de moins en moins surprenant. Quatre fois plus de suicides masculins que féminins. Décrochage marqué chez les garçons. Délaissement graduel des bancs universitaires. Difficultés à concilier travail et vie de famille, etc. L'homme assiste, impuissant, à la transformation de son rôle social à une vitesse vertigineuse.
«Il y a un siècle, 75% des hommes gagnaient leur vie avec leur corps. Aujourd'hui, 75% des activités professionnelles sont associées à la tête», explique Charles-Henri Amherdt, professeur de psychologie à l'Université de Sherbrooke. Selon ce conférencier, les valeurs qui faisaient le succès du père de famille d'antan, telles que la force physique et l'austérité, ont perdu leur importance face à la finesse et l'expression juste des émotions. L'homme en devient déboussolé.
Codes de masculinité
William Pollack, psychiatre au Harvard Medical School et invité d'honneur, abonde dans son sens. Selon lui, plusieurs hommes modernes souffrent en silence parce qu'ils doivent se conformer aux codes de masculinité désuets de leurs pères (les grands garçons ne pleurent pas, fais un homme de toi, etc..) «Lorsqu'un candidat à la présidence a versé une larme à la télé dans un contexte émouvant, j'ai eu une dizaine d'appels d'électeurs me demandant si c'était normal», a dit en riant l'auteur du best-seller américain: De vrais gars: sauvons nos fils des mythes de la masculinité.
Dans une société qui se dit égalitaire, il faut tout de même reconnaître que les hommes n'expriment pas leurs émotions de la même façon que les femmes, explique Rose-Marie Charest, présidente de l'Ordre des psychologues du Québec. Bien souvent, pour une même émotion ressentie, là où les larmes jailliraient chez elle, c'est la colère qui prend le dessus chez lui. «Il faut arrêter d'étouffer l'agressivité chez les petits garçons, dit-elle. Il y a une importante distinction à faire entre l'agressivité et la violence.»
Et c'est précisément par la colère et l'indignation que l'auditoire, composé surtout d'hommes d'âge mûr, a exprimé sa contrariété face aux propos de certains spécialistes. Le passage de la féministe Ariane Émond a poussé l'indignation à son paroxysme quand elle a soutenu que «le machisme tue chaque jour, alors que le féminisme n'a jamais tué personne».
Abus de langage
Plusieurs spectateurs en ont profité pour rappeler avec véhémence ce qu'ils décrivaient comme un abus de langage des féministes. «Tout ce qu'on réclame, c'est l'équité entre les mouvements d'hommes et de femmes», explique Jean-Pierre Gagnon, membre de l'ONG Après-rupture, dont les propos ont été recueillis dans la salle. Aucun représentant d'organismes de soutien aux hommes n'avait d'ailleurs été invité à prendre la parole à l'événement.
Malgré les tensions symptomatiques d'un malaise social grandissant, la conférence s'est déroulée dans le respect des différences. Pour Daniel Laforest, président de Fathers-4-Justice, organisme reconnu pour ses coups d'éclat, il est grand temps que les difficultés et la souffrance des hommes soient discutées publiquement. «Les hommes ont le droit de créer leur propre opinion sur leur condition au lieu de suivre celle des féministes, dit-il. Cette conférence est une excellente façon d'amorcer le débat.»
Les hommes font face à un choc des valeurs important
MARIE-CLAUDE LORTIE
Déprimés, les gars?
Marie-Claude Lortie
La Presse
Il y avait beaucoup d'hommes pas contents, hier, à la conférence La Presse-Radio-Canada, intitulée «Comment ça va, les hommes?».
Ils n'étaient pas sur scène, où on a plutôt entendu des hommes cool, parfois remplis d'autodérision. Les irrités étaient plutôt dans la salle.
Certains sont allés au micro pour parler de la triple castration de l'homme québécois dans l'histoire. D'autres ont accusé la «machine» d'être contre les hommes. Il y en a un aussi qui a demandé si l'homosexualité n'était pas un symptôme du rejet des hommes par les femmes...
Et il y a ceux qui ont déclenché un certain malaise dans la salle en criant «mensonge!» à tue-tête pendant qu'Ariane Émond, une féministe, faisait sa présentation. Oui, il y avait dans cette salle quelques gars fru' contre les femmes.
«Je dis souvent aux hommes que s'ils sont fâchés et qu'ils vocifèrent, ils auront de la difficulté à convaincre quiconque qu'ils peuvent être des pères nourriciers», m'a répondu William Pollack, le conférencier-vedette du déjeuner causerie, quand je lui demandé ce qu'il pensait de Fathers 4 Justice et des autres masculinistes bruyants.
Mais l'irritabilité, a-t-on aussi appris durant la conférence, est au centre de la vie des hommes. Elle augmente avec l'âge, nous a dit le communicateur Jacques Languirand. Et elle fait partie des symptômes de la dépression masculine, avance M. Pollack, un psychologue et clinicien spécialiste des questions masculines à Harvard.
Les autres symptômes que le chercheur étudie actuellement? Une propension à faire des gestes d'éclat et la recherche d'aventures sexuelles.
Les hommes fâchés qui ont inscrit la détresse masculine sur la place publique depuis quelques années seraient-ils donc, foncièrement, des gars déprimés?
Notre société change tellement vite qu'on a de la difficulté à s'adapter. On est passé en un éclair d'un univers où les hommes devaient travailler de leurs mains, nourrir leur famille et être prêts à la guerre, à un monde où les gars doivent étudier, rester assis au bureau, partager les tâches ménagères et l'éducation des enfants et gérer des attentes conjugales et des stress professionnels inconnus de leurs pères. Les femmes ne sont pas à l'abri de la déprime et des difficultés d'adaptation. Loin de là. Mais comme elles ont toujours été traditionnellement les patientes et les hommes leurs psys, on sait mieux comment les aider. Les hommes, eux, cherchent encore les mots pour le dire.
Et en attendant, pour certains, ça n'a pas l'air d'aller trop bien.
Déprimés, les gars?
Marie-Claude Lortie
La Presse
Il y avait beaucoup d'hommes pas contents, hier, à la conférence La Presse-Radio-Canada, intitulée «Comment ça va, les hommes?».
Ils n'étaient pas sur scène, où on a plutôt entendu des hommes cool, parfois remplis d'autodérision. Les irrités étaient plutôt dans la salle.
Certains sont allés au micro pour parler de la triple castration de l'homme québécois dans l'histoire. D'autres ont accusé la «machine» d'être contre les hommes. Il y en a un aussi qui a demandé si l'homosexualité n'était pas un symptôme du rejet des hommes par les femmes...
Et il y a ceux qui ont déclenché un certain malaise dans la salle en criant «mensonge!» à tue-tête pendant qu'Ariane Émond, une féministe, faisait sa présentation. Oui, il y avait dans cette salle quelques gars fru' contre les femmes.
«Je dis souvent aux hommes que s'ils sont fâchés et qu'ils vocifèrent, ils auront de la difficulté à convaincre quiconque qu'ils peuvent être des pères nourriciers», m'a répondu William Pollack, le conférencier-vedette du déjeuner causerie, quand je lui demandé ce qu'il pensait de Fathers 4 Justice et des autres masculinistes bruyants.
Mais l'irritabilité, a-t-on aussi appris durant la conférence, est au centre de la vie des hommes. Elle augmente avec l'âge, nous a dit le communicateur Jacques Languirand. Et elle fait partie des symptômes de la dépression masculine, avance M. Pollack, un psychologue et clinicien spécialiste des questions masculines à Harvard.
Les autres symptômes que le chercheur étudie actuellement? Une propension à faire des gestes d'éclat et la recherche d'aventures sexuelles.
Les hommes fâchés qui ont inscrit la détresse masculine sur la place publique depuis quelques années seraient-ils donc, foncièrement, des gars déprimés?
Notre société change tellement vite qu'on a de la difficulté à s'adapter. On est passé en un éclair d'un univers où les hommes devaient travailler de leurs mains, nourrir leur famille et être prêts à la guerre, à un monde où les gars doivent étudier, rester assis au bureau, partager les tâches ménagères et l'éducation des enfants et gérer des attentes conjugales et des stress professionnels inconnus de leurs pères. Les femmes ne sont pas à l'abri de la déprime et des difficultés d'adaptation. Loin de là. Mais comme elles ont toujours été traditionnellement les patientes et les hommes leurs psys, on sait mieux comment les aider. Les hommes, eux, cherchent encore les mots pour le dire.
Et en attendant, pour certains, ça n'a pas l'air d'aller trop bien.
CHRONIQUE
YVES BOISVERT: L'envers du désarroi
Yves Boisvert
La Presse
Désarroi des garçons par-ci, crise de la masculinité par-là. Aïe, aïe, aïe. Des jours, je me sens un peu comme Stéphane Dion avec la nation: me semble que de répéter ces généralités sans arrêt crée plus de problèmes qu'il n'en règle.
Bien sûr, Stéphane Dion a tort. Peut-être ai-je terriblement tort aussi. Mais je suis incapable de me convaincre que l'homo sapiens mâle est plus mal en point que la femelle.
Un indice du malheur individuel, ou du désarroi, dans une société, peut se trouver dans son taux de suicide. Au Québec comme à peu près partout, les hommes se suicident en beaucoup plus grand nombre que les femmes. Sauf que les femmes font des tentatives, y compris de tentatives «graves», en beaucoup plus grand nombre que les hommes. Que faut-il en conclure?
La dépression frappe plus de femmes que d'hommes. L'anorexie aussi.
Certes, les filles ont de meilleurs résultats scolaires et décrochent moins. Le mal de vivre ne s'exprime pas de la même manière chez les deux sexes. Mais qui avancera sérieusement qu'il est davantage le fait des hommes?
Pas moi. Ce n'est pas ce que je pense, ce n'est pas ce que je dis à mes garçons, et ce n'est pas ce que j'observe non plus. Et puis, arrêtons ces généralisations. Chaque désarroi est unique avant d'être sociologique. Chaque histoire est profondément personnelle.
Ma crainte est qu'on soit en train d'envoyer un message tordu à un peu tout le monde, l'envers débile des stéréotypes sexistes d'hier. Notamment en ce qui concerne l'école, qui serait «naturellement» l'affaire des filles. Foutaise, évidemment. Il y a plus de filles à la faculté de médecine? Et alors? Que voulez-vous y faire? Instaurer des quotas? Faire comme on a fait pour gonfler le nombre de femmes dans le corps enseignant en sciences? Mauvaise idée deux fois. Les gars, si ça vous intéresse, bottez-vous le derrière.
Ce qui ne veut pas dire que l'école soit toujours bien adaptée aux garçons. Je n'ai pas entendu parler jusqu'à maintenant d'écoles où il y a trop de cours d'éducation physique, ou trop d'activités sportives. Mais on souffre de sous-activité majeure un peu partout, et ça, c'est davantage un problème pour les garçons que pour les filles.
«Voir mon fils une seconde»
Ce qui est vrai, c'est qu'on n'est plus père comme on l'était en 1960. On n'est plus mère de la même façon non plus. On invente, on explore de nouveaux territoires. Si j'avais à parier un petit deux, toutefois, je dirais que les jeunes mères sont, en moyenne, plus déchirées par l'écartèlement travail-famille.
En même temps, ce mouvement des pères qui réclament plus d'accès à leurs enfants, des droits de visite plus étendus, n'arrive pas de nulle part. J'ai déjà critiqué ici les Fathers-4-Justice. Sauf qu'ils ne sont que la partie la plus visible, la plus désespérée, d'un mouvement profond, un peu partout dans le monde, et qui comprend plein d'hommes qui ne grimpent pas sur les ponts.
C'est un mouvement qui aurait été impensable il y a 35 ans. Même s'il n'a pas manqué de querelles féroces à ce sujet depuis toujours, la majorité des pères admettaient généralement d'emblée que la place des enfants était avec leur mère. Ils ne les aimaient pas moins; ils ne concevaient pas leur rôle de la même manière.
Ce n'est plus le cas depuis un bon bout de temps. La quantité de lettres et de courriels que je reçois de pères qui n'acceptent pas les jugements les contraignant à voir leurs enfants au compte-gouttes est impressionnante.
L'autre jour, un père m'a envoyé une copie d'une lettre désespérée sur du papier «format légal»: «Requête pour voir mon fils une seconde».
L'homme demandait à un juge de la Cour supérieure de faire en sorte que son fils se trouve «dans un endroit public le samedi suivant et que le père puisse lui sourire une seconde».
Il dit qu'il n'a pas vu son fils depuis trois ans. Pas une seconde. Il y a généralement de bonnes raisons pour cela - ce qui ne veut pas dire que tous les jugements soient bons, ni que toutes les allégations contre les pères dans des divorces soient vraies. Ce n'est pas de cela que je discute. J'observe simplement que ce mouvement de révolte témoigne d'une nouvelle façon d'être père.
S'ils veulent voir leurs enfants davantage, s'ils plaident pour la garde partagée systématique, c'est qu'ils sont et veulent être plus présents. Ils n'acceptent pas d'être de vagues figurants dans cette famille qui éclate. Ce désarroi-là cache donc la joie de la découverte d'une nouvelle relation entre les pères et leurs enfants, que plein d'hommes connaissent.
Ça aussi, c'est un phénomène de société profond. Me semble qu'on oublie trop souvent d'en parler, hein, les gars?
CHRONIQUE
RONALD KING: Il ne reste plus beaucoup de mâles
Ronald King
La Presse
Il parait que le mâle a perdu «ses balises»? C'est du moins ce qu'on me dit du bureau, mais je n'ai pas très bien compris. Il s'agit du thème du jour et on me tord un peu le bras pour que j'en parle.
Le mâle.... Personnellement, je préfère la femelle, et de loin, mais bon.
Je dirais que le mâle moderne a plutôt tendance à perdre ses couilles. Il n'aime pas penser pour lui-même, il préfère qu'on lui dise quoi penser, quoi acheter, quoi écouter, quoi regarder... Il obéit, il suit, il avale. Comme un veau. Il ne proteste jamais. Il regarde Tout le monde en parle . Quand il ouvre la bouche, lui, il n'a rien à dire.
On parle de la majorité des mâles, bien sûr, pas tous. On parle des candidats à Loft Story, de tous les âges. (Tiens, un Loft Story avec des vieux, ça serait génial, non? Vous l'avez lu ici en premier).
Pas tous les mâles, donc, mais la grande majorité. Il reste encore quelques esprits libres, pas branchés du tout, quelque part. En fait, il ne reste plus beaucoup de mâles. Il y a surtout des couilles molles.
Il paraît aussi que les modèles du mâle ne sont plus les mêmes dans le monde sportif. Il est vrai que plusieurs idoles sportives ont tendance à avoir des armes dans leur coffre à gant et un ego godzilesque. Mais qui a dit qu'il fallait chercher ses modèles dans le sport? Ces gars-là ont un talent physique. C'est tout. Pourquoi ne pas regarder du côté des libres penseurs, de ceux qui ose plutôt que se faire beau dans un lounge de bronzage. Quand le mâle commence à fréquenter un «lounge» de bronzage, il perd ses couilles, pas ses balises. Et il a un visage orange.
Le mâle moderne, sujet branché... Personnellement, je préfère la femelle et le poisson rouge.
Le mâle moderne ne réfléchit pas assez, si vous voulez mon avis. Il aime la facilité. Un peu de silence, de solitude et de réflexion lui ferait du bien. Il devrait s'éloigner des sujets branchés. Mais ça demande un effort. Le mâle moderne n'est pas porté sur l'effort soutenu. Surtout celui du cerveau.
Le mâle moderne clavarde trop. Gna, gna, gna... Le mâle est IN, le mâle est OUT.
Comment va l'homme? Mieux que la femme...
Marc Cassivi
La Presse
L'homme de ma génération n'a pas bonne réputation à la télévision. L'image qu'on en donne est souvent celle d'un requin mangeur de femmes (Jean-Michel de C.A.), d'un mollusque castré (Carlos des Invincibles) ou d'un monsieur Muscle décérébré (trop de candidats de Loft Story). Quels tristes exemples pour nos jeunes garçons ! disent les uns. Où sont passés les modèles masculins forts, rassembleurs, intelligents, conciliants, positifs et optimistes ? se demandent les autres.
Certains sont presque tentés de tracer un parallèle entre les difficultés en mathématiques des écoliers de troisième année et la perte des repères masculins au petit écran. Ou d'expliquer la baisse de la natalité au Québec, la prolifération du divorce et la légalisation du mariage gai par la montée en puissance des Line-la-pas-fine. Laissons aux gourous de la psychologie populaire et autres défricheurs d'épiphénomènes de société le loisir de trouver des réponses toutes faites à des questions qu'ils inventent eux-mêmes.
Je ne suis un spécialiste de rien du tout. Aussi, je me contenterai de dire ceci : collectivement, nous regardons peut-être trop de télévision pour notre propre bien, nous analysons peut-être trop sérieusement des oeuvres qui n'aspirent qu'à divertir, nous accordons peut-être trop d'importance aux gourous de tout acabit et pas assez aux devoirs de maths de nos garçons. Ça vaut ce que ça vaut. Je le répète : je ne suis pas spécialiste.
Il reste que lorsqu'on me demande : «Comment va l'homme?», j 'ai envie de répondre: «Très bien merci.» Parce que nous vivons dans une société patriarcale qui fait partie d'un monde patriarcal. Parce que ceux qui nous dirigent, qui détiennent le pouvoir et une certaine idée de la vérité, sont des hommes. Parce que dans le secteur de la culture, comme dans presque tous les secteurs, il n'existe pas encore de réelle équité, de parité entre les hommes et les femmes.
Pour chaque femme qui se démarque dans l'univers de la télévision, du cinéma ou de la musique, que ce soit en création, en production ou en distribution, il y a au moins 10 hommes. On a fait grand cas, il y a quelque temps, de la nomination de Sophie Thibault comme chef d'antenne à TVA (et de celle de Katie Couric à CBS). La preuve s'il en faut que l'exception confirme la règle.
Or, dans un monde d'hommes dirigé par des hommes, il se trouve encore des hommes pour se plaindre du sort des hommes. Cela frise l'indécence. Bien sûr, il faut s'inquiéter du taux de suicide alarmant des jeunes hommes québécois, du décrochage des adolescents et des difficultés scolaires des garçons. Mais il faut le faire de bonne foi et en connaissance de cause, en se dissociant du discours simpliste des masculinistes et en se méfiant des généralisations hâtives.
Sans doute que l 'homme d'aujourd'hui, tel qu'incarné à la télévision québécoise, est généralement plus mou, plus poltron, plus méprisable et plus désolant qu'autrefois. Ce n'est peut-être qu'un juste retour des choses, un regard frais et ironique sur un mythe déboulonné. Qu'on cesse de nous servir le faux-fuyant qu'est la disparition des modèles masculins valables pour justifier le moindre de nos bobos. Il sera toujours sain de se demander : «Comment va l'homme?» Mais pour l'heure, il faut avoir l'honnêteté de répondre: «Mieux que la femme.»
http://www.cyberpresse.ca/apps/pbcs.dll ... 0HOMMES%3F
Alors qui dit vrai? Que doit-on en penser selon vous --Message edité par tuberale le 2006-11-16 10:30:52--
YVES BOISVERT: L'envers du désarroi
Yves Boisvert
La Presse
Désarroi des garçons par-ci, crise de la masculinité par-là. Aïe, aïe, aïe. Des jours, je me sens un peu comme Stéphane Dion avec la nation: me semble que de répéter ces généralités sans arrêt crée plus de problèmes qu'il n'en règle.
Bien sûr, Stéphane Dion a tort. Peut-être ai-je terriblement tort aussi. Mais je suis incapable de me convaincre que l'homo sapiens mâle est plus mal en point que la femelle.
Un indice du malheur individuel, ou du désarroi, dans une société, peut se trouver dans son taux de suicide. Au Québec comme à peu près partout, les hommes se suicident en beaucoup plus grand nombre que les femmes. Sauf que les femmes font des tentatives, y compris de tentatives «graves», en beaucoup plus grand nombre que les hommes. Que faut-il en conclure?
La dépression frappe plus de femmes que d'hommes. L'anorexie aussi.
Certes, les filles ont de meilleurs résultats scolaires et décrochent moins. Le mal de vivre ne s'exprime pas de la même manière chez les deux sexes. Mais qui avancera sérieusement qu'il est davantage le fait des hommes?
Pas moi. Ce n'est pas ce que je pense, ce n'est pas ce que je dis à mes garçons, et ce n'est pas ce que j'observe non plus. Et puis, arrêtons ces généralisations. Chaque désarroi est unique avant d'être sociologique. Chaque histoire est profondément personnelle.
Ma crainte est qu'on soit en train d'envoyer un message tordu à un peu tout le monde, l'envers débile des stéréotypes sexistes d'hier. Notamment en ce qui concerne l'école, qui serait «naturellement» l'affaire des filles. Foutaise, évidemment. Il y a plus de filles à la faculté de médecine? Et alors? Que voulez-vous y faire? Instaurer des quotas? Faire comme on a fait pour gonfler le nombre de femmes dans le corps enseignant en sciences? Mauvaise idée deux fois. Les gars, si ça vous intéresse, bottez-vous le derrière.
Ce qui ne veut pas dire que l'école soit toujours bien adaptée aux garçons. Je n'ai pas entendu parler jusqu'à maintenant d'écoles où il y a trop de cours d'éducation physique, ou trop d'activités sportives. Mais on souffre de sous-activité majeure un peu partout, et ça, c'est davantage un problème pour les garçons que pour les filles.
«Voir mon fils une seconde»
Ce qui est vrai, c'est qu'on n'est plus père comme on l'était en 1960. On n'est plus mère de la même façon non plus. On invente, on explore de nouveaux territoires. Si j'avais à parier un petit deux, toutefois, je dirais que les jeunes mères sont, en moyenne, plus déchirées par l'écartèlement travail-famille.
En même temps, ce mouvement des pères qui réclament plus d'accès à leurs enfants, des droits de visite plus étendus, n'arrive pas de nulle part. J'ai déjà critiqué ici les Fathers-4-Justice. Sauf qu'ils ne sont que la partie la plus visible, la plus désespérée, d'un mouvement profond, un peu partout dans le monde, et qui comprend plein d'hommes qui ne grimpent pas sur les ponts.
C'est un mouvement qui aurait été impensable il y a 35 ans. Même s'il n'a pas manqué de querelles féroces à ce sujet depuis toujours, la majorité des pères admettaient généralement d'emblée que la place des enfants était avec leur mère. Ils ne les aimaient pas moins; ils ne concevaient pas leur rôle de la même manière.
Ce n'est plus le cas depuis un bon bout de temps. La quantité de lettres et de courriels que je reçois de pères qui n'acceptent pas les jugements les contraignant à voir leurs enfants au compte-gouttes est impressionnante.
L'autre jour, un père m'a envoyé une copie d'une lettre désespérée sur du papier «format légal»: «Requête pour voir mon fils une seconde».
L'homme demandait à un juge de la Cour supérieure de faire en sorte que son fils se trouve «dans un endroit public le samedi suivant et que le père puisse lui sourire une seconde».
Il dit qu'il n'a pas vu son fils depuis trois ans. Pas une seconde. Il y a généralement de bonnes raisons pour cela - ce qui ne veut pas dire que tous les jugements soient bons, ni que toutes les allégations contre les pères dans des divorces soient vraies. Ce n'est pas de cela que je discute. J'observe simplement que ce mouvement de révolte témoigne d'une nouvelle façon d'être père.
S'ils veulent voir leurs enfants davantage, s'ils plaident pour la garde partagée systématique, c'est qu'ils sont et veulent être plus présents. Ils n'acceptent pas d'être de vagues figurants dans cette famille qui éclate. Ce désarroi-là cache donc la joie de la découverte d'une nouvelle relation entre les pères et leurs enfants, que plein d'hommes connaissent.
Ça aussi, c'est un phénomène de société profond. Me semble qu'on oublie trop souvent d'en parler, hein, les gars?
CHRONIQUE
RONALD KING: Il ne reste plus beaucoup de mâles
Ronald King
La Presse
Il parait que le mâle a perdu «ses balises»? C'est du moins ce qu'on me dit du bureau, mais je n'ai pas très bien compris. Il s'agit du thème du jour et on me tord un peu le bras pour que j'en parle.
Le mâle.... Personnellement, je préfère la femelle, et de loin, mais bon.
Je dirais que le mâle moderne a plutôt tendance à perdre ses couilles. Il n'aime pas penser pour lui-même, il préfère qu'on lui dise quoi penser, quoi acheter, quoi écouter, quoi regarder... Il obéit, il suit, il avale. Comme un veau. Il ne proteste jamais. Il regarde Tout le monde en parle . Quand il ouvre la bouche, lui, il n'a rien à dire.
On parle de la majorité des mâles, bien sûr, pas tous. On parle des candidats à Loft Story, de tous les âges. (Tiens, un Loft Story avec des vieux, ça serait génial, non? Vous l'avez lu ici en premier).
Pas tous les mâles, donc, mais la grande majorité. Il reste encore quelques esprits libres, pas branchés du tout, quelque part. En fait, il ne reste plus beaucoup de mâles. Il y a surtout des couilles molles.
Il paraît aussi que les modèles du mâle ne sont plus les mêmes dans le monde sportif. Il est vrai que plusieurs idoles sportives ont tendance à avoir des armes dans leur coffre à gant et un ego godzilesque. Mais qui a dit qu'il fallait chercher ses modèles dans le sport? Ces gars-là ont un talent physique. C'est tout. Pourquoi ne pas regarder du côté des libres penseurs, de ceux qui ose plutôt que se faire beau dans un lounge de bronzage. Quand le mâle commence à fréquenter un «lounge» de bronzage, il perd ses couilles, pas ses balises. Et il a un visage orange.
Le mâle moderne, sujet branché... Personnellement, je préfère la femelle et le poisson rouge.
Le mâle moderne ne réfléchit pas assez, si vous voulez mon avis. Il aime la facilité. Un peu de silence, de solitude et de réflexion lui ferait du bien. Il devrait s'éloigner des sujets branchés. Mais ça demande un effort. Le mâle moderne n'est pas porté sur l'effort soutenu. Surtout celui du cerveau.
Le mâle moderne clavarde trop. Gna, gna, gna... Le mâle est IN, le mâle est OUT.
Comment va l'homme? Mieux que la femme...
Marc Cassivi
La Presse
L'homme de ma génération n'a pas bonne réputation à la télévision. L'image qu'on en donne est souvent celle d'un requin mangeur de femmes (Jean-Michel de C.A.), d'un mollusque castré (Carlos des Invincibles) ou d'un monsieur Muscle décérébré (trop de candidats de Loft Story). Quels tristes exemples pour nos jeunes garçons ! disent les uns. Où sont passés les modèles masculins forts, rassembleurs, intelligents, conciliants, positifs et optimistes ? se demandent les autres.
Certains sont presque tentés de tracer un parallèle entre les difficultés en mathématiques des écoliers de troisième année et la perte des repères masculins au petit écran. Ou d'expliquer la baisse de la natalité au Québec, la prolifération du divorce et la légalisation du mariage gai par la montée en puissance des Line-la-pas-fine. Laissons aux gourous de la psychologie populaire et autres défricheurs d'épiphénomènes de société le loisir de trouver des réponses toutes faites à des questions qu'ils inventent eux-mêmes.
Je ne suis un spécialiste de rien du tout. Aussi, je me contenterai de dire ceci : collectivement, nous regardons peut-être trop de télévision pour notre propre bien, nous analysons peut-être trop sérieusement des oeuvres qui n'aspirent qu'à divertir, nous accordons peut-être trop d'importance aux gourous de tout acabit et pas assez aux devoirs de maths de nos garçons. Ça vaut ce que ça vaut. Je le répète : je ne suis pas spécialiste.
Il reste que lorsqu'on me demande : «Comment va l'homme?», j 'ai envie de répondre: «Très bien merci.» Parce que nous vivons dans une société patriarcale qui fait partie d'un monde patriarcal. Parce que ceux qui nous dirigent, qui détiennent le pouvoir et une certaine idée de la vérité, sont des hommes. Parce que dans le secteur de la culture, comme dans presque tous les secteurs, il n'existe pas encore de réelle équité, de parité entre les hommes et les femmes.
Pour chaque femme qui se démarque dans l'univers de la télévision, du cinéma ou de la musique, que ce soit en création, en production ou en distribution, il y a au moins 10 hommes. On a fait grand cas, il y a quelque temps, de la nomination de Sophie Thibault comme chef d'antenne à TVA (et de celle de Katie Couric à CBS). La preuve s'il en faut que l'exception confirme la règle.
Or, dans un monde d'hommes dirigé par des hommes, il se trouve encore des hommes pour se plaindre du sort des hommes. Cela frise l'indécence. Bien sûr, il faut s'inquiéter du taux de suicide alarmant des jeunes hommes québécois, du décrochage des adolescents et des difficultés scolaires des garçons. Mais il faut le faire de bonne foi et en connaissance de cause, en se dissociant du discours simpliste des masculinistes et en se méfiant des généralisations hâtives.
Sans doute que l 'homme d'aujourd'hui, tel qu'incarné à la télévision québécoise, est généralement plus mou, plus poltron, plus méprisable et plus désolant qu'autrefois. Ce n'est peut-être qu'un juste retour des choses, un regard frais et ironique sur un mythe déboulonné. Qu'on cesse de nous servir le faux-fuyant qu'est la disparition des modèles masculins valables pour justifier le moindre de nos bobos. Il sera toujours sain de se demander : «Comment va l'homme?» Mais pour l'heure, il faut avoir l'honnêteté de répondre: «Mieux que la femme.»
http://www.cyberpresse.ca/apps/pbcs.dll ... 0HOMMES%3F
Alors qui dit vrai? Que doit-on en penser selon vous --Message edité par tuberale le 2006-11-16 10:30:52--
Citation :Or, dans un monde d'hommes dirigé par des hommes, il se trouve encore des hommes pour se plaindre du sort des hommes. Cela frise l'indécence. Bien sûr, il faut s'inquiéter du taux de suicide alarmant des jeunes hommes québécois, du décrochage des adolescents et des difficultés scolaires des garçons. Mais il faut le faire de bonne foi et en connaissance de cause, en se dissociant du discours simpliste des masculinistes et en se méfiant des généralisations hâtives.
Moi c'est avec cela que je suis d'accord en tout point.
Moi c'est avec cela que je suis d'accord en tout point.
vevie1965 a écritCitation :Or, dans un monde d'hommes dirigé par des hommes, il se trouve encore des hommes pour se plaindre du sort des hommes. Cela frise l'indécence. Bien sûr, il faut s'inquiéter du taux de suicide alarmant des jeunes hommes québécois, du décrochage des adolescents et des difficultés scolaires des garçons. Mais il faut le faire de bonne foi et en connaissance de cause, en se dissociant du discours simpliste des masculinistes et en se méfiant des généralisations hâtives.
Moi c'est avec cela que je suis d'accord en tout point.
Moi aussi!!
Moi c'est avec cela que je suis d'accord en tout point.
Moi aussi!!
Il y a quand même beaucoup d'hommes qui sortent abattus des tribunaux du divorce, on retrouve l'image de l'homme dans les médias qui ne peut leur offrir grand modèle tant on le ridiculise, ils ne savent plus quoi penser de leur relation avec les femmes tant celles-ci sont changeantes......on le pédophilise à qui mieux mieux, on le traîte de pas de couilles, etc....etc.......je ne dis pas qu'ils font pitié, pas du tout, pas plus que les femmes....mais comment seront les hommes du futu?r.....que fera de tout ceci la nouvelle génération qui pousse.....il y a quand même des questions à se poser non?