Hurler sa colère

[.anthurium.]

La chronique de Joseph Facal
Hurler sa colère
Joseph Facal
06/05/2009 10h09


Des fois, il ne reste plus qu'à hurler. Encore et encore.


L'implantation de la réforme scolaire sera entièrement terminée au Québec l'an prochain. Elle repose sur les mêmes principes que des réformes similaires lancées en Suisse, en Belgique et ailleurs : les «compétences transversales», et tout le bataclan que vous connaissez déjà.


Il y a toutefois une grosse différence: dans ces pays, dès qu'on a vu que les résultats scolaires piquaient du nez, on a immédiatement stoppé les machines. Ici, on a décidé de boire le calice jusqu'à la lie.


COBAYES


Depuis deux cents ans, les élites de notre société ont une sainte peur de l'échec et, comme tout notre peuple, un profond complexe d'infériorité face à la culture. Elles ne pouvaient donc qu'être séduites par une réforme qui promettait la disparition de l'échec et la réussite pour tous.


En cours de route, on a certes corrigé les aspects les plus superficiels de la réforme, comme l'allure des bulletins. Mais l'esprit général est demeuré le même. On a changé les fenêtres et les poignées de porte, mais pas les fondations ni la division des pièces.


Une enseignante dans une école difficile rapportait au journal La Presse : «C'est la première fois que je vois des enfants aussi perdus.» «Quand j'ai vu ce que la réforme avait fait d'eux, j'ai eu un choc. Il leur manque des notions fondamentales.» Lorsqu'il veut secouer les jeunes, le prof de maths, lui, se fait dire : «Relax man, relax! Pourquoi se forcer puisque, de toute façon, on va passer?».


LES PREUVES


Des cas isolés ? Pas du tout. Depuis l'introduction de la réforme scolaire au Québec, le décrochage scolaire a augmenté. Les résultats de nos élèves dans les comparaisons internationales reculent. Plusieurs sondages indiquent que les enseignants, dans leur grande majorité, sont d'avis que cette réforme nuit aux enfants.


Abondent aussi les témoignages d'enseignants qui rapportent les consignes qu'ils reçoivent, sous la menace de sanctions : dans les écoles «difficiles», il faut «évaluer» les enfants de façon à ce que les taux d'échec n'explosent pas. La réalité est donc pire que les statistiques, déjà catastrophiques.


Évidemment, dans les quartiers favorisés, la plupart des enfants n'auront pas de problèmes particuliers, mais ce n'est pas ce genre d'enfant que cette réforme voulait aider. Bref, les preuves de l'échec complet de cette réforme sont maintenant si massives qu'il faut être de mauvaise foi pour les nier.


C'EST PAS MOI


Toute la classe politique tourne cependant autour du pot pour ne pas dire ce qui crève les yeux : qu'il s'agit d'un naufrage total, dont nous allons payer le prix longtemps.


Le Parti québécois ne veut pas porter l'odieux d'admettre que c'est pendant qu'il était au pouvoir (j'y étais) que s'est enclenché ce dérapage colossal. Le Parti libéral du Québec, lui, ne veut pas se faire dire qu'il dort au gaz depuis six ans, alors que s'accumulent les preuves de cet immense gâchis.


Personne ne veut être le premier à admettre s'être trompé. Pour ne pas en payer le prix politique. Pour ne pas donner de munitions à l'autre. Alors on se renvoie la balle. Et les enfants, pendant ce temps? C'est à hurler, je vous dis.

[Acrux]

Je l'aime bien ce Joseph Facal

[Thewinneris]

Les maudites réformes, j'ai toujours été contre! Mais bon on passe pour passéiste lorsque nous avons ce discours!

Cristis, me semble que ce n'est pas complique de garder ce qui fonctionnne bien plutôt que de toujours changer pour changer en se faisant croire que c'est le "progrès" alors que bien souvent c'est le contraire finallement!

[.anthurium.]

La chronique de Joseph Facal
Professeur X
Joseph Facal
11/05/2009 09h23


Il a insisté sur l'importance de préserver sa confidentialité. Il n'a rien à craindre.


C'est un témoignage que j'ai reçu. Un de plus. Vous en déduirez ce que vous voulez. Si vous ne voulez rien savoir, rien de plus facile. Bof, un cas isolé, direz-vous. Un autre frustré. Air connu.


Appelons-le «professeur X». Il enseigne dans une école secondaire publique Y au Québec. Disons qu'il a passablement d'expérience. Il en a vu passer, des réformes pour, comme on dit dans le jargon ministériel, «améliorer la réussite éducative de nos jeunes».


«Oui, les directions d'école exigent que nous fassions réussir des élèves qui ne le méritent pas : elles vous convoquent dans leur bureau, elles ferment la porte et vous disent que si tant d'élèves échouent, c'est que vous ne comprenez pas le programme, que vous ne savez pas évaluer, que vous êtes trop exigeant, incompétent même. Elles vous demandent de réévaluer les élèves. Si vous ne comprenez pas ce qu'elles demandent, elles vont vous rendre la vie insupportable. Je l'ai vécu. Donc vous montez les notes. Vous ne gardez que quelques échecs et la vie redevient agréable. Tout cela se fait derrière des portes closes, individu par individu.»


AU-DELÀ DES BULLETINS


Évidemment, les problèmes ne se réduisent pas à la question des notes. Écoutons le professeur X:


«Mais le problème vient aussi d'ailleurs : on a mis dans les classes dites normales plein d'élèves qui n'y ont pas leur place parce qu'ils ont de sérieux problèmes d'apprentissage et/ou de comportement. Aucun support à la hauteur des besoins n'est fourni. Ils comptent parfois pour la moitié d'une classe. Ils dérangent ou, au mieux, ils perdent leur temps. Rien ne sert alors d'abaisser le ratio enseignant/ élèves : la moitié d'une classe, même de 15 élèves, ayant des retards ou des difficultés d'apprentissage et les problèmes de comportement qui viennent avec ne sera jamais fonctionnelle. Les bons élèves fuient vers l'école privée parce qu'ils sont constamment dérangés et perdent leur temps.»


Je redis aussi, pour la millième fois, que nous, parents, faisons souvent partie du problème. De nouveau, le professeur X:


«Mais l'école répond de plus en plus aussi aux exigences des parents : leurs petits anges sont paresseux (et effrontés), mais on ne doit pas leur faire vivre d'échec, ce n'est pas bon pour leur estime de soi.»


Ah, l'estime de soi! Que de conneries n'avons-nous pas commises à cause de la pop-psychologie guimauve contemporaine!


REGARDER AILLEURS


Des témoignages comme ceux-là, les journalistes (ce que je ne suis pas) qui s'intéressent au milieu québécois de l'éducation depuis longtemps en ont des caisses pleines. Toutes des fabrications? Tous de frustrés?


Ne vous énervez pas trop, ceci dit. Vous passeriez pour un «chialeux» ou un «malcommode». Nous sommes au Québec, après tout: chez nous, il y a toujours moyen de moyenner. Nous sommes le peuple des petites colères sans lendemain.


Et puis, n'oubliez pas ce que nous rappelle le professeur X: on a toujours le choix. Il suffit de rentrer dans le rang, de baisser la tête, de détourner les yeux et la vie redevient belle.

[Thewinneris]

Qu'ils mettent tous les enfants dans les classes régulières, même ceux qui n'y ont pas leur place, pause aussi un grave problème, c'est une erreure! Mais bon... Il ne faut pas les discriminer ces petits, quitte à pénaliser tout le monde, y parrait! On accepter bien des policiers avec des spagettis mous à la place des bras pour ne pas faire de discrimination...

Si au moins on permettait aux professeurs de faire de la discipline, pas au point de retourner dans le temps que seul l'autorité avait son mot à dire, mais établir un juste équilibre, parceque-là c'est devenu completement l'inverse!

[LilDeViLs]

«Mais l'école répond de plus en plus aussi aux exigences des parents : leurs petits anges sont paresseux (et effrontés), mais on ne doit pas leur faire vivre d'échec, ce n'est pas bon pour leur estime de soi.»

Et pourtant, j'ai été un parent qui a voulu que son enfants double son année, sa première année, parce que elle avait un léger retard d'apprentissage (plus long que la moyenne a assimiler la matière)
En sortant de la première année normalement tu sait lire et écrire a la base, ma fille non, mais ont la monté en 2 ieme année quand même.
La rencontre avec le professeur, le directeur, psy ect a donné ceci: Vous savez madame, il coute très cher de faire doubler un enfant, elle devra donc doubler d'effort l'an prochain pour rattraper son retard...
Résultat: une enfant qui a trainé les retard successif qu'elle n'arrivait pas a rattraper et un estime de soi nul malgré nos encouragement. Décrocheuse en secondaire 2 blasé.
En ce moment j'ai mon plus jeune de 15 ans qui va au secondaire et il a de bonne note mais je ne sait même pas ce qu'il fait en classe, pas de devoir a la maison, ni leçon "comme dans l'temps" ses prof me disent qu'ils font tout ça en classe.
Je me rappelle pourtant que pour beaucoup des difficultés scolaire en classe que j'avais ce sont mes parents qui m'ont aidé a les régler rendu au soir sur le coin de la table de la cuisine parce que eux n'avais pas 33 élèves devant eux avec la main levée.
Bref, système scolaire au Québec m'écœure.

Une maman qui a voulu s'impliquer pi qu'ont a virrer d'bord.

[Thewinneris]

À la lecture de ton commentaire Lildevis, je me rend compte que c'est plus une question d'argent que du souscis de ne pas faire de discrimination, de faire toutes ces réformes!
Pourquoi n'y ait-je pas songée plus tôt? C'est toujours une maudites question d'argent qui passe avant tout qu'on retrouve au bout de toutes ces "bonnes" intentions!

Il ne se soucis pas des jeunes car ces jeunes qu'on dit ne pas vouloir discriminer, sont autant pénalisés en ne pouvant pas bénéficier de service qui les aide à reprendre leur retard!

[LilDeViLs]

Dans le cas de ma fille Thewinneris ça été leurs argument, de l'aide elle en a jamais reçu, rendu au secondaire elle a été mis dans une classe garderie que moi j'ai surnommé comme ça. Pep1. Dans cette classe ils y ont mis tout les jeunes a problème de comportement apprentissage ect tous dans le même tas sans aucun support professionnel. A son 2 ieme bulletin elle n'a même pas été évalué en français son prof étant parti pour 3 mois en Asie. Le prof de remplacement ? Le prof d'informatique
J'ai sauter une coche quand j'ai vu ma fille se connecter sur msn par un bel après midi; mais qu'est-ce que tu fait la, tu est OU ; bah je suis a l'école maman ont nous laisse "tchatter" c'est le prof d'info qu'ont a.
Appel a l'école, je suis pas contente, ont me confirme les dire de ma fille, je demande alors, y aura t'il un professeur de français pour remplacer celui parti pour 3 mois???
Réponse: désolé madame ont ne sait pas, ont manque de professeur mais des demandes ont été faite.
Avec du recul je me demande si j'aurai fait pire que ce système pourri en donnant la classe moi même a mes enfants.
Je ne blâme même pas les profs pour ça, je blâme toute les grosse tête a cravate dans leur bureau qui se ferme les yeux sur le problème.
Le système se met la tête dans le sable en fesant réussir un jeune qui n'est même pas capable de faire une phrase complète sans faire de faute a tout les mots de celle-ci.

[Ely]

Moi je me rapelle qu'étant plus jeune, en première ou deuxième année ? Je ne suis pas trop sûr mais j'avais un léger retard de lecture. Je n'est pas doublée mais j'ai du voir une orthophoniste pendant la moitié de l'année et j'ai débloquée tout de suite.

C'était au début des année 90, le bon vieux temps ou il y avait des orthophonistes tous les jours dans toutes les écoles.

[Thewinneris]

Il y avait aussi des cours de rattrapage le midi! Ça existe-tu encore?
J'ai peur en demandant! Lol!

[lucide]

Il y avait aussi des cours de rattrapage le midi! Ça existe-tu encore?
J'ai peur en demandant! Lol!

Dans notre école il y a récupération par matiere 2 fois par cycle le midi et une fois le soir. Un local de sciences ouvert chaque midi pour tous les niveaux.

Il y a aide aux devoirs a la biblio 4 fois semaine.

Un deuxieme transport pour tous les éleves qui fréquentent les récupérations ou les activités

Sur le midi, un troupe d'impro. Une troupe de danse et de théatre qui organise un festival de théatre annuel
Un tas de ligues de sports scolaires para scolaire, un championnat québecois pour déficients légers en juillet
Un comité environnement avec une mini pépiniere qui récupere semences en automne et qui fournit des plants de légumes bio et fleurs
Un programme d'éducation international.

Les éleves créent de belles choses en arts ou meme en techno ou ils viennent de fabriquer des jouets de bois. Les affiches de francais avec leur resume de lecture sont dignes des posters du salon du livre.

Et outre certains éleves qui sechent les cours, qui se foutent de toi, qui se gelent la gueule, un tas de beaux ados tout cute, souriants, droles et polis.

Ca serait le fun si de temps un temps un journaliste irait voir et interroger du coté positif au lieu de toujours dénoncer les failles du systeme... si on interrogeait le prof pimpant et pleins de projets au lieu du frustré en burn out.

[.anthurium.]

[...]


Dans notre école il y a récupération par matiere 2 fois par cycle le midi et une fois le soir. Un local de sciences ouvert chaque midi pour tous les niveaux.

Il y a aide aux devoirs a la biblio 4 fois semaine.

Un deuxieme transport pour tous les éleves qui fréquentent les récupérations ou les activités

Sur le midi, un troupe d'impro. Une troupe de danse et de théatre qui organise un festival de théatre annuel
Un tas de ligues de sports scolaires para scolaire, un championnat québecois pour déficients légers en juillet
Un comité environnement avec une mini pépiniere qui récupere semences en automne et qui fournit des plants de légumes bio et fleurs
Un programme d'éducation international.

Les éleves créent de belles choses en arts ou meme en techno ou ils viennent de fabriquer des jouets de bois. Les affiches de francais avec leur resume de lecture sont dignes des posters du salon du livre.

Et outre certains éleves qui sechent les cours, qui se foutent de toi, qui se gelent la gueule, un tas de beaux ados tout cute, souriants, droles et polis.

Ca serait le fun si de temps un temps un journaliste irait voir et interroger du coté positif au lieu de toujours dénoncer les failles du systeme... si on interrogeait le prof pimpant et pleins de projets au lieu du frustré en burn out.

Tu as raison il faut mettre en valeur les bon professeurs et les écoles performantes, ça n'empêche pas de dénoncer aussi les manques dans les écoles.