La chronique de Richard Martineau
À quand un concert pour Raymond Ellis ?
Richard Martineau
10/08/2009 08h00
Connaissez-vous Raymond Ellis ? Jeune homme sans histoire qui était très proche de ses parents, Ellis a grandi à Toronto, mais il a déménagé à Montréal, car il trouvait la Ville-Reine trop violente.
Le 23 octobre 2005, alors qu'il venait tout juste d'ouvrir une boutique de vêtements rue Sainte-Catherine, ce diplômé en sciences sociales du Collège Dawson a décidé de passer la soirée au bar Aria avec ses deux associés.
Il discutait tranquillement avec ses amis lorsque, sortis de nulle part, des membres de gangs de rue (qui l'ont pris par erreur pour l'assassin d'un de leurs chums) lui ont sauté dessus, l'ont rué de coups de pieds et de coups de poing, et l'ont poignardé à 11 reprises dans le dos.
Quelques heures plus tard, Raymond Ellis, 25 ans, succombait à ses blessures à l'hôpital.
MORT DANS L'INDIFFÉRENCE
«Sa camisole était tellement imbibée de sang qu'on aurait pu la tordre», a dit le pathologiste lors du procès des assassins d'Ellis.
Ce jeune homme est mort pour rien. Ses parents et ses amis ne pourront plus jamais le voir.
A-t-on monté un gros spectacle pour honorer sa mémoire? Non.
Luck Mervil a-t-il prononcé un discours pour dire à quel point sa mort était tragique? Non.
A-t-on organisé une marche de commémoration sur les lieux de son agression? Non.
Le milieu du rap québécois s'est-il serré les coudes pour dénoncer ses assassins? Non.
Des artistes ont-ils envoyé des messages d'appui à sa famille? Non.
A-t-on eu droit à des reportages sur sa vie un an après son décès? Non.
UNE VICTIME SANS DÉFENSE
«Fredy est mort dans des circonstances où il n'aurait jamais dû être tué, a lancé un rappeur lors du spectacle organisé ce week-end pour souligner le premier anniversaire de la mort de Fredy Villanueva. Les policiers ont tiré sur un jeune sans défense.»
Et Raymond Ellis, lui?
S'il y a un jeune sans défense, c'est bien lui! Il ne fréquentait pas des membres de gangs de rue. Son frère n'était pas une racaille. Il ne se trouvait pas dans une cour d'école en compagnie d'un récidiviste en bris de condition.
Il buvait tranquillement une bière dans un bar avec des amis.
Des petites frappes l'ont battu et poignardé, et qu'est-ce que le merveilleux monde du show-biz a fait pour lui?
Rien. Strictement rien.
C'est vrai que c'était un honnête citoyen. Et que les honnêtes citoyens, on s'en torche.
LA FAUTE À SON FRÈRE
Quoi qu'en disent Luck Mervil et ses amis, le principal responsable du décès de Fredy Villanueva est son frère Dany.
Quand on décide de se joindre à un gang de rue, quand on joue les p'tites crapules, quand on s'introduit par effraction dans des maisons, quand on se fait prendre en possession d'un pistolet de calibre 22, quand on se fait épingler en compagnie de quatre complices cagoulés et de plusieurs armes à feu, et quand on ne respecte pas les conditions de sa libération conditionnelle, on met les membres de sa famille en danger.
On les rend vulnérables.
Ils peuvent mourir dans une fusillade, tués par d'autres gangs de rue ou par des policiers.
Les participants au concert de ce week-end ont beau multiplier les discours et lever le poing en signe de protestation, la vérité, c'est que si Dany Villanueva avait été un citoyen honnête, son frère serait encore en vie.
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