Les limos au garage

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Samson
Chronique

Les limos au garage
J. Jacques Samson

04/05/2010 09h23
Jean-Jacques Samson

Les ministres du gouvernement Charest peuvent compter sur au moins 467 personnes issues de l’appareil du Parti libéral du Québec pour les seconder directement dans les cabinets, une moyenne de 18 par ministre.


Le budget pour ces apparatchiks est passé de 18,9 millions en 2003 à 26,4 millions de dollars, l’an dernier. Cette masse salariale sera simplement gelée pour les deux prochaines années. La taille de l’effectif sera toutefois maintenue. Certaines dépenses prennent une portée symbolique. La lourdeur de l’appareil politique entourant les ministres est l’une de celles-là.

Jean Charest se targuait en 2003 d’avoir composé l’un des plus restreints conseils des ministres de l’histoire récente, à 18 ministres. Il est toutefois passé à 26 en 2008. Pauline Marois ne peut rien lui reprocher : le dernier conseil des ministres du Parti québécois en comptait le nombre record de 36, ce qui était jugé ridicule partout au Canada.

Plus il y a de ministres, plus il y a de chefs de cabinet, d’attachés de presse, d’attachés politiques et autres, sans compter le personnel de la fonction publique affecté auprès d’eux, des sous-ministres jusqu’aux téléphonistes. Lorsqu’un gouvernement doit imposer une cure minceur à tout l’appareil de l’État, en plus d’ajouter une collection de taxes et de tarifs additionnels au fardeau fiscal des contribuables, la première chose à faire est de commencer par le haut, pour envoyer un message sans équivoque à la population et à la machine administrative.

Les sommes en jeu sont modestes, quelques millions sur un budget de plus de 65 milliards de dollars, mais il en va de la crédibilité du gouvernement et de la perception dans l’opinion publique.

Limousines et chauffeurs

L’ex-ministre Yves Séguin avait créé toute une commotion peu après son entrée en fonction comme ministre des Finances. Au cours d’une entrevue prébudgétaire qu’il m’avait accordée, il avait menacé de couper les budgets pour les limousines de ses collègues ministres si ceux-ci continuaient de se montrer incapables de rabattre les dépenses dans leurs ministères. Le miracle réclamé s’est aussitôt produit !

Chauffeur et limo sont les premiers attributs du power trip pour un ministre québécois.

L’analyste Jean Lapierre a relevé hier que les ministres fédéraux se déplaçaient au volant de leur voiture personnelle pour leurs activités professionnelles locales et toutes celles privées. Les mêmes pratiques valent dans toutes les autres provinces. Les ministres du gouvernement du Québec, on le sait, ont par contre droit aux services d’un chauffeur-garde du corps, sept jours par semaine, vingt-quatre heures par jour, 365 jours par année. Lorsque la ministre fédérale Josée Verner habitait la même rue que le ministre du Québec Sam Hamad, Mme Verner partait au travail le matin au volant de sa petite Toyota bas de gamme, alors que son voisin s’installait à l’arrière de sa confortable limousine de fonction et précisait au garde du corps où le conduire. La ministre du gouvernement du Canada aimait bien se moquer du paradoxe et de l’ostentation de nos ministres provinciaux.

L’argument de la sécurité est farfelu. Il ne vaut que pour le premier ministre, les ministres des Finances, de la Justice et de la Sécurité publique. Jean Charest aurait obtenu un impact incomparable s’il avait fait remiser les limousines au garage plutôt que de commander pour les caméras une réunion en jeans, un dimanche matin. Ses ministres auraient mis fin dès le lendemain aux dépenses folles dans leurs ministères, nous pouvons en être certains.

jjacques.samson@journaldequebec.com