Un voyage dans le temps

Éric Salvail et son équipe travaillent depuis des mois à dépoussiérer les vieilles bobines emmagasinées dans la chambre forte de TVA, à la recherche des meilleurs extraits pour servir les jeux de la nouvelle émission Fidèles au poste.
«Tout le monde disait qu’il n’y avait rien dans les archives de TVA», dit Éric Salvail, qui a eu l’idée de l’émission il y a déjà quelques années, avec ses complices de 321 Productions, Nathalie Laberge et Jean-Marc Létourneau.
Comme pour les autres stations, les archives de TVA se trouvent aujourd’hui sur différents supports qui n’ont pas traversé les époques: «Les cassettes VHS, des deux pouces, des un pouce, des Bétacam, du DVCPRO, du 16 millimètres…, énumère Éric Salvail.
«Des fois, on trouve des affaires sur des bobines pratiquement mortes, alors il faut tout numériser», dit-il en précisant que son équipe a déjà numérisé 2 000 heures de matériel.
Au fil des ans, la station a éliminé plusieurs émissions qui auraient aujourd’hui fait les délices des téléspectateurs.
«Ils détruisaient au fur et à mesure, ici, explique l’animateur. C’était ça, c’était la mentalité, alors qu’aujourd’hui, on sait que ça vaut de l’or, pas monétairement, mais au niveau du patrimoine, des archives, de ce qu’on a été. Il faut savoir d’où on vient pour savoir où on va. (...) À l’époque, les bobines étaient grandes comme la table. Il fallait qu’ils fassent de la place.
«Cré Basile, il n’y a plus rien de ça. Jeunesse d’aujourd’hui, on n’a que quelques extraits. Souvent, les artistes ont des choses à la maison. Moi, personnellement, j’ai toutes mes archives. Fais-moi un dessin, on en a quelques-uns…»
Le concept de Fidèles au poste tourne autour des archives de TVA, mais c’est avant tout un jeu. Il y aura, par exemple, le jeu des lunettes: un artiste porte des lunettes spéciales avec lesquelles il est le seul à voir un extrait d’émission. Il doit ensuite faire deviner de quelle émission il s’agit à son équipe, sans dire un mot.
UN STUDIO PARTICULIER
À TVA, le studio de Fidèles au poste est le même qui a jadis servi au talk-show d’Éric Salvail, On n’a pas toute la soirée.
Le décor est dynamique, bien éclairé (avec des barres de couleurs illuminées au sol qui donne un effet très particulier), et le studio est encerclé par une quarantaine d’écrans. Comment faire autrement pour une émission sur la télé?
«J’ai souvent travaillé dans ce studio-là, confie Éric Salvail. J’y ai fait Point J pendant des années comme animateur de foule, j’y ai fait deux semaines du Grand blond avec un show sournois avant d’aller à Paris avec Julie. On y a aussi fait On n’a pas toute la soirée, qui a été pour moi une superbe expérience.
«Il y a quelque chose dans ce studio-là qui est tout petit. Évidemment, on aurait préféré être dans un plus grand studio. Le réalisateur, plus que moi, aurait aimé ça que ce soit plus grandiose, mais on a réussi à donner de la profondeur à ce studio-là. On fait le maximum avec ce qu’il y a.»
Éric Salvail raconte s’être «battu très fort» pour que l’émission soit présentée en haute définition.
«Je trouve qu’en 2010, pour un show à la télé, il faut être en HD. «Déjà que nos extraits ne le sont pas…», fait-il remarquer.
POUR PLUSIEURS ANNÉES
L’arrivée en ondes de Fidèles au poste coïncide avec le 50e anniversaire de TVA, mais le jeu «aurait pu voir le jour l’année passée ou l’année prochaine», indique son animateur.
«On prévoit être là pour plusieurs années», dit-il en précisant s’être assuré, avec la direction de TVA, que les archives du réseau étaient suffisamment importantes – et intéressantes – pour alimenter une émission comme la sienne sur une longue période.
Éric Salvail est très fier de Fidèles au poste, qui est un concept purement québécois et non l’adaptation d’une autre émission créée ailleurs dans le monde.
«On a tellement de talent au Québec et je trouve tellement qu’on achète sans arrêt des émissions à l’étranger. Je ne parle pas contre les autres, parce qu’on l’a fait nous-mêmes avec Dieu Merci! Mais une bonne idée, c’est une bonne idée.»
Étonnamment, l’animateur se montre très «zen», particulièrement calme à quelques jours de la première émission.
«Je vais me fier à mon sens de la répartie et j’ai juste à m’amuser. Je multiplie deux passions: la télévision, et l’animation. (...) Je suis comme un poisson dans l’eau, dit-il, avant de prévenir qu’il aura sûrement des ajustements à faire après la première, le 30 septembre prochain.
«Le premier show, je vais probablement avoir une coche de trop au niveau du pitch et je vais tomber sur les nerfs au monde», dit-il en riant.
Un souhait: plus de «fluidité» entre les réseaux
Éric Salvail se considère comme étant privilégié à TVA, mais il aimerait néanmoins que ce soit plus fluide entre les réseaux.
«Comme artiste, moi, la guerre des réseaux, je la comprends, je suis pas imbécile, mais j’aime ça quand c’est plus fluide. Je l’ai vécue la fluidité à Dieu Merci! et j’ai aimé ça. Quand j’ai invité Patrice L’Écuyer, ils n’en ont pas fait de cas et Radio-Canada non plus», explique-t-il.
Véronique Cloutier viendra d’ailleurs sur le plateau de Fidèles au poste en novembre, et Éric Salvail compte, lui aussi, lui rendre visite à son émission de Radio- Canada, qui porte aussi sur les archives télévisuelles.
«Tout le monde est passé à TVA et on a des archives qui vont avec ça. Je veux avoir les meilleurs joueurs possibles dans mes équipes», défend-il.
À propos de la guerre des réseaux et des personnalités d’antenne qui visitent rarement le studio du compétiteur, Éric Salvail rappelle que ça ne se passe pas seulement à TVA.
«On a toujours l’impression que TVA est le grand méchant loup dans l’histoire, mais ça se passe partout, et des deux côtés, dit-il en admettant que la direction de TVA lui demande parfois d’attendre que la saison soit plus avancée avant d’inviter une tête d’affiche de Radio-Canada.
«Ce que je comprends très bien, et j’ai la preuve qu’ils font la même affaire de l’autre côté. J’ai été invité à Pyramide en début de saison et ça a été refusé à la programmation. Ils m’ont réinvité pour la fin octobre et il n’y avait pas de problème pour Radio-Canada», raconte-t-il.
«J’INFORME»
Lorsque Radio-Canada l’invite, Éric Salvail dit prendre soin d’en informer la direction de TVA.
«Je ne demande pas la permission, j’informe que je m’en vais de l’autre côté.
«Je suis un gars qui aime la télévision. J’aime aller à Pyramide. Est-ce que ça m’apporte une visibilité que j’ai pas à TVA? Ben non, pas du tout. C’est pas parce que je vais à Pyramide que j’augmente ma notoriété. (...) Quand je veux aller à Pyramide, c’est parce que ça me fait tripper. J’aimais ça aller à La Fureur. J’aime ça jouer à des jeux, c’est pour ça que j’en crée un d’ailleurs», dit-il en parlant de Fidèles au poste.
De la même façon, la direction de TVA ne lui a jamais interdit d’inviter quelqu’un de Radio Canada.
«J’ai carte blanche à Dieu Merci! J’ai invité Véro, Patrice L’Écuyer... Ils sont tous venus», souligne-t-il.
Éric Salvail dit être privilégié d’avoir la confiance de TVA depuis autant d’années.
«Est-ce que je suis privilégié comme animateur et producteur? Tellement, ça n’a aucun sens.
«J’ai la chance d’avoir la confiance de TVA, ce qui est un privilège aujourd’hui et j’en suis très conscient. Ça vient avec le fait d’être associé à un réseau et ça se peut qu’on n’ait pas la chance d’aller ailleurs aussi fréquemment qu’on le voudrait.»