Chronique
Je ne sais plus
Richard Martineau
13/02/2011 03h18
Vous souvenez-vous de la chanson de Jean Gabin Maintenant, je sais? Gabin disait que, lorsqu'il était jeune, il savait tout, mais que plus il vieillissait, plus il se rendait compte qu'il ne savait rien. Eh bien, je me sens comme ça avec l'écologie. Plus je lis sur la chose, plus je suis perdu et moins j'ai l'impression de comprendre.
Calculez votre empreinte
Avant, c'était facile d'être écolo. On recyclait nos vieux journaux, on faisait du covoiturage trois jours par semaine et on avait une place au paradis à la fin de ses jours.
Aujourd'hui, c'est pas mal plus compliqué.
Il faut calculer l'empreinte écologique des objets que nous achetons, savoir où ils ont été fabriqués, dans quelles conditions, s'ils ont pris le train ou l'avion, s'ils sont recyclables, si la pile de votre voiture électrique a été fabriquée dans une usine qui utilise du charbon, si la peinture de votre véhicule hybride contient du plomb, si le gars qui a vissé les écrous de votre moteur buvait du café équitable pendant ses pauses, etc.
Méchant contrat!
Plein mon sac
Prenez le dossier sur les sacs en plastique que nous avons publié il y a quelques jours.
Pendant des années, on nous a rebattu les oreilles avec les maudits sacs en plastique. À un point tel que chaque fois qu'on demandait un sac en plastique à l'épicerie, la caissière levait les yeux au ciel et soupirait comme si on venait de lui demander où étaient les revues cochonnes.
Or, qu'apprend-on aujourd'hui? Que les sacs en plastique sont plus écologiques que les sacs réutilisables!
La même chose est arrivée avec l'ampoule fluocompacte. Un jour, c'était la plus belle invention depuis le poil à gratter, le lendemain, c'était une bombe à retardement contenant du mercure.
Le schisme du schiste
Bombardé de tous bords et de tous côtés par des études qui se contredisent, se réfutent et s'annulent, l'homme moderne ne sait plus que penser.
L'autre jour, pour l'émission Les Francs-Tireurs, j'ai discuté avec trois militants qui étaient contre l'exploitation du gaz de schiste. Ils étaient tellement convaincants qu'à la fin de notre rencontre j'étais prêt à crier des slogans à leurs côtés.
Mais je suis sûr que si j'avais rencontré trois spécialistes qui défendaient l'autre option deux heures plus tard, mes récentes convictions auraient été ébranlées.
Une étude dit ceci, une étude dit cela, un rapport affirme ceci, un rapport affirme cela... Pour chaque étude qui dit blanc, vous en trouverez une autre qui dit noir.
Comment faire le tri dans cet océan de chiffres et de statistiques?
Chicane de spécialistes
Ça me fait penser au débat référendaire. Au début, c'était une question de coeur, de passion, de conviction. T'étais pour ou t'étais contre. Pas de tataouinage. Mais après, c'est devenu une bataille de chiffres: telle étude dit que ce serait payant, une autre étude dit que ça mettrait l'économie du Québec à terre...
Résultat: engourdis par ce débat qui ne parlait que de taxes et de points d'impôts, les citoyens ont complètement décroché.
C'est la même chose pour le débat sur l'écologie. On a de plus en plus l'impression que c'est rendu une chicane de spécialistes. Alors on tire la plogue.
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