Le vendredi 9 décembre 2011
Touche pas à mon « char »
David Descoteaux
Je me souviens de ma vieille Hyundai Excel rouge et noir, tatouée de collants de Bad Religion et autres groupes punk rock. Et des moments de honte qu’elle me procurait. Comme cette fois à la commande à l’auto du McDo. Pendant que j’attends mon repas, l’échappement de mon auto crache une fumée épaisse et malodorante. Coup d’œil dans mon rétroviseur : un mur de boucane bleu cache les voitures derrière moi. Couper le moteur? Impossible. L’Excel risque de ne jamais redémarrer. Parfois c’est long, recevoir sa commande à l’auto…
En jargon économique, j’imposais une « externalité négative » aux passagers des voitures derrière — qui ne manquait pas de me le faire remarquer! C’est pour corriger ce genre de situations qu’on justifie une intervention du gouvernement. Tout le monde profite d’un air plus pur. Mais individuellement, on préfère parfois accrocher notre silencieux avec de la broche que de le remplacer.
Arrive ce projet de loi sur l’inspection des minounes, déposé mercredi par le ministre de l’Environnement Pierre Arcand. L’État veut imposer, à terme, une inspection environnementale de tous les véhicules de plus de huit ans. Et ce, à tous les 24 mois. En plus d’une inspection mécanique. Le but est noble : réduire la pollution. Et s’assurer que les véhicules qui circulent sur nos routes soient sécuritaires.
Des interrogations
Mais plusieurs questions demeurent sans réponse. D’abord, combien ça va coûter? Le ministre parle de 60 $. Coup de fil à mon garagiste. Pour l’inspection environnementale, un minimum de 100 $, probablement plus (tout dépend de ce que le gouvernement exigera comme vérification — utilisation d’un scanneur ou non, etc.). L’inspection mécanique : minimum 75 $. Le danger, me dit mon mécano, est que certains garagistes pourraient profiter de la nouvelle loi pour exagérer et surfacturer.
Tout ça bien sûr, c’est si vous n’avez rien à réparer ou installer sur votre minoune après l’inspection. Le cas échéant, attachez votre tuque. Rappelons que ces inspections devront se faire tous les deux ans. Certains y verront là une nouvelle « taxe » qui frappera les étudiants et les moins nantis.
Et qui fera ces inspections? N’importe quel garage (dont plusieurs devront s’équiper en conséquence)? Des garages accrédités par l’État? (Comme pour les garderies à 7 $, ouf…) Va-t-on créer un nouveau programme? Embaucher de nouveaux fonctionnaires, avec emplois à vie et régimes de retraite blindés (et impayables)? Combien de millions $ cela va-t-il coûter aux contribuables?
Qui doit payer?
Les intentions sont nobles ici (surtout pour l’inspection mécanique obligatoire, qui se justifie beaucoup plus). Mais si le gouvernement veut faire passer la pilule, il devrait trouver les fonds pour financer lui-même ces inspections. À partir de ses revenus actuels. On saigne assez les automobilistes comme ça. N’y a-t-il pas moyen de prendre des revenus provenant des taxes sur l’essence pour financer ces inspections? Aucune économie à faire dans la gestion dela STM ou de l’AMT, afin de libérer des fonds pour ce programme? Posez la question, c’est y répondre…
À quand une gestion de l’État où, pour créer un nouveau programme, il faudrait d’abord en éliminer un autre? Parce qu’évidemment, les millions que coûtera ce programme seront pelletés sur la dette, encore.
Mais qui sommes-nous pour nous plaindre? Selon le gouvernement, qui cite un sondage effectué en 2011, le trois quarts d’entre nous sont d’accord avec ce programme. Vous vous souvenez d’avoir répondu à ce sondage? Moi non plus.
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