Extrait de
IV - Les emplois occasionnels dans la fonction publique québécoise
Les 24 et 25 février 1998, la Commission parlementaire s'est réunie pour examiner le dossier des occasionnels au gouvernement du Québec. Elle a entendu les dirigeants et porte-parole des principales parties impliquées dans ce dossier. La première journée, la Commission a entendu le président par intérim de la Commission de la fonction publique, M. Jean-Paul Roberge, et les commissaires, M. Michel Poirier et Mme Hélène Roy-Lemieux, le président du Syndicat de la fonction publique, M. Serge Roy, le président du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, M. Robert Caron, le vice-président du Syndicat des agents de conservation de la faune du Québec, M. Guy Sylvestre, le président du Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec, M. Réjean Lagarde, et le président du Syndicat des professeurs de l'État du Québec, M. Luc Perron.
La seconde journée, la Commission a entendu la porte-parole de la Coalition des employés à statut précaire du gouvernement du Québec, Mme Nicole-Anne Cloutier, le porte-parole du Regroupement des professionnels occasionnels du gouvernement du Québec, M. Jocelyn Dionne, et le secrétaire du Conseil du trésor, M. Pierre Roy.
L'origine de ce mandat provient du fait que le Conseil du trésor a adopté une nouvelle Directive concernant les emplois occasionnels de la fonction publique, le 23 septembre 1997. Auparavant, la Commission de la fonction publique avait émis un avis sur cette politique. De son côté, tel que le prescrit l'article 84 de la Loi sur la fonction publique lorsque l'on soustrait un emploi ou une catégorie d'emploi de certaines dispositions de la loi, le Conseil du trésor a fait un rapport à l'Assemblée nationale qui a été déposé en octobre 1997. Ce sont ces événements qui ont incité la Commission de l'administration publique à tenir des auditions sur ce sujet.
Les contraintes économiques et budgétaires obligent les États à réduire la taille de leur fonction publique; il faut donc faire plus avec moins, et différemment. Dans ce contexte, la gestion des ressources humaines présente un défi important pour le gouvernement. Les gestionnaires souhaitent une déconcentration des responsabilités pour une meilleure souplesse dans la gestion des ressources humaines. Toutefois, plusieurs contraintes apparaissent entre cette volonté et sa réalisation : les conventions collectives, la classification des postes et les diverses politiques et directives telles que les plans d'embauche ou directives concernant la dotation qui garantissent certains principes d'équité et d'égalité.
Cette souplesse dans la gestion des ressources humaines, inaccessible pour les employés permanents, est d'usage courant pour les employés occasionnels. Conséquemment, on retrouve dans la fonction publique québécoise deux systèmes de dotation des emplois qui coexistent plus en parallèle qu'en complémentarité, provoquant pour certains groupes d'occasionnels des iniquités.
Le Conseil du trésor est l'ultime responsable de la gestion des emplois occasionnels. Cependant, depuis plusieurs années, il partage cette responsabilité avec les ministères et organismes. Cette délégation dans la gestion des emplois occasionnels aide les ministères et organismes à mieux gérer la décroissance.
En 1996-1997, 21 998 personnes différentes ont été engagées comme ressources occasionnelles. En comparaison, le nombre d'employés réguliers était de 50 384 personnes en mars 1997. Sur la base d'un équivalent temps complet, la proportion d'employés occasionnels est de 17,7%. Les gestionnaires et les directions des ressources humaines des ministères doivent donc consacrer une partie importante de leurs efforts à gérer l'embauche du personnel occasionnel. Selon les données préliminaires les plus récentes pour l'année 1997-1998, l'État consacre près de 400 millions de dollars en salaires pour cette catégorie d'employés, soit 16,6 % de la masse salariale. Enfin, il est à souligner que 56,6 % des employés occasionnels sont des femmes.
Les occasionnels selon le motif d'embauche en 1997-98¹
Motifs d'embauche Nombre
d'individus ² % Masse salariale %
Cyclique et saisonnier
6 362
27,88
92 838 726 $
23,8
Liste d'appel téléphonique
309
1,35
5 478 727 $
1,4
Projet spécifique
7 442
32,61
175 575 822 $
45
Remplacement d'absence
1 539
6,74
31 362 513 $
8
Remplacement d'absence/Surcroît temporaire
277
1,21
3 101 951 $
0,8
Surcroît temporaire
6 889
30,19
81 909 101 $
21
Total 22 818 100 390 267 446 $ 100
1 Informations compilées par le Conseil du Trésor à partir des données fournies par les ministères et organismes.
2 Ces données représentent environ 98% du personnel occasionnel.
Les lacunes observées
Les témoignages entendus devant la Commission ont mis une fois de plus en lumière des problèmes importants dans la gestion des ressources humaines occasionnelles au gouvernement du Québec. Le plus notoire est celui des occasionnels de longue durée que l'on désigne familièrement comme de «faux occasionnels». Ces employés ont cumulé plusieurs années de services, de façon continue, dans le même poste, sans détenir le statut de permanent. Le plus souvent, ils sont engagés sur des projets spécifiques d'une durée déterminée qui peuvent s'étendre sur une très longue période (14 ans pour le projet de la réforme du cadastre) ou faire l'objet d'un renouvellement constant.
Dans un passé récent, certaines personnes ont pu obtenir leur permanence par la tenue de concours réservés aux occasionnels qui avaient cumulé un certain nombre d'années d'ancienneté dans le même poste. Toutefois, tous n'ont pas pu intégrer la fonction publique. En outre, certains n'ont pu accéder à la permanence en raison des coupures importantes de postes dans la fonction publique qui ont touché en tout premier lieu les temporaires.
Également, il n'y a eu aucun changement majeur dans le cadre de gestion des employés occasionnels ces dernières années. Conséquemment, le cadre actuel engendre ou maintient au fil des ans un nombre important de «faux occasionnels», c'est-à-dire les personnes qui ont oeuvré plusieurs années, de façon continue, dans le même poste. Voici les principaux éléments de la problématique des occasionnels au gouvernement du Québec
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autre extrait du même texte: L'audition du président du Syndicat de la fonction publique
Le Syndicat de la fonction publique représente environ 40 000 membres dont plus de 10 000 possèdent le statut d'occasionnel. Selon le président, ce nombre est en croissance. Le syndicat critique l'attitude du Conseil du trésor dans sa gestion des ressources humaines. On lui reproche la longueur des délais pour la mise en oeuvre des listes de rappels négociées en 1995 et son refus d'étendre à 48 mois la liste de rappel des employés temporaires mis à pied en 1993-1994. Cette dernière liste, négociée par les syndicats en 1993-1994, donnait l'opportunité aux temporaires mis à pied en raison des coupures de postes d'être inscrits dans un processus de rappel. Enfin, on demande à la Commission de la fonction publique d'enquêter sur les raisons particulières qui expliquent l'augmentation importante des «faux occasionnels».
La discussion a porté sur la définition d'un emploi occasionnel retenue par la directive du Conseil du trésor. Le Syndicat considère que ce n'est pas tant la définition qui pose problème mais plutôt l'utilisation abusive qui en est faite.
L'audition du président du Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec
Ce syndicat met de l'avant la nécessité de posséder un système d'embauche impartial basé sur les aptitudes pour combler les emplois occasionnels. Quant au problème des «faux occasionnels», il propose la tenue annuelle de concours réservés pour les personnes ayant plus de trois ans de services et une modification législative pour titulariser les occasionnels de longue durée (5 ans). La discussion avec les membres de la Commission a porté principalement sur ces éléments.
La discussion s'est également étendue à l'article 22 de la Directive sur les occasionnels. Il stipule que le classement et le crédit d'expérience doivent être attribués à l'employé en tenant compte des attributions de la classe d'emploi ou du grade auquel appartient l'emploi à combler. Dans certains cas, des occasionnels embauchés sur d'autres postes auraient subi des baisses importantes de salaire. Le président du syndicat assimile cet article à une «clause orpheline».
Enfin, la Commission s'est intéressée à la recommandation d'acheminer au syndicat et d'afficher la liste des postes de nature provisoire à combler dans la fonction publique. Cette recommandation viserait à s'assurer que le principe de l'ancienneté sur lequel repose les listes de rappel soit respecté.
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pour le lire au complet:
http://www.assnat.qc.ca/archives-35leg2 ... p4.html#IV