Je sais que ça ne concerne pas la Russie, mais comme on parle de la Chine, voici un article que j'ai trouvé. Je ne connaissais pas bien la politique des naissances de la Chine et je croyais que c'était encore en vigueur la limite de 1 enfant par famille. Ce texte m'a bien renseignée, peut-être peut-il intéresser quelqu'un d'autre !
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http://www.monde-diplomatique.fr/1999/01/BEAUGE/11508" onclick="window.open(this.href);return false;
L’enfant unique, fin d’une politique
Par Florence Beaugé
Janvier 1999
S’AGIT-IL d’un tournant, ou d’un artifice dialectique destiné à amadouer l’Occident, notamment le Congrès américain ou le Fonds des Nations unies pour les populations (Fnuap), afin ne pas se voir refuser des aides financières espérées ? Il est trop tôt pour le savoir. Reste que, pour la première fois depuis 1980, les autorités chinoises sont en train d’opérer un virage peut- être décisif en matière de politique familiale. A la fin de l’ère Mao, en effet, une réduction draconienne de la natalité fut entreprise à travers la politique de l’enfant unique. Les cadres d’Etat, les salariés et d’une manière générale les citadins se virent interdire d’avoir plus d’un enfant, sauf exceptions approuvées par les autorités, tandis que les paysans étaient « encouragés » à faire de même. il s’agissait de l’une des politiques démographiques les plus volontaristes et les plus contraignantes du monde.
Pas question pour autant d’admettre, aujourd’hui, les erreurs du passé. Au mieux, on accepte l’idée de quelques bavures, dues à des travailleurs sociaux jusque-là mal préparés à leur tâche de conseillers en matière de planning familial. Mais les choses ont changé et le leitmotiv officiel est désormais le suivant : « Nous encourageons les couples à n’avoir qu’un enfant. Mais nous ne faisons que les encourager. Nous respectons leurs choix. » L’heure est en effet à la persuasion, non plus à la coercition. Six districts, et bientôt onze autres, font partie d’un projet pilote destiné à s’étendre à l’échelon national. Rapportée à la dimension de la Chine, l’expérience entamée en 1992 peut paraître marginale, mais elle pourrait être la traduction, sur le terrain, d’une meilleure évaluation de la situation, par une partie des autorités chinoises.
Dans les centres de planning familial retenus, les femmes se voient à présent offrir une véritable information sur les moyens contraceptifs et la possibilité de choisir entre diverses méthodes, ce qui représente une réelle nouveauté. Si la pratique de la stérilisation demeure la norme pour environ 50 % des Chinoises pratiquant la contraception - c’est-à-dire 83 % de la population féminine, selon les statistiques officielles -, le stérilet gagne rapidement du terrain : 43 % des femmes optent aujourd’hui pour cette méthode aisément réversible.
EN ville, l’enfant unique reste la règle. Mais on note, là aussi, un assouplissement des règles. A Shanghaï, par exemple - treize millions d’habitants - , ainsi que dans certains quartiers de Pékin, une femme n’est plus tenue de demander une autorisation à son employeur ou à son comité de quartier avant d’entamer une première grossesse. En cas de seconde grossesse, elle ne se voit plus imposer un avortement ou une ligature des trompes. Cela signifie-t-il qu’elle pourra décider de ses maternités comme elle l’entend ? Pas vraiment.
D’abord parce qu’une seconde naissance en ville - bien qu’officiellement tolérée - se paie au prix fort : trois fois le montant annuel des revenus du couple, dans le cas de Shanghaï, par exemple. « Il ne s’agit pas d’une amende, répètent obstinément les responsables du planning familial local, mais du coût que représente un enfant supplémentaire pour le reste de la société. C’est normal que les parents versent une contribution en échange. » Ensuite, parce que la plupart des citadins ont intégré l’idée qu’une politique des naissances très restrictive constituait un impératif et se limitent d’eux-mêmes à un enfant, même s’il s’agit d’une fille.
Dans les campagnes, la politique de l’enfant unique n’a jamais atteint ses objectifs. Dès 1984, le gouvernement avait dû, devant le mécontentement populaire, accepter officiellement deux enfants par couple. Il n’est pas rare pourtant de rencontrer des familles nombreuses. L’absence de système généralisé de retraites continue de pousser les parents à avoir une descendance importante, de préférence des garçons, les filles étant destinées, quant à elles, à quitter leur famille pour épouser celle de leur mari. Pour rester dans la légalité - sans avoir à passer par le système du « piston » - de plus en plus de Chinois, bien que membres de l’ethnie majoritaire Han (90 % de la population) cherchent et obtiennent assez aisément à se faire reconnaître comme étant des descendants de minorités ethniques, celles-ci étant soumises à des règles moins strictes. Les Ouïgoures du Xinjiang, notamment, de même que les Tibétaines sont autorisées à avoir jusqu’à trois, voire quatre enfants.
Reste qu’en moins de trente ans, la fécondité moyenne des Chinoises est passée de 5,7 enfants à environ 2 (selon les statistiques officielles) (1). La baisse a été d’une brutalité inouïe, avec des conséquences sociales et sociologiques encore difficilement mesurables : pyramide des âges déséquilibrée, population vieillissante, nombreux avortements de foetus féminins, abandons et infanticides de petites filles, enfants non déclarés à l’état civil, etc. « Pour nous, démographes, la Chine représente un cas de figure jamais rencontré, jamais étudié, souligne une experte de la Fondation Rockefeller, qui se rend régulièrement sur le terrain. Il s’est produit ici, en une génération, à peine deux, ce qui est arrivé en Europe en l’espace de cent cinquante ou deux cents ans. »
LA Chine aurait-elle pu faire l’économie de cette politique drastique de l’enfant unique ? Les démographes sont très divisés là-dessus. « Pour ma part, je le pense, et je remarque que, de plus en plus souvent, certains responsables chinois avouent, en privé, qu’ils ont fait une erreur, et qu’ils auraient abouti aux mêmes résultats avec l’éducation et l’information, en particulier celle des femmes, poursuit cette démographe américaine. Ils auraient en outre évité une désastreuse image de marque à l’échelle internationale. » Volonté de se concilier, sans l’avouer, les donateurs américains et les bonnes grâces de la communauté mondiale (surtout depuis la conférence du Caire sur la population en 1994 et celle sur les femmes en 1995 à Pékin) et incapacité de plus en plus grande de l’Etat à contrôler la vie privée des couples, dans le contexte de libéralisation et de réformes économiques : telles sont sans doute les deux principales raisons de cette humanisation de la politique familiale (2). L’objectif final - ne pas dépasser 1,6 milliard d’habitants au milieu du siècle prochain - n’a pas varié, officiellement. C’est pourquoi rien ne garantit qu’il n’y aura pas de nouveaux changements de cap, d’autant que l’administration en place à Pékin est loin d’avoir un avis unanime sur la conduite à tenir.
Les uns continuent de prôner un strict contrôle des naissances. Les autres misent sur le développement économique et la baisse naturelle de la fécondité. Telle la libérale Mme Cong Jun, directrice de département au planning familial de Pékin, qui déclare : « Chaque personne née enfant unique, se mariant avec un autre adulte n’ayant lui même ni frères ni soeurs, a déjà le droit d’avoir deux enfants. Cette politique de l’enfant unique n’aura duré en fait que le temps d’une génération. Elle fait déjà presque partie du passé en Chin