Petit cours de fiscalité...

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.anthurium.
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Message par .anthurium. »

Petit cours de fiscalité...

3 novembre 2007 - 06h00

La Presse

Claude Picher

Il est présentement un document qui connaît une certaine popularité chez les internautes, et il est possible que vous en ayez déjà reçu une copie dans votre courrier électronique.

Pour ma part, je l'ai reçu trois fois, de trois sources différentes: un collègue de travail et deux lecteurs.

J'ignore qui a rédigé ce texte. Paraît-il que ce serait un professeur d'université qui essaie d'expliquer le fonctionnement des impôts, mais ce n'est pas sûr.

Il est, par contre, une chose dont je suis certain: l'auteur connaît le régime fiscal sur le bout des doigts. À quelques poussières près, les proportions et les chiffres qu'il fournit sont exacts.

Les experts utilisent parfois un vocabulaire technique assez rébarbatif. Par exemple, s'ils veulent diviser les contribuables en 10 groupes égaux selon les tranches de revenus, ils parlent de déciles.



Le Québec compte 5 779 926 contribuables; il y a donc 577 993 contribuables dans chaque décile, le premier comprenant les plus pauvres. Nulle part l'auteur ne parle de décile; dans son texte, chaque décile est remplacé par... un buveur de bière!

Je ne peux m'empêcher de vous transmettre ce bijou. C'est un chef-d'oeuvre de vulgarisation, et je lève mon chapeau au père de cette trouvaille. Et j'insiste là-dessus: le texte que vous allez lire reflète avec précision la progressivité du régime fiscal québécois.

Chers lecteurs, je vous laisse apprécier par vous-mêmes, en gardant à l'esprit que le dixième homme, le plus riche, dans cette histoire, représente les Québécois qui gagnent 50 000$ ou plus.

////////////////

Supposons que tous les jours, 10 hommes se retrouvent pour boire une bière et que l'addition se monte à 50$ (normalement, 5$ chacun). S'ils payaient la note de la façon que l'on paie les impôts, selon les revenus de chacun, on aurait l'exemple suivant:

Les quatre premiers, les plus pauvres, ne paieraient rien, zéro cent.

Le cinquième paierait 50 cents.

Le sixième paierait 1,50$.

Le septième paierait 3,50$.

Le huitième paierait 6$.

Le neuvième paierait 9$.

Le dernier, le plus riche, devrait payer 29,50$ à lui tout seul.

On arrive donc bien à 50$.

Ils décidèrent de procéder comme décrit. Les dix hommes se retrouvèrent chaque jour pour boire leur bière et semblèrent assez contents de leur arrangement. Jusqu'au jour où le tenancier du bar les plaça devant un dilemme: «Comme vous êtes de bons clients, dit-il, j'ai décidé de vous faire une remise de 10$. Vous ne paierez donc vos dix bières que 40$.»

Le groupe décida de continuer à payer la nouvelle somme de la même façon. Les quatre premiers continuèrent à boire gratuitement. Mais comment les six autres, les clients payants, allaient-ils diviser les 10$ de remise de façon équitable? Ils réalisèrent que 10$ divisés par 6 faisaient 1,66$.

Mais s'ils soustrayaient cette somme de leur partage, alors le cinquième et le sixième homme allaient être payés pour boire leur bière (1,16$ et 16 cents). Le tenancier suggéra qu'il serait plus judicieux de réduire l'addition de chacun selon le même barème et fit donc les calculs.

Alors?

Le cinquième homme, comme les quatre premiers, ne paya plus rien, Un pauvre de plus.

Le sixième paya 1$ au lieu de 1,50$ (33% de réduction).

Le septième paya 2,50$ au lieu de 3,50$ (28% de réduction).

Le huitième paya 4,50$ au lieu de 6$ (25% de réduction).

Le neuvième paya 7,50$ au lieu de 9$ (17% de réduction).

Le dixième paya 24,50$ au lieu de 29,50$ (16% de réduction).

On arrive bien à un total de 40$.

Chacun des six clients payants paya moins qu'avant, et les quatre premiers continuèrent à boire gratuitement.

Mais une fois hors du bar, chacun compara son économie.

«J'ai seulement eu 50 cents sur les 10$ de remise», dit le sixième et il ajouta, montrant du doigt le dixième: «Lui, il a eu 5$!!!»

«C'est vrai», s'exclama le septième. «Pourquoi il aurait eu 5$ de rabais alors que moi je n'ai eu que 1$? Le plus riche a eu la plus grosse réduction!»

«Attendez une minute, cria le premier homme. Nous quatre n'avons rien eu du tout. Le système exploite les pauvres».

Les neuf hommes cernèrent le dixième et l'insultèrent.

Le jour suivant, le dixième homme ne vint pas. Les neuf autres s'assirent et burent leur bière sans lui. Mais quand vint le moment de payer, ils découvrirent quelque chose d'important: ils n'avaient pas assez d'argent pour payer ne serait-ce que la moitié de l'addition.

Et cela est le reflet de notre système d'imposition. Les gens qui paient le plus d'impôts tirent le plus de bénéfice d'une réduction de taxe et, c'est vrai, ils resteront plus riches. Mais si vous les taxez encore plus fort et les condamnez à cause de leur richesse, ils risquent de ne plus se montrer.

Pour ceux qui ont compris, aucune explication n'est nécessaire.

Pour ceux qui n'ont pas compris, aucune explication n'est possible.
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Acrux
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Message par Acrux »




Excellente vulgarisation en effet  
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Gillo
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Message par Gillo »

Je vais laisser Michel Sawyer répondre pour moi...

Citation :

Le pichet à Picher
06 novembre 2007
Michel Sawyer

Le chroniqueur de La Presse, Claude Picher, soumettait samedi dernier à ses lecteurs une fable qui circulerait présentement sur Internet et qui refléterait, selon lui, assez fidèlement la fiscalité du Québec. Il n’a pu se retenir, écrit-il, pour nous faire connaître ce bijou.

Racontons brièvement. Dix hommes se rencontrent tous les jours pour prendre une bière. La facture monte à 50 $. Chacun paie selon ses revenus, ce qui explique que le plus riche paie 29,50 $, tandis que les quatre derniers ne paient rien.

Tout va bien jusqu’au jour où le tenancier du bar décide d’offrir à ses bons clients une remise de 10 $. Les dix hommes se partagent la remise dans les mêmes proportions, ce qui fait que les quatre derniers «continuèrent à boire gratuitement» (sic) et le cinquième, qui ne payait que 50 cents, ne paie plus, créant ainsi «un pauvre de plus» (re sic).

Le plus riche encaissant la plus grande part de la remise, la bisbille s’installe entre nos dix hommes à cause de ce nouveau partage qui profite d’avantage au plus riche. Ce dernier bénéficiant d’une remise de 5 $ sur sa facture.

Le lendemain, le plus riche ne se montre pas et, au moment de payer, les neuf hommes découvrent qu’ils n’ont pas assez d’argent.

La morale, selon cette fable, est la suivante : « Les gens qui paient le plus d’impôts tirent le plus de bénéfices d’une réduction de taxe et, c’est vrai, ils resteront riches. Mais si vous les taxez encore plus fort et les condamnez à cause de leur richesse, ils risquent de ne plus se montrer. »


Compenser le déséquilibre du marché
Voyons ça de plus près. D’abord, à la quantité de bière qu’ils boivent, ils devraient prendre un pichet.

Ensuite, lorsque les contribuables acceptent de mettre de l’argent en commun en payant leurs impôts, ce n’est pas pour boire de la bière mais pour se payer des services publics.

Deuxièmement, s’ils paient de façon inégale, c’est parce qu’ils doivent compenser pour le déséquilibre que crée le marché de l’emploi.

Ceux qui « boivent gratuitement » ne paient pas parce que le marché ne rémunère pas suffisamment leur travail pour qu’ils puissent contribuer… comme si une partie de leur travail était faite gratuitement.

La fiscalité reconnaît ce fait car c’est son rôle d’atténuer le déséquilibre créé par le marché.

Ainsi, ceux qui ne paient pas sont tout à fait justifiés de réclamer leur part de la remise. En fait, ils ne demandent rien d’autre que l’État réduise encore davantage l’écart créé par le marché.

Enfin, l’absence de l’homme le plus riche le lendemain laisse perplexe. S’il n’est pas revenu parce qu’il se serait senti trop taxé, c’est qu’il peut se permettre de se retirer comme si son activité économique était basée non pas sur son intérêt mais sur sa bonne volonté.

Il a alors eu une réaction bien irrationnelle de délaisser une situation qui l’a enrichi pour s’en aller ailleurs. À moins qu’il ait tout simplement décidé d’aller boire sa bière tout seul dans un paradis fiscal…

Là, nous sommes d’accord : le pichet à Picher, c’est vraiment pédagogique!

Michel Sawyer
Président général
Syndicat de la fonction publique du Québec --Message edité par gillo le 2007-11-10 11:40:57--
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