Le mardi 06 mars 2007
Poudre aux yeux
Lysiane Gagnon
La Presse
Incroyable, tout de même, qu'un parti qui est essentiellement la chose d'un seul homme ait réussi à faire dérailler complètement cette campagne électorale.
Mario Dumont est l'arbre qui empêche de voir la forêt. Or, dans le cas de l'ADQ, la forêt n'est qu'un champ de brindilles.
Bien sûr, en exploitant les passions enfouies au fond des chaumières - en particulier la tentation xénophobe et le ressentiment tenace que nourrissent les régions envers Montréal - M. Dumont peut se vanter de représenter pas mal de monde.
Mais l'ADQ n'est pas un parti au sens réel du terme. Ce parti n'a pas d'équipe à proprement parler - sa seule personnalité, outre son chef, est Gilles Taillon, l'ancien président du Conseil du patronat.
Et ce parti n'est pas sérieux. Il s'est donné un petit programme simple et court, sympathique par plusieurs côtés, ne serait-ce que parce qu'il évite la langue de bois, qu'il s'intéresse à la classe moyenne, si négligée, et qu'il est souvent plus inspiré par le bon sens que par l'idéologie. Mais l'on ne s'est même pas donné la peine de chiffrer les promesses, sous prétexte qu'il faut attendre de savoir combien d'argent le budget fédéral octroiera au Québec. C'est ridicule, et cela relève d'une mentalité de quêteux. (Les deux autres partis, incidemment, sont également suspendus au futur budget d'Ottawa, l'un pour le critiquer, l'autre pour s'en repaître. Cette dépendance obsessionnelle est franchement humiliante. Le Québec n'est-il pas capable de prendre ses responsabilités?)
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Certes, l'on pourrait dire que l'ADQ n'a rien à envier à ce qu'était le PC de Stephen Harper aux dernières élections. Au Québec, les conservateurs n'avaient à peu près pas d'organisation, et à part Lawrence Cannon, leurs candidats étaient inconnus du grand public. Mais il y a des différences capitales.
D'une part, les conservateurs québécois appartenaient à un grand parti bien implanté dans plusieurs régions du Canada, et le PC n'était pas l'affaire d'un seul homme.
D'autre part, et surtout, les thèmes que M. Harper exploitait au Québec n'avaient pas pour effet de semer la division et d'attiser les préjugés. Car c'est bien cela, avant toute chose, que l'on peut reprocher à Mario Dumont. C'est de s'être saisi du délicat problème de l'immigration et des minorités religieuses pour en faire un thème de campagne.
Soit, il n'en parle pas tous les jours, et pas toujours directement, mais c'est ce qui fait son fonds de commerce, c'est cela qui est la toile de fond de sa campagne.
L'ADQ a commencé à monter dans les sondages très précisément au moment où Mario Dumont a embarqué dans la carriole de Hérouxville. Son étoile a continué à monter quand il sauté sur l'affaire du hidjab, exploitant de façon éhontée un incident dont la victime était une fillette de 11 ans, dramatisant l'affaire comme si nos terrains de soccer menaçaient de se transformer en mosquées.
Le pire a été de voir Jean Charest, un homme pourtant enclin à la tolérance et à l'ouverture, approuver la décision de l'arbitre de Laval pour éviter d'être doublé sur sa droite par Mario Dumont. Cela montre à quel point les libéraux ont peur de l'ADQ (non sans raison d'ailleurs).
Remarquez, personnellement, je n'aime pas voir des femmes voilées. Je les tolère, c'est tout. Mais enfin, soyons sérieux: le foulard serait un risque de strangulation? Que dire alors des autres risques du soccer? Des membres cassés et des blessures à la tête résultant d'une mauvaise chute ou d'une collision violente?
Que se passe-t-il dans la tête d'une enfant de 11 ans brutalement exclue d'un tournoi où elle aurait brillé dans le sport qui la passionne? Faut-il renvoyer les petites musulmanes à l'univers clos des milieux intégristes, ou au contraire leur permettre de s'épanouir par le sport et de côtoyer des jeunes d'autres horizons?
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Évidemment, Mario Dumont est fort de la faiblesse de ses adversaires. Le bilan du gouvernement Charest est loin d'être glorieux, et André Boisclair n'avait vraiment pas besoin de déclarer, au beau milieu de la controverse sur les accommodements raisonnables, qu'il faudrait décrocher les crucifix à l'Assemblée nationale.
M. Dumont n'est pas Le Pen, et il mesure habilement ses propos. Il reste que dans la foulée de ses sorties contre les «accommodements raisonnables» s'engouffrent toutes sortes de gens, y compris les chauvins, les racistes et les nationaleux de l'ancien temps. On en voit, maintenant, qui triomphent...
Hélas! on le constate aujourd'hui, la démagogie paie.
http://www.cyberpresse.ca/article/20070 ... CPOPINIONS --Message edité par Beppo le 2007-03-07 19:35:02--
Dumont vu par Lysiane Gagnon et Alain Dubuc.
L'autonomie, la force de Mario Dumont
Alain Dubuc
Collaboration spéciale, La Presse
À plusieurs reprises, Jean Charest s'en est pris à l'ambiguïté constitutionnelle de Mario Dumont, exigeant qu'il précise dans quel camp il se rangeait: fédéraliste ou souverainiste? Il ne pouvait probablement pas faire un plus beau cadeau au chef de l'ADQ.
Parce que l'un des ingrédients secrets de la recette adéquiste, que l'on a eu tendance à sous-estimer, c'est sa profession de foi autonomiste. Et ce qui en fait la force, c'est justement qu'elle permet à Mario Dumont de n'être dans aucun des deux camps et de refuser de se définir comme fédéraliste ou comme souverainiste.
Il est vrai que le cheminement constitutionnel de Mario Dumont a été particulièrement tortueux. D'abord jeune libéral, il a quitté le PLQ pour fonder un parti très nationaliste, l'ADQ, autour du rapport Allaire, pour ensuite devenir souverainiste quand son parti s'est joint aux forces du OUI, en 1995, avant de se faire apôtre du moratoire et affirmer que les questions constitutionnelles n'étaient pas sur son radar, pour enfin définir l'ADQ comme un parti résolument autonomiste.
Mais dans tous ces virages, typiques de ce qu'ont vécu un grand nombre de Québécois, on retrouve une constante, le désir de Mario Dumont de trouver une troisième voie pour se définir en dehors des deux courants qui monopolisent le débat politique au Québec, et qui le paralysent. Sa politique autonomiste est l'aboutissement de ce processus.
Cet effort d'être quelque part bien au milieu, ni fédéraliste dans le sens classique du terme, ni souverainiste, plaît à un grand nombre de gens. On a pu voir, depuis le début de la campagne, les bienfaits immédiats de cette prise de position, qui permet à l'ADQ d'être un refuge, tant pour les fédéralistes insatisfaits du gouvernement Charest que pour les souverainistes qui n'appuient pas André Boisclair.
Mais au delà de ces gains tactiques, ce cheminement a des résonances beaucoup plus profondes. Le sentiment autonomiste n'a rien de nouveau au Québec. Tous les premiers ministres, depuis Duplessis, ont été autonomistes, chacun à leur façon. Avec son sens de la formule, le chef adéquiste a en quelque sorte mis un copyright sur un terme qui décrit certainement le mieux le sentiment d'une majorité de Québécois.
Le fil directeur de notre vie politique, c'est le nationalisme, que les fédéralistes francophones expriment tout autant que les souverainistes, à travers l'attachement à une nation qui doit s'affirmer, qui doit avoir les outils dont a besoin une minorité, qui doit maintenir des rapports de force avec le reste du Canada, entre autres à travers l'État. Le rêve québécois, c'est celui d'un Québec qui disposerait de plus de pouvoirs et de plus d'indépendance tout en restant au sein du Canada, ce qui est la définition littérale de l'autonomie.
C'est également vrai pour bon nombre de partisans du mouvement souverainiste qui sont en fait des autonomistes déçus tentés par la sécession parce que la réforme de la fédération leur paraissait impossible.
Si ce courant autonomiste reprend vie à travers Mario Dumont, c'est entre autres parce qu'il devient clair pour un grand nombre de souverainistes modérés que l'indépendance ne verra jamais le jour, et qu'il faudra donc trouver autre chose. L'échec électoral cuisant de Bernard Landry, et celui vers lequel se dirige maintenant André Boisclair, s'explique bien davantage par cette impasse que par les traits de personnalité des deux chefs péquistes. L'autonomie peut donc devenir une porte de sortie, une sorte de plan B pour souverainistes découragés, d'autant plus que cette idée s'inscrit bien mieux que la sécession dans les courants mondiaux d'affirmation des petits peuples. Pensons à l'autonomisme catalan.
Bref, Mario Dumont est au bon endroit, au bon moment, avec le bon mot. Son problème pratique, c'est que tous les gouvernements ont été plus ou moins autonomistes, y compris celui de Jean Charest. Comment alors peut-il se distinguer des libéraux, une fois qu'il a exclu l'indépendance?
Et c'est là que ça se gâte. Pour s'affirmer, l'ADQ recourt, comme elle le fait dans beaucoup de dossiers, à des formules-chocs et à des gadgets. Certaines idées sont puériles, comme de définir le Québec comme un «État autonome». D'autres sont casse-cou, comme centraliser la perception des impôts ou mettre fin au front commun avec les autres provinces pour négocier d'égal à égal avec le reste du Canada.
Mais le grand paradoxe, c'est que l'ADQ nous promet de relancer des négociations constitutionnelles avec le Canada. Et c'est ainsi que ce parti, qui incarne pourtant le ras-le-bol constitutionnel, qui se réclame d'une troisième voie, ne nous propose rien d'autre qu'un retour au psychodrame et à une logique d'affrontement.
http://www.cyberpresse.ca/article/20070 ... CPOPINIONS --Message edité par Beppo le 2007-03-07 19:37:20--
Alain Dubuc
Collaboration spéciale, La Presse
À plusieurs reprises, Jean Charest s'en est pris à l'ambiguïté constitutionnelle de Mario Dumont, exigeant qu'il précise dans quel camp il se rangeait: fédéraliste ou souverainiste? Il ne pouvait probablement pas faire un plus beau cadeau au chef de l'ADQ.
Parce que l'un des ingrédients secrets de la recette adéquiste, que l'on a eu tendance à sous-estimer, c'est sa profession de foi autonomiste. Et ce qui en fait la force, c'est justement qu'elle permet à Mario Dumont de n'être dans aucun des deux camps et de refuser de se définir comme fédéraliste ou comme souverainiste.
Il est vrai que le cheminement constitutionnel de Mario Dumont a été particulièrement tortueux. D'abord jeune libéral, il a quitté le PLQ pour fonder un parti très nationaliste, l'ADQ, autour du rapport Allaire, pour ensuite devenir souverainiste quand son parti s'est joint aux forces du OUI, en 1995, avant de se faire apôtre du moratoire et affirmer que les questions constitutionnelles n'étaient pas sur son radar, pour enfin définir l'ADQ comme un parti résolument autonomiste.
Mais dans tous ces virages, typiques de ce qu'ont vécu un grand nombre de Québécois, on retrouve une constante, le désir de Mario Dumont de trouver une troisième voie pour se définir en dehors des deux courants qui monopolisent le débat politique au Québec, et qui le paralysent. Sa politique autonomiste est l'aboutissement de ce processus.
Cet effort d'être quelque part bien au milieu, ni fédéraliste dans le sens classique du terme, ni souverainiste, plaît à un grand nombre de gens. On a pu voir, depuis le début de la campagne, les bienfaits immédiats de cette prise de position, qui permet à l'ADQ d'être un refuge, tant pour les fédéralistes insatisfaits du gouvernement Charest que pour les souverainistes qui n'appuient pas André Boisclair.
Mais au delà de ces gains tactiques, ce cheminement a des résonances beaucoup plus profondes. Le sentiment autonomiste n'a rien de nouveau au Québec. Tous les premiers ministres, depuis Duplessis, ont été autonomistes, chacun à leur façon. Avec son sens de la formule, le chef adéquiste a en quelque sorte mis un copyright sur un terme qui décrit certainement le mieux le sentiment d'une majorité de Québécois.
Le fil directeur de notre vie politique, c'est le nationalisme, que les fédéralistes francophones expriment tout autant que les souverainistes, à travers l'attachement à une nation qui doit s'affirmer, qui doit avoir les outils dont a besoin une minorité, qui doit maintenir des rapports de force avec le reste du Canada, entre autres à travers l'État. Le rêve québécois, c'est celui d'un Québec qui disposerait de plus de pouvoirs et de plus d'indépendance tout en restant au sein du Canada, ce qui est la définition littérale de l'autonomie.
C'est également vrai pour bon nombre de partisans du mouvement souverainiste qui sont en fait des autonomistes déçus tentés par la sécession parce que la réforme de la fédération leur paraissait impossible.
Si ce courant autonomiste reprend vie à travers Mario Dumont, c'est entre autres parce qu'il devient clair pour un grand nombre de souverainistes modérés que l'indépendance ne verra jamais le jour, et qu'il faudra donc trouver autre chose. L'échec électoral cuisant de Bernard Landry, et celui vers lequel se dirige maintenant André Boisclair, s'explique bien davantage par cette impasse que par les traits de personnalité des deux chefs péquistes. L'autonomie peut donc devenir une porte de sortie, une sorte de plan B pour souverainistes découragés, d'autant plus que cette idée s'inscrit bien mieux que la sécession dans les courants mondiaux d'affirmation des petits peuples. Pensons à l'autonomisme catalan.
Bref, Mario Dumont est au bon endroit, au bon moment, avec le bon mot. Son problème pratique, c'est que tous les gouvernements ont été plus ou moins autonomistes, y compris celui de Jean Charest. Comment alors peut-il se distinguer des libéraux, une fois qu'il a exclu l'indépendance?
Et c'est là que ça se gâte. Pour s'affirmer, l'ADQ recourt, comme elle le fait dans beaucoup de dossiers, à des formules-chocs et à des gadgets. Certaines idées sont puériles, comme de définir le Québec comme un «État autonome». D'autres sont casse-cou, comme centraliser la perception des impôts ou mettre fin au front commun avec les autres provinces pour négocier d'égal à égal avec le reste du Canada.
Mais le grand paradoxe, c'est que l'ADQ nous promet de relancer des négociations constitutionnelles avec le Canada. Et c'est ainsi que ce parti, qui incarne pourtant le ras-le-bol constitutionnel, qui se réclame d'une troisième voie, ne nous propose rien d'autre qu'un retour au psychodrame et à une logique d'affrontement.
http://www.cyberpresse.ca/article/20070 ... CPOPINIONS --Message edité par Beppo le 2007-03-07 19:37:20--
Au plaisir!
«Tout ce que tu fais trouve un sens dans ce que tu es.»
- ornitho-max
- Seigneur de la Causerie
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- Inscription : lun. janv. 17, 2005 1:00 am
Pourquoi on dit que Dumont n'as pas d'Équipe
c'est pas parce que nos candidats sont des vedettes que ça nous donne une équipe ??
les candidats ne son pas connus à cause qu'il n'ont pas été au pouvoir
Dirait-on que Philippe Couillard (PLQ) est un bon candidate si il n'aura pas été ministre de la santé ??
Laisser la chance aux candidats de faire leur preuve
c'est pas parce que nos candidats sont des vedettes que ça nous donne une équipe ??
les candidats ne son pas connus à cause qu'il n'ont pas été au pouvoir
Dirait-on que Philippe Couillard (PLQ) est un bon candidate si il n'aura pas été ministre de la santé ??
Laisser la chance aux candidats de faire leur preuve