Je viens de terminer d'écouter le documentaire "Point de Rupture" à Radio-Canada, et j'ai en quelque sorte revécu la défaite du Oui. Et en même temps, je me suis rappelé de ma soirée.
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Ce soir là, j'étais seul dans mon spacieux 3 1/2 du plateau. J'étais déjà un ancien d'IRC, j'étais d'ailleur OP du canal #quebec (ainsi que #francais) et je suivais la soirée électorale à la télé tout en mettant à jour le titre du canal avec le pourcentage des votes OUI et NON.
Le début de la soirée était à la fête avec plus de 60%, mais je me souviens très bien de l'ambiance qui s'est déteriorée avec l'heure qui a passée. Et à part quelques énergumènes d'anglophones qui venaient nour narguer, les gens étaient très déçus à la fin de la soirée, et même, déçu, c'est très faible comme mot.
Est-ce que le scandale des commandites fera pencher les indécis vers le côté du OUI? Est-ce seulement par vengeance, ou si les gens auront compris que le cadre constitutionnel Canadien ne fonctionne pas, avec un gouvernement qui récolte beaucoup d'argent et ne le distribue pas et n'iffre pas de services en retour, mais préfère entasser les surplus?
De quel côté sera Mario Dumont? Lui qui était tout le temps aux basques de Parizeau et Bouchard en 95.
Est-ce que le gouvernement Libéral restectera les règles?
Référendum de 1995
On en parle deja ici
http://forum.aceboard.net/5397-1470-651 ... e-sept.htm
http://forum.aceboard.net/5397-1470-651 ... e-sept.htm
Ok.. Alors pour continuer dans ta direction :
Le 30 octobre 1995 j'avais 10 ans. Mais comme vous devez vous douter, même à cet age je me sentais impliqué dans le référendum. Notre famille c'était toute réuni devant la télévision en espérant voir naître notre liberté collective dans le pays du Québec. Et quand le résultat est sorti, ce sont les larmes qui ont pris le dessus de la joie qu'on avait au début..... Encore aujourd'hui, quand je vois ses images, ça me fait toujours quelques choses..... ;)
*******************
Mario Dumont se dit autonomiste, comme l'était Duplessis à l'époque. Mais selon moi il choisira le camp du OUI en 2008 C'est beaucoup plus intéressant pour lui d'avoir des chances de diriger un pays, plutôt qu'une province
Pour ce qui est des libéraux, ils n'ont pas respecté les règles en 1980 et 1995, donc je ne crois pas qu'ils auront plus de respect pour les règles en 2008
PS : Un débat commance au Point (SRC), ave cles candidats du PQ
Le 30 octobre 1995 j'avais 10 ans. Mais comme vous devez vous douter, même à cet age je me sentais impliqué dans le référendum. Notre famille c'était toute réuni devant la télévision en espérant voir naître notre liberté collective dans le pays du Québec. Et quand le résultat est sorti, ce sont les larmes qui ont pris le dessus de la joie qu'on avait au début..... Encore aujourd'hui, quand je vois ses images, ça me fait toujours quelques choses..... ;)
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Mario Dumont se dit autonomiste, comme l'était Duplessis à l'époque. Mais selon moi il choisira le camp du OUI en 2008 C'est beaucoup plus intéressant pour lui d'avoir des chances de diriger un pays, plutôt qu'une province
Pour ce qui est des libéraux, ils n'ont pas respecté les règles en 1980 et 1995, donc je ne crois pas qu'ils auront plus de respect pour les règles en 2008
PS : Un débat commance au Point (SRC), ave cles candidats du PQ
Les sophismes de Pettigrew
Bernard Descôteaux
Édition du samedi 10 et du dimanche 11 septembre 2005
Le documentaire Point de rupture nous a fait revivre cette semaine la saga référendaire de 1995. Les promesses de changement faites alors pour garder le Québec dans la fédération ne se sont jamais réalisées. Dix ans plus tard, Ottawa ne bouge toujours pas, comme l'a illustré cette semaine le rejet d'une présence autonome du Québec sur la scène internationale de peur de donner des outils aux «fanatiques de l'indépendance».a volonté de sortir du statu quo constitutionnel n'est pas le propre des seuls indépendantistes. À leur manière, les fédéralistes qui se retrouvent au sein du Parti libéral du Québec tentent, chaque fois qu'ils le peuvent, d'élargir l'espace dont le Québec dispose dans la fédération. Jean Charest, dont on attendait pourtant peu, fait ainsi un effort remarquable pour que soit reconnue la capacité du Québec à parler en son nom propre sur des questions relevant de sa compétence.
Cette revendication, qui repose sur des fondements constitutionnels incontestables établis en 1965 par Paul Gérin-Lajoie, fait l'objet d'un consensus à ce point large que le premier ministre Paul Martin ne pouvait ne pas l'entendre depuis Ottawa. Dans le contexte de mondialisation, il est de plus en plus important que le Québec puisse agir sur la scène internationale. Que soient clarifiés les domaines d'intervention où il pourra le faire seul et ceux où il devra le faire en relation avec Ottawa s'impose.
Le ministre des Affaires étrangères, Pierre Pettigrew, qui a eu le mandat de négocier avec le Québec, s'est montré d'emblée peu empressé. Laisser passer 20 mois avant une première rencontre constituait déjà une indication qu'il allait aborder les discussions avec de fortes réserves. On en a eu la confirmation la semaine dernière lorsqu'il qualifia de dépassée la doctrine Gérin-Lajoie. C'était une façon de dire que la revendication du gouvernement Charest, bien que fondée constitutionnellement, ne correspond plus à notre époque de mondialisation qui exige que le Canada parle d'une seule voix. L'argument s'inverse facilement comme le font dans un texte qu'ils signent dans la page voisine les ministres Benoît Pelletier et Monique Gagnon-Tremblay au nom du gouvernement québécois.
Ce mauvais sophisme ne tenant pas la route, Pierre Pettigrew s'est rabattu cette semaine sur un autre argument, celui des «fanatiques de l'indépendance». À l'entendre, il ne faudrait pas faire de concession au Québec de peur que les indépendantistes ne se servent d'un précédent sur lequel Ottawa ne pourrait plus revenir. Il y aurait danger à reconnaître au Québec le droit de parler en son nom propre au sein de l'Unesco dont le mandat éducatif est clairement dans le champ de compétence constitutionnelle du Québec. Le ministre voudrait que l'on se contente de moduler la voix internationale du Canada pour y intégrer les «expertises» québécoises.
Des précédents, il y en a eu pourtant quelques-uns de très importants faits par Ottawa par le passé, y compris avec des gouvernements péquistes. Citons l'entente Couture-Cullen sur l'immigration et celle permettant au Québec de siéger comme gouvernement participant à la Francophonie. Ils ont été concédés au Québec, l'un par Pierre Elliott Trudeau, l'autre par Brian Mulroney, qui n'ont pas eu peur des «fanatiques de l'indépendance».
L'attitude de M. Pettigrew est difficile à comprendre. Son propos laisse entendre que la légitimité du gouvernement québécois varie selon la couleur politique, qu'il y aurait des concessions que pourrait faire Ottawa seulement à un premier ministre libéral, mais qu'après tout, puisque Jean Charest risque de perdre les prochaines élections, il vaut mieux s'abstenir. Il y a pas si longtemps, le discours qu'on entendait à Ottawa était bien différent. Élisez Jean Charest, disait-on aux Québécois en les assurant qu'il serait tellement plus facile de s'entendre lorsqu'un parti fédéraliste serait au pouvoir à Québec. Vraiment ? Constatons que souvent Ottawa varie et que bien fol qui s'y fie.
bdescoteaux@ledevoir.ca
Bernard Descôteaux
Édition du samedi 10 et du dimanche 11 septembre 2005
Le documentaire Point de rupture nous a fait revivre cette semaine la saga référendaire de 1995. Les promesses de changement faites alors pour garder le Québec dans la fédération ne se sont jamais réalisées. Dix ans plus tard, Ottawa ne bouge toujours pas, comme l'a illustré cette semaine le rejet d'une présence autonome du Québec sur la scène internationale de peur de donner des outils aux «fanatiques de l'indépendance».a volonté de sortir du statu quo constitutionnel n'est pas le propre des seuls indépendantistes. À leur manière, les fédéralistes qui se retrouvent au sein du Parti libéral du Québec tentent, chaque fois qu'ils le peuvent, d'élargir l'espace dont le Québec dispose dans la fédération. Jean Charest, dont on attendait pourtant peu, fait ainsi un effort remarquable pour que soit reconnue la capacité du Québec à parler en son nom propre sur des questions relevant de sa compétence.
Cette revendication, qui repose sur des fondements constitutionnels incontestables établis en 1965 par Paul Gérin-Lajoie, fait l'objet d'un consensus à ce point large que le premier ministre Paul Martin ne pouvait ne pas l'entendre depuis Ottawa. Dans le contexte de mondialisation, il est de plus en plus important que le Québec puisse agir sur la scène internationale. Que soient clarifiés les domaines d'intervention où il pourra le faire seul et ceux où il devra le faire en relation avec Ottawa s'impose.
Le ministre des Affaires étrangères, Pierre Pettigrew, qui a eu le mandat de négocier avec le Québec, s'est montré d'emblée peu empressé. Laisser passer 20 mois avant une première rencontre constituait déjà une indication qu'il allait aborder les discussions avec de fortes réserves. On en a eu la confirmation la semaine dernière lorsqu'il qualifia de dépassée la doctrine Gérin-Lajoie. C'était une façon de dire que la revendication du gouvernement Charest, bien que fondée constitutionnellement, ne correspond plus à notre époque de mondialisation qui exige que le Canada parle d'une seule voix. L'argument s'inverse facilement comme le font dans un texte qu'ils signent dans la page voisine les ministres Benoît Pelletier et Monique Gagnon-Tremblay au nom du gouvernement québécois.
Ce mauvais sophisme ne tenant pas la route, Pierre Pettigrew s'est rabattu cette semaine sur un autre argument, celui des «fanatiques de l'indépendance». À l'entendre, il ne faudrait pas faire de concession au Québec de peur que les indépendantistes ne se servent d'un précédent sur lequel Ottawa ne pourrait plus revenir. Il y aurait danger à reconnaître au Québec le droit de parler en son nom propre au sein de l'Unesco dont le mandat éducatif est clairement dans le champ de compétence constitutionnelle du Québec. Le ministre voudrait que l'on se contente de moduler la voix internationale du Canada pour y intégrer les «expertises» québécoises.
Des précédents, il y en a eu pourtant quelques-uns de très importants faits par Ottawa par le passé, y compris avec des gouvernements péquistes. Citons l'entente Couture-Cullen sur l'immigration et celle permettant au Québec de siéger comme gouvernement participant à la Francophonie. Ils ont été concédés au Québec, l'un par Pierre Elliott Trudeau, l'autre par Brian Mulroney, qui n'ont pas eu peur des «fanatiques de l'indépendance».
L'attitude de M. Pettigrew est difficile à comprendre. Son propos laisse entendre que la légitimité du gouvernement québécois varie selon la couleur politique, qu'il y aurait des concessions que pourrait faire Ottawa seulement à un premier ministre libéral, mais qu'après tout, puisque Jean Charest risque de perdre les prochaines élections, il vaut mieux s'abstenir. Il y a pas si longtemps, le discours qu'on entendait à Ottawa était bien différent. Élisez Jean Charest, disait-on aux Québécois en les assurant qu'il serait tellement plus facile de s'entendre lorsqu'un parti fédéraliste serait au pouvoir à Québec. Vraiment ? Constatons que souvent Ottawa varie et que bien fol qui s'y fie.
bdescoteaux@ledevoir.ca
Ce soir-là, un pays a failli naître
Michel Venne
Édition du lundi 12 septembre 2005
Les grandes pages de publicité parues le jour même dans les grands quotidiens préparaient déjà les esprits avec un slogan en lettres de bois. Nous allions revivre, à la télévision, un moment pénible de notre histoire: «Ce soir-là, le pays a failli éclater.»
Le documentaire radio-canadien sur le référendum de 1995 ne déçoit pas les amateurs de frissons. Tout -- le rythme, le ton, la mise en scène, la voix du narrateur, la lumière et, bien sûr, la musique angoissante et lugubre --, donne le sentiment qu'on l'a franchement échappé belle. Ce choix éditorial est défendable. Il révèle toutefois le point de vue des auteurs et des producteurs.
La publicité aurait pu annoncer : «Ce soir-là, un pays a failli naître !» Et au lieu de construire le récit autour de la montée de l'angoisse des Canadiens anglais au bord de la crise de nerfs, prêts à lyncher Jean Chrétien s'il l'avait fallu, mettre au coeur de l'intrigue l'adhésion d'un nombre croissant de Québécois au principe de souveraineté, avec la dose de courage et de fierté que cela comporte.
Le document se serait terminé sur une déception. Mais la leçon tirée aurait été différente. La question posée par Point de rupture c'est : que faire pour que ça ne se reproduise plus ? D'autres auraient sans doute demande : que faire pour que ça réussisse enfin ?
Point de rupture n'est qu'une version parmi d'autres de ce jalon-clé de notre histoire.
***
Cette version permet de mieux comprendre dans quel état d'esprit les Canadiens aborderont «la prochaine fois». La Loi sur la clarté prépare déjà l'ingérence fédérale dans la campagne. Le Canada hors Québec ne laissera pas un Québécois négocier en son nom. Et la communauté internationale sera appelée en renfort.
Le document comporte cependant des faiblesses qui pourraient induire la population et les leaders politiques en erreur quant aux raisons expliquant les succès de la souveraineté en 1995 et la persistance de ses appuis (au-delà de 50 %) dix ans après la grande frousse.
La seule raison évoquée pour expliquer la popularité actuelle de l'option est le scandale des commandites.
La montée du OUI pendant la campagne référendaire de 1995 est quant à elle expliquée presque entièrement par une frénésie «irrationnelle» (c'est le mot employé par le narrateur) provoquée chez les Québécois par «le miraculé» Lucien Bouchard.
Est-il possible que les Canadiens nous perçoivent encore comme une bande d'émotifs dénués de raison ? N'y avait-il pas des journalistes québécois dans l'équipe de Point de rupture ? N'ont-ils pas remarqué que, dès le départ, la campagne du NON jouait elle aussi sur une émotion forte : l'insécurité économique ? Pierre Pettigrew aurait sans doute assimilé le discours du camp du NON à du fanatisme...
Personne ne niera le rôle de premier plan joué par Lucien Bouchard durant et avant la campagne. Mais comme il avait eu lui-même l'humilité de le dire, dans une entrevue à La Presse : «Parizeau pourra dire : "j'ai apporté 45 points, Bouchard cinq points". Il n'y a pas de honte là-dedans.»
L'effet Bouchard fait l'objet d'un débat dans les cercles scientifiques. Les résultats de sondages menés avant qu'il soit propulsé au devant de la scène souverainiste (le 7 octobre) indiquent toutefois que la montée du OUI s'était amorcée bien avant. Décima donnait 48 % au OUI le 24 septembre. Angus Reid 47 % le 27. Léger Marketing 49 % le 26. CROP 47 % le 28. SOM 49 % le 29. Léger Marketing 50 % le 2 octobre.
***
En personnalisant le combat national, les auteurs du documentaire commettent deux erreurs fréquentes : ils oublient le poids de l'histoire; ils ne tiennent aucun compte des mouvements sociaux qui sont à l'oeuvre malgré l'action des chefs.
En 1990, lorsque l'Accord du lac Meech (reconnaissant le Québec comme société distincte) a été répudié au Canada anglais avec l'aide de Jean Chrétien, l'appui à la souveraineté avait atteint 65 %. Il devait bien rester quelque chose, en 1995, de cet élan de dignité et de confiance découlant lui-même de quatre siècles d'histoire.
Un autre facteur a joué en 1995, complètement ignoré par les documentaristes de CBC : en marge des discours des chefs, les mouvements sociaux ont mis la main à la pâte. Ils étaient dans le camp du OUI : groupes d'aide aux assistés sociaux, groupes féministes, mouvement étudiant. Il y avait même «les religieuses pour le OUI».
Leur action, sur le terrain, auprès des petites gens, contribuait à donner un contenu à la souveraineté. Le OUI n'avait plus pour but seulement de planter son drapeau au siège des Nations unies. Il ferait déboucher le Québec sur une société meilleure. Dès les premiers jours de la campagne, Jacques Parizeau avait dénoncé les compressions fédérales dans l'assurance chômage et les pensions de vieillesse. Le camp du OUI, fort de ses «partenaires», était le camp du changement social. Lorsque les chefs de grandes entreprises ont pris la parole en faveur du NON, la campagne prit des allures de lutte des classes.
L'histoire du référendum n'est pas celle d'une chicane entre quelques membres vieillissants de l'élite québécoise. Il y avait aussi un peuple, lui aussi divisé, mettant dans la balance ses aspirations et ses doutes, ses peurs et ses rêves.
michel.venne@inm.qc.ca
Michel Venne
Édition du lundi 12 septembre 2005
Les grandes pages de publicité parues le jour même dans les grands quotidiens préparaient déjà les esprits avec un slogan en lettres de bois. Nous allions revivre, à la télévision, un moment pénible de notre histoire: «Ce soir-là, le pays a failli éclater.»
Le documentaire radio-canadien sur le référendum de 1995 ne déçoit pas les amateurs de frissons. Tout -- le rythme, le ton, la mise en scène, la voix du narrateur, la lumière et, bien sûr, la musique angoissante et lugubre --, donne le sentiment qu'on l'a franchement échappé belle. Ce choix éditorial est défendable. Il révèle toutefois le point de vue des auteurs et des producteurs.
La publicité aurait pu annoncer : «Ce soir-là, un pays a failli naître !» Et au lieu de construire le récit autour de la montée de l'angoisse des Canadiens anglais au bord de la crise de nerfs, prêts à lyncher Jean Chrétien s'il l'avait fallu, mettre au coeur de l'intrigue l'adhésion d'un nombre croissant de Québécois au principe de souveraineté, avec la dose de courage et de fierté que cela comporte.
Le document se serait terminé sur une déception. Mais la leçon tirée aurait été différente. La question posée par Point de rupture c'est : que faire pour que ça ne se reproduise plus ? D'autres auraient sans doute demande : que faire pour que ça réussisse enfin ?
Point de rupture n'est qu'une version parmi d'autres de ce jalon-clé de notre histoire.
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Cette version permet de mieux comprendre dans quel état d'esprit les Canadiens aborderont «la prochaine fois». La Loi sur la clarté prépare déjà l'ingérence fédérale dans la campagne. Le Canada hors Québec ne laissera pas un Québécois négocier en son nom. Et la communauté internationale sera appelée en renfort.
Le document comporte cependant des faiblesses qui pourraient induire la population et les leaders politiques en erreur quant aux raisons expliquant les succès de la souveraineté en 1995 et la persistance de ses appuis (au-delà de 50 %) dix ans après la grande frousse.
La seule raison évoquée pour expliquer la popularité actuelle de l'option est le scandale des commandites.
La montée du OUI pendant la campagne référendaire de 1995 est quant à elle expliquée presque entièrement par une frénésie «irrationnelle» (c'est le mot employé par le narrateur) provoquée chez les Québécois par «le miraculé» Lucien Bouchard.
Est-il possible que les Canadiens nous perçoivent encore comme une bande d'émotifs dénués de raison ? N'y avait-il pas des journalistes québécois dans l'équipe de Point de rupture ? N'ont-ils pas remarqué que, dès le départ, la campagne du NON jouait elle aussi sur une émotion forte : l'insécurité économique ? Pierre Pettigrew aurait sans doute assimilé le discours du camp du NON à du fanatisme...
Personne ne niera le rôle de premier plan joué par Lucien Bouchard durant et avant la campagne. Mais comme il avait eu lui-même l'humilité de le dire, dans une entrevue à La Presse : «Parizeau pourra dire : "j'ai apporté 45 points, Bouchard cinq points". Il n'y a pas de honte là-dedans.»
L'effet Bouchard fait l'objet d'un débat dans les cercles scientifiques. Les résultats de sondages menés avant qu'il soit propulsé au devant de la scène souverainiste (le 7 octobre) indiquent toutefois que la montée du OUI s'était amorcée bien avant. Décima donnait 48 % au OUI le 24 septembre. Angus Reid 47 % le 27. Léger Marketing 49 % le 26. CROP 47 % le 28. SOM 49 % le 29. Léger Marketing 50 % le 2 octobre.
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En personnalisant le combat national, les auteurs du documentaire commettent deux erreurs fréquentes : ils oublient le poids de l'histoire; ils ne tiennent aucun compte des mouvements sociaux qui sont à l'oeuvre malgré l'action des chefs.
En 1990, lorsque l'Accord du lac Meech (reconnaissant le Québec comme société distincte) a été répudié au Canada anglais avec l'aide de Jean Chrétien, l'appui à la souveraineté avait atteint 65 %. Il devait bien rester quelque chose, en 1995, de cet élan de dignité et de confiance découlant lui-même de quatre siècles d'histoire.
Un autre facteur a joué en 1995, complètement ignoré par les documentaristes de CBC : en marge des discours des chefs, les mouvements sociaux ont mis la main à la pâte. Ils étaient dans le camp du OUI : groupes d'aide aux assistés sociaux, groupes féministes, mouvement étudiant. Il y avait même «les religieuses pour le OUI».
Leur action, sur le terrain, auprès des petites gens, contribuait à donner un contenu à la souveraineté. Le OUI n'avait plus pour but seulement de planter son drapeau au siège des Nations unies. Il ferait déboucher le Québec sur une société meilleure. Dès les premiers jours de la campagne, Jacques Parizeau avait dénoncé les compressions fédérales dans l'assurance chômage et les pensions de vieillesse. Le camp du OUI, fort de ses «partenaires», était le camp du changement social. Lorsque les chefs de grandes entreprises ont pris la parole en faveur du NON, la campagne prit des allures de lutte des classes.
L'histoire du référendum n'est pas celle d'une chicane entre quelques membres vieillissants de l'élite québécoise. Il y avait aussi un peuple, lui aussi divisé, mettant dans la balance ses aspirations et ses doutes, ses peurs et ses rêves.
michel.venne@inm.qc.ca