Éducation
6 enseignantes en 7 mois
Sébastien Ménard
Le Journal de Montréal
17/03/2010 04h57
Les sept premiers mois dans le système scolaire québécois sont en train de se transformer en gâchis pour des enfants d'une école de Montréal. Depuis le début de l'année scolaire, ces élèves de maternelle ont connu pas moins de six enseignantes différentes, ce qui pourrait nuire à leur réussite, prévient un expert.
La sixième prof à avoir enseigné aux élèves de l'école Philippe-Labar re, dans le quartier Tétreaultville, est entrée en fonction il y a à peine trois jours.
«Face au mécontentement des parents», qui dénoncent le manque de stabilité dont sont victimes leurs enfants, la Commission scolaire de Montréal (CSDM) a décidé de lui adjoindre un «technicien en éducation spécialisée » à temps plein.
Le tandem devrait demeurer en poste jusqu'à la fin de l'année, a assuré hier le porte-parole de la CSDM, Alain Perron.
Conventions collectives
Depuis sept mois, le quotidien de ces 22 écoliers âgés de 5 et 6 ans a été perturbé par deux grossesses, mais aussi par les règles prévues à la convention collective des profs pour l'attribution des postes.
L'année scolaire des enfants avait bien mal commencé. L'enseignante qui aurait dû les accueillir à la rentrée était enceinte et ne s'est jamais présentée au travail.
Une remplaçante a pris le relais durant deux semaines, le temps que le poste soit attribué à une autre prof, en vertu des règles internes de la Commission scolaire.
Mais cette deuxième enseignante était aussi enceinte et n'est restée qu'un mois, avant de bénéficier d'un retrait préventif.
Suivant les règles en vigueur, la CSDM a dû procéder à un deuxième «affichage» pour combler le poste. Entre-temps, une troisième prof avait fait son entrée dans la classe...
C'est une enseignante en congé de mater nité qui a hérité du contrat, mais elle ne pouvait occuper ses fonctions avant la fin de son congé, en mars.
Une quatrième prof l'a donc remplacée, pendant 73 jours de classe, et lui a cédé sa place après la semaine de relâche. C'est cette suppléante qui détient le «record de longévité», cette année, dans ce groupe de maternelle.
Les parents et élèves n'ont pas réservé un accueil très chaleureux à la cinquième enseignante, qui s'est finalement «désistée», après trois jours de travail.
Prise au dépourvu, la CSDM a dû faire appel à une sixième prof, qui a été présentée aux parents hier après-midi.
Nuisible pour les enfants
Ces changements successifs d'enseignantes peuvent «nuire aux enfants», prévient le professeur Gérald Boutin, un expert en éducation de l'UQAM.
«Le passage de la garderie à la maternelle, c'est un moment crucial, dit-il. Il faut que ça se fasse en douceur. Le fait de changer d'enseignante aussi souvent, ça ne peut avoir qu'un effet négatif, surtout sur certains enfants fragiles qui ont eu de la difficulté à entrer à l'école.»
La CSDM reconnaît que la situation est «particulière», mais estime qu'elle est à la merci de plusieurs éléments hors de son contrôle. Le porte-parole de l'organisme évoque notamment «le processus de dotation des postes d'enseignants», pour justifier ce jeu de chaises musicales.
Selon Gérald Boutin, il est sans doute temps d'introduire «de la souplesse » dans ce système. «On a beaucoup de choses à apprendre pour la distribution des postes d'enseignants et tout le reste», estime-t-il.
Le jeu de chaises musicales*
Voici à quoi ressemble l'année scolaire dans cette classe de maternelle. Toutes les dates sont approximatives.
(*Les dates sont basées sur les informations fournies par la CSDM, sur les témoignages de parents et sur le calendrier scolaire.)
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Prof 1.
Du 24 août au 4 septembre
Remplace la prof enceinte à qui le groupe avait été confié, pendant que le poste est soumis à un «affichage.»
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Prof 2.
Du 8 septembre au 8 octobre
Obtient le poste. Doit quitter en raison d'un retrait préventif.
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Prof 3.
Du 9 octobre au 30 octobre
Remplace la deuxième enseignante, pendant que le poste est soumis à un second «affichage».
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Prof 4.
Du 2 novembre au 26 février
Remplace l'enseignante qui avait obtenu le poste au terme du second affichage. Celle-ci ne pouvait pas l'occuper tout de suite, étant à la maison en congé de maternité.
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Prof 5.
Du 8 au 10 mars
L'enseignante qui avait obtenu le poste en novembre entre en fonction, mais quitte après trois jours.
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Prof 6.
Depuis le 15 mars
La CSDM fait appel à une 6e enseignante. Un technicien en éducation spécialisée est appelé en renfort dans la classe.
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. Des fois j'ai vraiment l'impression que les jeunes se pleigne le ventre plein. 
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Parce que ces parents-là aussi, contribuent au système de garderies subventionnées... Et y'en a plusieurs qui ne trouvent pas de places, c'est dommage... Peut-être qu'on devrait mettre sur pied des halte-garderies qui, elles, répondraient aux besoins des parents qui ne travaillent pas mais qui ont parfois envie d'avoir une pause ou de permettre à leurs enfants de socialiser. Il me semble que ce serait plus juste... Parce que pour l'instant, je trouve que c'est bien triste de voir des parents découragés parce qu'ils n'arrivent pas à trouver de place (et pas seulement des places à 7$, dans certains secteurs il n'y a plus rien du tout de disponible!). Quand il faut vraiment que tu retournes travailler et que tu ne trouves pas, ça doit être vraiment angoissant... 
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