Le mannequin canadien Coco Rocha victime de l'industrie
Marie-Joëlle Parent
18-02-2010 | 19h58

NEW YORK - Le mannequin canadien Coco Rocha est la dernière victime de l'industrie de la mode où la taille 0 règne encore sur les passerelles.
«Je suis un mannequin âgée de 21 ans qui mesure 6 pouces de plus et qui porte 10 tailles de moins que la femme américaine moyenne. Malgré tout, dans cet univers parallèle, je suis considérée comme grosse».
Elle mesure 5 pieds 10 et porte la taille 4. Malgré un physique que plusieurs envient, Coco est considérée trop «grosse» pour défiler durant la Semaine de Mode de New York. Elle qui défilait, il n'y pas si longtemps, pour les plus grands couturiers comme Chanel, Dior, Vuitton.
Son histoire s'est retrouvée dans le New York Times cette semaine. Le lendemain le New York Daily News titrait sur sa page couverture: «Est-elle trop grosse pour défiler comme mannequin?»
Malgré tous les efforts qui ont été faits depuis la mort du mannequin brésilien qui souffrait d'anorexie en 2006 (elle pesait 88 livres), il semble que ça ne se traduise pas à la source: sur les passerelles des grands défilés.
Coco raconte que depuis que son corps de jeune fille a pris quelques formes, elle n'est plus en demande comme avant. La taille 4 (65 cm de tour de taille) ne convient plus pour les échantillons de défilés. Le standard dans l'industrie c'est la taille 0 (58 cm). C'est pourquoi on voit de plus en plus de mannequins de 13-14-15 ans.
«J’ai cessé de me faire du souci avec ça. Si je veux manger un hamburger, je vais en manger un. Aucune fille de 21 ans ne devrait se préoccuper de savoir si elle habille les échantillons de vêtements», a confié le mannequin originaire de Vancouver, au New York Times.
Ça n'a pas toujours été le cas. L'an dernier, elle a avoué avoir déjà pris des diurétiques pour l'aider à maigrir devant un colloque organisé par le Council of Fashion Designers of America. Le groupe se penche maintenant sur la question de la taille de ces fameux échantillons.
Lorsqu'elle pesait 108 livres, on lui a aussi dit de maigrir pour se conformer au look anorexique de l'heure. Coco n'est pas la seule à subir cette pression. Récemment, le mannequin australien Gemma Wards, qui était un des visages de l'heure, a été rayé de la carte parce qu'elle avait pris des kilos.
«L’essence du problème, ce sont les échantillons. Si nous pouvions changer cela, nous pourrions changer le monde», explique Ben Barry, propriétaire d'une agence de mannequins de Toronto qui engage des mannequins diversifiés. Il a notamment travaillé sur la campagne DOVE.
«Chaque créateur fait un prototype de chaque tenue de sa collection. Cet échantillon est celui qui est présenté lors des défilés et celui qui est photographié dans les magazines. Il est si important qu’il dicte le choix des mannequins qui défilent et de celles qui sont dans les magazines», dit Ben Barry. Il se bat pour que les créateurs proposent plutôt trois échantillons (tailles 2-8 et 14).
Après huit jours à couvrir le New York Fashion Week, il est impossible de rester indifférent devant l'extrême maigreur des mannequins. Les mannequins choisis sont des brindilles. «Ça ne s’améliore pas, les mannequins sont plus minces que jamais», dit Ben Barry.
Il y a pourtant un vent de changement. Récemment on a vu des magazines comme V consacrer un numéro à des mannequins tailles fortes. Sur la page couverture de New York Magazine cette semaine, on retrouve l'actrice voluptueuse de Mad Men, Christina Hendricks.
Pour la couverture du dernier numéro du LA Times Magazine, l'actrice Emily Blunt a clairement spécifié: «J’ai dit au photographe de ne pas m’amincir. Je déteste lorsque vos jambes semblent trois fois plus longues qu’elles ne le sont en réalité».
«Dire que Coco est trop grosse montre que l’industrie a perdu le contact avec le consommateur et qu’elle a désespérément besoin de recréer des liens», a conclu Ben Barry.
http://www.canoe.com/divertissement/art ... 6-qmi.html" onclick="window.open(this.href);return false;